“La France a été la meilleure équipe, cela ne fait aucun doute”, admet du bout des lèvres The Irish Times. “Mais si vous n’êtes pas français, les émotions suscitées par cette finale sont davantage de l’ordre du peu mémorable que de l’inoubliable.”

Pour le quotidien de Dublin, la sélection de Didier Deschamps inspire, “avec réticence”, “du respect plutôt que de l’admiration, de la stupéfaction et de la tendresse”. Et le journal irlandais d’enfoncer le clou, en usant d’une métaphore équestre : “On peut dire que si la France n’a pas eu vraiment à se dépasser pendant cette Coupe du monde, c’est parce qu’elle était tout simplement trop forte. Mais si la plus prestigieuse compétition footballistique peut être gagnée au petit galop, c’est qu’il y a peut-être un problème avec la course.”

“Un penalty discutable a fait basculer la finale”

De l’autre côté de la mer d’Irlande, l’emballement n’est pas non plus de mise. “L’arbitrage vidéo a détruit la finale”, se morfond The Scotsman. “Les Croates sont en droit de se demander comment la VAR, un système créé pour éliminer les erreurs d’arbitrage, a pu, en moins de dix-huit minutes, se tromper de la sorte. D’abord en validant un but entaché d’une probable position de hors-jeu, et ensuite en accordant un penalty extrêmement douteux.” Le journal d’Edimbourg, s’il salue une équipe solide dotée de fabuleux (jeunes) joueurs, assure dans la foulée que ces Bleus-là “ne seront certainement pas appréciés au-delà des frontières du pays”.
Même analyse en Belgique : pour De Standaard, le quotidien de référence néerlandophone, la main d’Ivan Perisic dans la surface de réparation était “un cas limite”, et c’est ce “penalty discutable qui a fait basculer la finale”. “‘Volé’, c’est sans doute un peu fort, écrit le journal, mais en tout cas on ne peut pas dire que le titre de champion du monde de la France est vraiment mérité.”

La France n’a clairement pas donné le meilleur d’elle-même, ajoute La Libre Belgique, qui a vu des Bleus “pas emballants, cyniques”, et glisse :

Les plus caustiques diront que les Français n’ont jamais autant couru vers l’avant qu’au moment d’aller embrasser l’un des quatre buteurs de l’après-midi”.

Plus généralement, la presse belge a surtout choisi de parler d’autre chose. Fait assez rare dans le pays, les quotidiens francophones et flamands consacrent leurs unes à un même sujet : l’accueil triomphal des Diables rouges sur la Grand-Place de Bruxelles, au lendemain de leur victoire en petite finale.

“La très grande majorité des Italiens soutenait le camp adverse”

C’est d’ailleurs aussi ce que fait le journal italien Tuttosport, qui titre, pour le sixième jour consécutif, sur le transfert de Cristiano Ronaldo à la Juventus de Turin.

Bon joueur, le Corriere dello Sport salue les prouesses de Didier Deschamps, tout en précisant que le héros du jour est un sélectionneur à l’italienne”. “Nous pourrions le considérer comme l’un des nôtres, assure le journal sportif, si on garde à l’esprit les cinq saisons qu’il a passées au sein de la Juventus, en tant que joueur, et le passage de série B en série A [qu’il a accompagné en tant qu’entraîneur, lors de la saison 2006-2007]”.

Pour La Gazzetta dello Sport, c’est carrément toute la victoire qui est “à l’italienne”, puisque c’est indubitablement la carrière transalpine de Didier Deschamps qui lui a permis d’acquérir “l’art italien de la défense et de la tactique”.

Enfin, dans son éditorial, le directeur du Corriere dello Sport tâche de prendre acte.

La France est donc championne du monde pour la deuxième fois en vingt ans. Le grand rêve d’un petit pays [la Croatie] ne s’est pas réalisé. Mauvaise pioche également pour une très large majorité des Italiens – dont votre serviteur –, qui, au cours de cette finale pauvre en tactique et déterminée par les circonstances, soutenait le camp adverse.”

Mais “il faut tout de même admettre que le succès des Français est mérité”.