Le Liban envisage de légaliser la culture du cannabis et son utilisation thérapeutique, a annoncé mercredi le président de la Chambre des députés Nabih Berry. Une proposition du cabinet de conseil international McKinsey, qui prépare une réforme de l’économie libanaise, aujourd’hui en grande difficulté, affirme le quotidien L’Orient-Le Jour.

Comme l’explique The Guardian, le Liban est le troisième pays le plus endetté du monde, avec un ratio dette/PIB de 153 %. Et la Syrie en guerre a plombé son voisin, puisque la croissance économique libanaise est passée de 9 % au début du conflit en 2011 à 2 % aujourd’hui.

Selon Raëd Khoury, ministre de l’Économie et du Commerce, la légalisation du cannabis pourrait alimenter une industrie de 1 milliard de dollars, rapporte le quotidien An-Nahar.

Une culture ancienne

Au Liban, la culture du cannabis est illégale et passible de prison. Mais comme le révèle L’Orient-Le Jour, “l’activité est largement répandue depuis des décennies, notamment dans la région déshéritée de la Bekaa (dans l’Est), où elle est devenue une industrie rapportant des millions de dollars”.

“C’est une plante âgée de 5000 ans, pourquoi ne reconnaît-on pas enfin ses vertus ?” s’interroge Talal Chreif, président du conseil municipal de Yammouné, un village célèbre pour la culture du haschich. Avant de poursuivre :

“La Bekaa a commencé à cultiver le cannabis sous l’Empire ottoman, cela s’est poursuivi sous le mandat français. Pourquoi donc ne pas légaliser cette culture une fois pour toutes ?”

Chaque année, l’armée détruit des milliers d’hectares de cannabis et les incidents sont légion. En 2012, des cultivateurs avaient même attaqué les bulldozers de l’armée à la roquette, accusant le gouvernement de les priver de leur principale source de revenu.

Bras de fer

Selon The Guardian, la majorité de la production de cannabis est contrôlée par des clans de la Bekaa intouchables. “L’argent amassé au fil des ans a fait d’eux une force à part entière – ils sont armés jusqu’aux dents et prêts à en découdre avec la police et l’armée si leur source de revenu est menacée.”

Le gouvernement libanais avait tenté d’éradiquer ces cultures dans les années 1990, sans succès. Depuis, un bras de fer oppose les agriculteurs, qui veulent légaliser cette culture ancestrale, et un gouvernement jusqu’alors frileux. Un conflit influencé par les aléas géopolitiques, comme l’explique L’Orient-Le Jour :

Depuis la crise syrienne et l’appauvrissement d’une communauté hôte déjà pauvre, l’État libanais ferme les yeux sur la culture de cannabis qui est réapparue en force dans les villages de cette région.”

D’après les chiffres de l’Office des Nations unies contre la drogue et le crime, le Liban fait partie du top 5 des producteurs de résine de cannabis dans le monde, avec l’Afghanistan, le Maroc, l’Inde et le Pakistan.

En légalisant le cannabis thérapeutique, le Liban rejoindrait une trentaine de pays, comme le Zimbabwe, le Mexique, le Portugal, l’Australie ou encore le Canada.