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Mère condamnée pour des excisions sur ses filles

Une vue du Tribunal de police de Boudry (NE), qui a jugé une mère de famille somalienne.

La Somalienne, qui était soupçonnée d'avoir poussé à la mutilation des organes génitaux de ses deux filles, a été condamnée jeudi à une peine de huit mois de prison avec sursis de deux ans par le Tribunal de police à Boudry (NE). Les frais sont mis à sa charge.

«Je n'ai pas la prétention de faire changer les choses mais de faire en sorte que ce jugement apporte une pierre à l'édifice pour éliminer les souffrances de millions de fillettes», a déclaré Nathalie Kocherhans, juge du Tribunal du Littoral et du Val-de-Travers. Ce jugement était très attendu, car il n'y a pas encore eu de jurisprudence sur l'article 124 du Code pénal, qui existe depuis 2012.

Pour la juge, le fait que l'accusée n'était pas domiciliée en Suisse au moment des faits - elle vivait en Somalie - ne constitue pas un motif d'acquittement, comme l'avait plaidé la défense. «Il n'y a pas d'interprétation possible» du principe d'universalité, a ajouté la juge.

Même si l'accusée avait été en transit en Suisse, elle aurait pu se faire condamner. L'avocate de la défense, Me Béatrice Haeny, avait estimé la veille que l'universalité de la poursuite avait été uniquement prévue pour empêcher le «tourisme de l'excision» et faire en sorte que des personnes résidant en Suisse envoient leurs filles se faire exciser à l'étranger.

Considérées comme des prostituées

L'avocate de la défense avait ajouté: «Si ma cliente est condamnée, toutes les mamans qui ont fait exciser leurs filles avant d'arriver en Suisse devront être punies». Elle avait précisé que «jamais sa cliente n'aurait été punie si elle n'était pas venue en Suisse».

Selon Me Béatrice Haeny, même si l'excision est interdite en Somalie depuis 2012, personne n'a été condamné dans ce pays-là pour ce fait-là. Elle a rappelé que 98% des femmes somaliennes sont excisées et que celles qui ne le sont pas sont considérées «comme des prostituées», qui ne pourront jamais se marier.

Si la procureure, Nathalie Guillaume-Gentil Gross, est consciente que l'excision est pratiquée pour des raisons culturelles, elle a toutefois ajouté que c'est «une violence physique, sexuelle et psychique» faite aux femmes. Si l'universalité de la poursuite a été instaurée, c'est parce qu'il s'agit d'un «crime intolérable, odieux et cruel».

Tout comme la juge, le Ministère public estime que le message à faire passer - notamment aux communautés somaliennes et éthiopiennes qui vivent en Suisse - est plus important que la fixation de la peine. La procureure avait réclamé une peine privative de liberté de un an et demi avec un sursis de deux ans et des frais de procédure à sa charge.

Situation personnelle difficile

Dans son verdict, la juge a estimé que l'accusée était co-auteur de cet acte. Lors de l'audience de mercredi, la prévenue avait livré une version différente de celle qu'elle avait donnée lors de son audition par la police. Elle avait déclaré que c'était sa mère qui avait fait exciser ses filles pendant son absence, lorsqu'elle était en train de vendre des légumes au marché.

La juge n'a pas cru à cette nouvelle version et pour elle, «il est clair que c'est elle qui est allée chercher l'exciseuse».

Les deux petites victimes, âgées de 12 et 11 ans actuellement, avaient entre sept et six ans et demi au moment des faits. L'aînée a subi une excision totale ou quasi-totale (infibulation, soit mutilation génitale de type III) et la cadette une ablation clitoridienne partielle, soit une excision du prépuce associée à une amputation partielle du clitoris (mutilation de type I).

La juge a reconnu les circonstances personnelles difficiles de la prévenue, qui vit séparée de son époux avec quatre enfants à charge. De plus, cette maman analphabète «avait peu de capacités d'aller à l'encontre de la culture» de son pays et de s'opposer à l'excision. Nathalie Kocherhans a aussi reconnu l'erreur sur l'illicéité, ce qui a permis d'atténuer la sanction.

La juge a fixé avant tout «une peine symbolique». Vu la gravité de l'acte, une peine de privation de liberté était toutefois nécessaire, a-t-elle expliqué.

ats