Affaire Ramadan : la version d’Henda Ayari est-elle vraiment mise à mal ?

Affaire Ramadan : la version d’Henda Ayari est-elle vraiment mise à mal ?
Henda Ayari (HANNAH ASSOULINE/EDITIONS DE L'OBSERVATOIRE)

Alors que la première plaignante de l’affaire était confrontée ce jeudi à son agresseur présumé, des révélations du "Point" contredisent sa version des faits, ce que balaie l’avocat d’Henda Ayari.

Par Cécile Deffontaines
· Publié le · Mis à jour le
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Dans l’affaire Ramadan, c’est coup pour coup. 

Ce jeudi 19 juillet, alors que la première confrontation entre Henda Ayari, première plaignante de l’affaire Ramadan, se terminait, "le Point" sortait un article mettant à mal la version de la jeune femme qui, selon lui, "s'effondre".

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En question : le jour du viol présumé.

Henda Ayari avait, initialement, établi les faits à mars-avril 2012, période imprécise, en raison des "difficultés de la mémoire" tant de temps après.

Elle était en revanche sûre que Tariq Ramadan l’avait contactée suite au changement de son profil Facebook. Ce changement ayant eu lieu entre le 23 et le 24 avril, les faits présumés ne pouvaient qu’être postérieurs.

Consciente de cette contradiction, la plaignante a cherché des éléments en sa possession, et retrouvé un agenda. Lors de son audition par les juges, le 24 mai 2018, la plaignante a invoqué une date précise : le samedi 26 mai 2012.

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"Le jour de mon mariage"

Elle a fourni cet agenda, placé sous scellés, dans lequel elle avait noté les horaires de train entre Rouen et Paris-Saint-Lazare, ainsi que le lieu du rendez-vous avec Tariq Ramadan, au Crowne Plaza, place de la République (11e arrondissement). Document dont "l'Obs" avait pu consulter la copie.

Elle disposait également du talon du chèque ayant servi à régler le billet à la SNCF.

Les juges ont procédé à des vérifications, par le biais d’une commission rogatoire.

"Le Point" en révèle une partie des conclusions : ce samedi 26 mai 2012, Henda Ayari se serait trouvée bien loin de Paris, plus précisément à Petit-Couronne, dans la banlieue de Rouen, où elle aurait assisté au mariage de son demi-frère. Le viol présumé ne peut donc avoir eu lieu à cette date-là.

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C’est ce dernier qui l’a expliqué aux enquêteurs :

Le 26 mai, 'C'était le jour de mon mariage' : "Il avait lieu à Petit-Couronne à 7 ou 8 kilomètres de Rouen [...] La fête a commencé vers 18 ou 19 heures. J'ai le souvenir que ma sœur était présente ce soir-là. Elle était avec ses trois enfants. Je ne saurais pas vous dire à quelle heure elle est partie. [...] Dans mes souvenirs, elle était présente et souriante. Il me semble qu'on la voit sur une vidéo du mariage qui est gravée sur un DVD."

Les enquêteurs disposeraient également de deux photos attestant de la présence de la quadragénaire à la fête, où elle était vêtue d’une longue robe blanche à motifs fleuris.

Ramadan a bien fait une réservation

Contacté par" l'Obs", l’avocat de la plaignante, Me Francis Szpiner, donne une toute autre lecture des conclusions de la commission rogatoire : 

"Les éléments racontés dans 'le Point' sont tronqués. En effet, les conclusions disent également que monsieur Tariq Ramadan a bien fait une réservation au Crowne Plaza le samedi 26 mai, réservation qui a par la suite été annulée. Comment Henda Ayari aurait-elle pu savoir qu’il avait fait cette réservation à cette date, si ce n’est parce qu’il lui avait donné rendez-vous ? Pour moi, c’est au contraire la preuve qu’un rendez-vous physique avec elle a bien été fixé ce jour-là !"

Une autre contradiction, concernant la météo, avait été relevée par la défense de Tariq Ramadan : dans les PV de son audition et dans son livre ("J’ai choisi d’être libre", Flammarion, 2016), Henda Ayari indiquait qu'il pleuvait fortement lors de son arrivée à Paris, le jour de son viol présumé.

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Or selon un document délivré le 31 mai 2018 par Météo France que "l'Obs" a pu consulter, il ne pleuvait pas le 26 mai 2012 dans la capitale. Les archives en ligne de Météo France indiquent également un ciel parfaitement dégagé à Paris à cette date.

Cette contradiction, si la date du viol présumé n'est plus le 26 mai, n’en est plus une.

"Démise en examen ?"

Maître Emmanuel Marsigny, l’avocat du prédicateur, espère quand même une "démise en examen" s’agissant de la plainte d’Henda Ayari. Contacté par "l'Obs", il n'a pour le moment pas donné suite.

Sur sa page Facebook, la première plaignante précisait, à l’issue de son audition, jeudi 19 juillet, vers 13 heures :

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"Revoir le visage de mon agresseur fut difficile, mais soulagée d'avoir passé cette étape de la confrontation devant les juges. Déçue, car je pensais naïvement qu'il finirait par avouer mais il persiste dans le mensonge. J'irai jusqu'au bout dans ce combat pour la justice et la vérité pour moi et pour toutes les autres femmes victimes !"

Dans les commentaires, ses partisans et ses adversaires continuent de s’affronter.

Tariq Ramadan, toujours présumé innocent et incarcéré, est visé par trois autres plaintes pour viol. Deux en France et une en Suisse. Il est mis en examen pour la plainte d’Henda Ayari et pour celle de Christelle (*).

Cécile Deffontaines

(*) Le prénom a été changé 

Cécile Deffontaines
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