Environ 400 migrants vivent dans le square Daviais à Nantes. Crédit : InfoMigrants
Environ 400 migrants vivent dans le square Daviais à Nantes. Crédit : InfoMigrants

Evacués des différents squats qu’ils occupaient depuis plusieurs semaines à Nantes, des centaines de migrants se sont rassemblés dans le square Daviais, en plein centre-ville. Les conditions de vie y sont très précaires. Reportage.

"Je suis fatigué ! J’ai faim ! Ca fait six jours que je ne me suis pas lavé. C’est très dur ici", lance Mohammad qui est allongé, l’air hagard, sur une bâche à même le sol à quelques mètres de sa tente. Tout près de lui, une femme soudanaise s’occupe de ses cinq enfants en bas âge. Les bambins jouent dans le sable, se chamaillent, rigolent… faisant abstraction de leurs conditions de vie plus que précaires. La mère de famille semble dépassée. "On a fui le Soudan car mon mari a eu des problèmes avec les autorités. Je pensais que la vie serait meilleure ici", dit-elle timidement.

Autour d’eux, le sol est jonché de dizaines de détritus. Les odeurs nauséabondes prennent à la gorge. "Regardez comment on vit ! On n’est pas des animaux", s’exclame Mohammad.

400 migrants dans un square

Alors que le square Jean-Baptiste Daviais, en plein centre-ville de Nantes (à l’ouest de la France), ne comptait que trois tentes début juin, le dernier recensement de Médecins du Monde (MdM) fait état d’au moins 220 tentes, aujourd’hui. "En sachant qu’ils sont en moyenne deux à dormir dedans, on peut estimer qu’ils sont environ 400 dans ce camp", précise à InfoMigrants Mathieu Quinette, coordinateur du programme "Migration, droits et santé" de MdM à Nantes. La majorité des migrants – pour la plupart Soudanais, Erythréens et Tchadiens - disent être des demandeurs d’asile en attente de leur rendez-vous en préfecture ou à l’Ofpra.

Un migrant rempli un sceau pour nettoyer ses vêtements. Crédit : InfoMigrantsSelon une bénévole croisée au square, les migrants ont toujours été présents à Nantes, "ce n’est pas un phénomène nouveau". Cependant, ils étaient auparavant peu visibles en centre-ville. Différents militants réquisitionnaient des lieux inoccupés pour les installer dedans. Mais les multiples évacuations les ont obligés à se replier dans le square.

De plus, les évacuations parisiennes, les rumeurs selon lesquelles la procédure d’asile irait plus vite dans cette ville, et le bouche à oreille entre communautés ont accéléré les arrivées vers Nantes.

"On fait nos besoins dehors"

Au square, les conditions de vie sont plus que sommaires : les habitants n’ont pas accès à des douches et à des toilettes. "On fait nos besoins dehors, on n’a pas d’autres choix", explique Mohammad. La seule fontaine du square permet aux uns de se faire une rapide toilette et aux autres de nettoyer les quelque vêtements qu’ils possèdent.

Les migrants font sécher leurs vêtements dans le square. Crédit : InfoMigrantsPour se nourrir, les migrants peuvent compter sur des distributions opérées tous les soirs par des collectifs et de simples riverains. Mais ce n’est pas suffisant. "On ne mange pas assez. Parfois je ne mange pas pendant plus de 9h !", souffle un jeune homme qui dit avoir 16 ans.

Beaucoup reprochent aux autorités françaises de les abandonner. "Pourquoi Macron accueille des migrants venus des navires humanitaires et pas nous, alors que nous sommes déjà sur le territoire français ?", se demande Baba, un Tchadien, qui ne masque pas sa colère. La dizaine de migrants regroupés autour de lui abonde dans son sens. "On demande juste un hébergement", signale un autre homme.

"En France, nous ne devrions pas avoir à faire ça"

Ce jour de juillet, MdM est sur place pour effectuer un premier état des lieux de la situation sanitaire. La majorité des occupants n’ont pas reçu de soins depuis des semaines. Plusieurs tentes ont été déployées à l’entrée du camp regroupant des médecins, infirmiers, une pharmacie et une cellule d’orientation. "C’est scandaleux ! Nous intervenons normalement dans des États sans structures étatiques. En France, nous ne devrions pas avoir à faire ça", s’emporte Mathieu Quinette. Pour la plupart, les migrants souffrent de problèmes digestifs ou de dermatoses. Des cas de gale ont également été recensés.

"Les autorités utilisent la santé - en dépit des enjeux de santé publique - et les souffrances comme des outils de découragement et de refoulement mais ça ne marche pas. Nous sommes dans une politique de non-accueil où la dignité et les droits fondamentaux sont écartés", conclut Matthieu Quinette.

Des médecins reçoivent les migrants dans la clinique mobile de MdM. Crédit : InfoMigrants
 

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