En attendant (peut-être) le foot, la France est déjà championne ailleurs
Il n'y a pas que le football : dans l'industrie, les sciences et les arts, les Français conquièrent le monde. Raison de plus pour croire aux chances des Bleus avant la finale.
Toute la France est derrière eux. Oui, toute la France et ce constat suffit à dire le caractère exceptionnel de l'instant. Par la magie unique du football, un pays qui se complaît d'ordinaire dans ses divisions se rassemble soudain dans la ferveur. Une nation hantée par les démons du communautarisme se ressoude derrière ses héros, par-delà les différences. Un peuple qui n'aime rien tant que douter de lui-même se surprend à reprendre confiance. En ce lendemain de 14-Juillet , c'est comme si la fête nationale jouait les prolongations : tous les Français rêvent qu'à Moscou, on tire un autre feu d'artifice. Et notre sondage en témoigne : ils y croient dur comme fer.
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"J'ai envie que les jeunes disent : 'Vive la France, vive la République!'", a lancé vendredi Antoine Griezmann , porte-drapeau d'une génération de gamins au patriotisme tranquille. Cela aussi a surpris, tant ses prédécesseurs sous le maillot bleu nous avaient habitués à des comportements de parvenus et à des moues dédaigneuses. Le fait est que, par cette combinaison de sérieux et de malice qui est peut-être sa force principale, l'équipe de Didier Deschamps a de quoi inspirer la jeunesse française – et les plus âgés, d'ailleurs. Mbappé, Pogba, Varane et les autres sont riches, ne le cachent pas, et personne n'incarne mieux qu'eux la mondialisation triomphante ; pourtant, rien de cela ne dissuade leurs compatriotes, de toutes extractions, de les aimer ni de les admirer. À leur façon, ils sont ces "premiers de cordée" qu'Emmanuel Macron voudrait ériger en modèles, à grand-peine jusqu'ici – le sport est souvent plus convaincant que la politique.
Notre pays reste une terre d'avenir
"Blacks-Blancs-Beurs"? Bien sûr que oui et pourquoi ne faudrait-il pas le dire? Déjà, la petite musique du doute s'entend au milieu des hymnes et des chants. Pour que "la France reste la France", comme l'y invitent les grincheux, elle doit savoir assumer ce qu'elle est, pour le meilleur et parfois, hélas, pour le pire. Vingt ans après la bande de Zidane, le miroir que nous tend cette équipe reflète l'image d'un pays réconcilié. C'est sans doute provisoire, mais toujours bon à prendre.
Décidément éclairé, "Grizou" a énoncé cette autre évidence : "On le dit très peu, mais c'est bien, en France." Ce message-là mérite également l'attention. Notre pays reste une terre d'avenir, d'imagination, de créativité, de performance. Il n'y a pas de meilleur jour que celui d'une finale mondiale pour le rappeler et s'en féliciter. Les succès de notre industrie, de nos chercheurs et de nos artistes démontrent la persistance d'une excellence française. Ils sont le fruit de systèmes de formation, de sélection et – osons le dire – d'intégration critiquables et perfectibles mais moins inefficaces qu'on ne le fait croire. Et ils illuminent notre pays tout entier, c'est pourquoi on le remarque encore de si loin.
Béatitude cocardière, aveuglement de supporter ? Non. La France n'est certes plus un empire et le hasard veut que nos footballeurs reviennent au sommet la semaine où notre économie recule au septième rang mondial (dépassée par l'Inde et son 1,3 milliard d'habitants). Pour autant, les conquêtes tricolores continuent à travers la planète, le JDD en dresse un inventaire subjectif, qui s'étend bien au-delà des stades et des podiums. Avant la finale de dimanche après-midi, l'énumération de nos champions est l'antidote idéal au poison lent du "c'était mieux avant", distillé par les pleurnichards qui brandissent trop leur fierté d'être français pour dissimuler qu'ils ne croient plus guère en la France. Même si la victoire est au rendez-vous, la lucidité restera de rigueur : personne n'imagine qu'un but de plus que les Croates fera baisser le chômage ni reculer la délinquance. "Un match après l'autre", ont coutume de dire les footballeurs. Dès demain, bien des difficultés resteront devant nous. Mais un exploit au moins est déjà accompli : grâce au onze de Deschamps, la France est prête à voir l'avenir en bleu. Pour combien de temps?
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