Hauts-de-Seine : le calvaire marocain d’une Française accusée d’adultère

Valérie*, 41 ans, a passé plus de 30 heures en garde à vue à Marrakech, après avoir passé la nuit avec un homme qu’elle ne savait pas marié. Cette habitante de Colombes raconte.

 Colombes, le 19 juillet 2017. En vacances au Maroc, une Française de 41 ans (qui brandit ici sa convocation au tribunal) a passé plus de 30 heures en garde à vue pour "complicité d’adultère". Elle dit ignorer que son ami était marié.
Colombes, le 19 juillet 2017. En vacances au Maroc, une Française de 41 ans (qui brandit ici sa convocation au tribunal) a passé plus de 30 heures en garde à vue pour "complicité d’adultère". Elle dit ignorer que son ami était marié. LP/A.L.

    Les policiers l'attendaient à la sortie du lit. Une femme de 41 ans a été interpellée, samedi 14 juillet à Marrakech (Maroc), après avoir passé la nuit dans un hôtel avec un homme… dont elle ignorait qu'il était marié.

    Interpellée pour « complicité d'adultère », cette habitante de Colombes est restée plus de 30 heures en garde à vue avant d'être libérée dimanche en fin de journée après avoir payé une caution de 5 000 dirhams (environ 450 €).

    Son compagnon, lui, a été placé en détention provisoire. Rentrée lundi en France, Valérie* devait comparaître ce lundi devant le tribunal correctionnel de Marrakech. Mais elle a décidé de ne pas honorer la convocation.

    Elle dénonce des « conditions déplorables » en garde à vue

    « Il est hors de question que j'y retourne, explique cette cadre d'une grande entreprise. Mes droits ont été bafoués, j'ai été abandonnée pendant deux jours dans des conditions déplorables, dans un couloir étroit au milieu des cafards, de femmes enceintes battues… Avec un procureur odieux qui m'a hurlé dessus. »

    Celle qui s'est vue prescrire un arrêt maladie d'une semaine se dit « traumatisée ». Si elle savait l'adultère interdit au Maroc, elle assure qu'elle « ignorait » que son ami était marié. « Il m'a dit qu'il était divorcé, assure-t-elle. En fait, j'ai appris ensuite qu'il n'était qu'en procédure et que le divorce devait être prononcé en septembre. »

    Mais ce qu'elle dénonce surtout, c'est le peu de soutien qu'elle a obtenu du consulat de France. « Personne ne m'a aidée ! s'étrangle-t-elle. J'ai demandé un traducteur, je n'ai rien eu. J'ai demandé un avocat. La personne de permanence m'a seulement dit d'aller chercher sur Internet la liste des avocats francophones au Maroc… Mais je n'avais plus de téléphone en garde à vue ! »

    De son côté, le ministère des Affaires étrangères indique que le consulat, « aussitôt prévenu de la détention de notre compatriote », a pu lui téléphoner et « transmettre ses conseils dans le cadre de la protection consulaire. » Il indique toutefois que « la législation locale n'autorise pas le personnel consulaire à rencontrer une personne en garde à vue. »

    « Dans ce genre de cas, qui est loin d'être isolé, on précise aux gens quels sont leurs droits », souffle une source diplomatique qui rappelle à ceux qui voyagent à l'étranger que le site du ministère recense, pour chaque pays, « les spécificités de la loi locale. »

    « Les mentalités évoluent au Maroc »

    Que risque Valérie si elle refuse de se présenter au tribunal? « Sa caution ne lui sera pas rendue et elle sera jugée en son absence », explique Khadija Arrach, avocate au barreau de Rabat.

    Elle assure que ce type d'affaires n'aboutit pas toujours à une peine de prison. « Elle peut être condamnée à du sursis ou à une amende, cela dépend du dossier et des circonstances. Avec une bonne plaidoirie, j'ai encore obtenu aujourd'hui une relaxe dans une affaire d'adultère en flagrant délit », insiste-t-elle.

    L'avocate assure que « les mentalités évoluent au Maroc » sur ce sujet : « Il y a eu beaucoup de polémiques. Beaucoup de voix se sont élevées pour dire que l'on peut faire l'usage que l'on veut de son corps. »

    De son côté, Valérie a tenu à écrire à la présidence de la République pour raconter son cauchemar. « Il faut que les gens sachent que les vacances à Marrakech, ce n'est pas toujours tout beau, tout rose, souffle-t-elle. Et que lorsque il y a un problème, personne n'est là pour vous soutenir. »

    *Le prénom a été changé.