Un match de la Coupe du monde, à Moscou, le 1er juillet 2018. Crédit : Reuters
Un match de la Coupe du monde, à Moscou, le 1er juillet 2018. Crédit : Reuters

En Russie, de nombreux migrants se sont procurés des "Fan ID", sorte de passeports sans visa pour les supporters du Mondial de football, dans l’espoir de s’installer en Russie ou de passer dans les autres pays européens. En vain.

Les passeurs et trafiquants d’êtres humains ont profité de la Coupe du monde de football organisée en Russie pour arnaquer des migrants en quête d’Europe. "Un homme nous a dit qu'avec les Fan ID nous pourrions obtenir un travail et rester ici, en Russie", raconte à l’AFP Ismaïl, un Nigérian de 21 ans. "Mais lorsque nous sommes arrivés ici, nous avons découvert que c'était une arnaque, qu'il avait juste pris notre argent et qu'il nous avait menti".

Pendant le tournoi, Moscou a en effet mis en place des "Fan ID", sésame pour les supporters étrangers venus assister au Mondial-2018. Les "Fan ID" étaient gratuits pour les supporters ayant acheté un billet pour un match mais ils ne permettaient ni de travailler en Russie, ni d'y vivre de façon permanente. Ils permettaient aux détenteurs de la carte d'accéder au territoire russe sans visa du 4 juin au 25 juillet.

Mais certains agents – passeurs ou faux agents de voyage ? - semblent les avoir vendus à des Nigérians et d’autres migrants hors du système mis en place par le gouvernement russe.

Ismaïl et son frère Sodiq font partie des arnaqués. Ils ont déboursé 250 000 nairas (600 euros) pour se procurer une "Fan ID" dans l'espoir de travailler. L'ONG Alternativa, qui lutte contre le trafic d'êtres humains, estime à environ 200 le nombre de personnes qui se sont retrouvées en difficulté à Moscou à cause de ce piège. Beaucoup sont venus sans s'intéresser à la compétition footballistique. 

Pour les frères Nigérians, Ismaïl et Sodiq, il y a aussi eu le coût des billets d'avion : plus de 800 euros chacun. "Je joue au football au Nigeria. [L'agent] m'a dit que je pourrais aussi avoir une carrière de footballeur en Russie", confie Ismaïl.

Pire encore : les vols retour de certains Nigérians prévus dans le pack "Fan ID" ont été annulés par les faux agents, afin que ces derniers en perçoivent le remboursement. À l'aéroport moscovite de Vnukovo, environ dix Nigérians dorment depuis plusieurs jours sur le sol. "On dort par terre comme des idiots. On n'a nulle part où aller", tempête Alonge Ademola, 35 ans, qui travaille dans le secteur du ciment à Lagos. "Nous voulons vraiment rentrer dans notre pays. On a pleuré, on a crié mais il n'y a toujours pas de solution." Selon des journalistes, les mêmes scènes de désarroi se déroulent à Moscou, devant l'ambassade du Nigéria.  

Le Nigeria, de son côté, a annoncé lundi 16 juillet qu’il allait rapatrier ses ressortissants bloqués. "Le président Muhammadu Buhari a ordonné [...] de commencer le processus de rapatriement des Nigérians qui se sont rendus en Russie pour la Coupe du Monde 2018 et se sont retrouvés bloqués après la compétition", a annoncé un porte-parole de la présidence, Garba Shehu.

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Passages illégaux en Pologne et en Finlande 

Des personnes - conscientes de l'opportunité de s'engager sur cette route migratoire éphémère - ont aussi tenté de passer dans d’autres pays européens. Dix-sept personnes nigérianes, marocaines, algériennes et yéménites, détenteurs des "Fan ID", ont essayé d’entrer illégalement en Pologne depuis le début du tournoi, ont annoncé les gardes-frontières. Ce mois-ci, cinq personnes sont également entrées illégalement sur le sol finlandais et ont ensuite demandé l’asile.

"Vous ne pouvez pas exclure la possibilité que certains de nos invités étrangers utilisent la Coupe du monde pour tenter d'une façon ou d'une autre, souvent illégalement, de traverser les frontières russes pour entrer dans un pays européen", a déclaré Maria Zakharova, la porte-parole du ministère des Affaires étrangères russe, lors d'une conférence de presse.

 

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