Le Français Christian Darrosé a entrepris de sensibiliser la population canadienne aux signes d'accidents vasculaires cérébraux (AVC) en traversant le pays d'un océan à l'autre en deux mois et demi, au volant de sa Citroën d'époque.

Sa « Mamie Blue », une Citroën Trèfle de 1923, est son meilleur atout. De passage à Montréal, hier, Christian Darrosé a convenu que sa voiture, jolie et intrigante, lui permettait d'atteindre un plus large public. « Elle attire le regard, les gens nous approchent et je leur parle de l'AVC, raconte le cinquantenaire, de son accent chantant du sud de la France. Si je l'avais fait avec une voiture populaire moderne, j'aurais fait le tour du pays et personne ne m'aurait vu. »

Au Bureau d'accueil touristique du Vieux-Port, hier, la voiture d'un bleu soutenu lustré a en effet capté l'attention des passants. Comme dans toutes les villes où il s'est arrêté, M. Darrosé a profité du rassemblement pour parler de l'AVC. Sur place, des représentants de la Fondation des maladies du coeur et de l'AVC se sont joints à la campagne montréalaise de M. Darrosé. 

« La voiture est un bon moyen de lancer la conversation. [...] Nous sommes très reconnaissants à M. Darrosé de ce qu'il fait », dit Melda Saeedi, coordonnatrice de programme à la Fondation des maladies du coeur et de l'AVC

Christian Darrosé, ancien artisan contrôleur technique automobile, tente de sensibiliser la population à cette affection qui constitue la deuxième cause de décès dans le monde. M. Darrosé en sait quelque chose, lui qui a perdu sa mère, dans les années 70, et son frère, il y a quatre ans, à la suite d'AVC. Son histoire, il la raconte à tous ceux qu'il croise et tente de faire comprendre l'importance de connaître les signes annonciateurs.

« Il faut tout le temps se répéter, c'est du travail de longue haleine pour que ça rentre dans la tête des gens », dit-il. Le sourire qui s'affaisse, les difficultés d'élocution, les membres difficiles à lever, la perte d'équilibre... à l'apparition de ces signes, il faut tout de suite contacter les urgences, explique-t-il. La lutte contre l'AVC est dans une large mesure une question de prévention, ajoute Melda Saeedi.

Au Canada, 15 % des personnes victimes d'accidents vasculaires cérébraux en meurent et seulement 10 % récupèrent entièrement. Les autres s'en sortent avec une invalidité liée à un déficit neurologique parfois légère, souvent importante, quelquefois très sévère.

EMBARQUER LA CAUSE À TRAVERS LE CANADA

D'après Melda Saeedi, « 29 % des adultes aux Québec ne sauraient pas reconnaître les signes de l'AVC » et un nombre plus grand encore ne savent pas que les femmes sont les plus touchées. La Fondation fait d'ailleurs campagne pour sensibiliser les Canadiens, mais aussi les chercheurs et le gouvernement, afin qu'ils accordent une place accrue aux femmes dans les recherches pour lutter contre les accidents vasculaires cérébraux.

En décembre 2016, Christian Darrosé a lancé son association pour contrer cette méconnaissance du phénomène, d'abord en France. Passionné de voitures, il rêvait de traverser le Canada avec une automobile ancienne. 

« La cause me tient à coeur, alors je me suis dit que j'allais l'embarquer avec moi, en parler le plus possible au long de mon voyage et sensibiliser le plus de Canadiennes et Canadiens possible. »

L'année suivante, il a emmené « Mamie Blue » faire une première tournée dans les Landes, département en France d'où il est originaire. Parti de Vancouver le 8 juin dernier, il s'est cette fois lancé dans une épopée d'une tout autre envergure. Son périple se conclura le 24 août à St. John's, à Terre-Neuve, après des arrêts dans dix provinces et 68 villes au total, dont Calgary, Regina, Ottawa et Québec.

La Trèfle bleue, dont la vitesse ne dépasse pas les 60 km/h, pose un défi mécanique de taille pour une traversée de 8000 km. « Elle a 95 ans, elle date du début de l'automobile », indique Christian Darrosé. Mais jusqu'à maintenant, « le véhicule se porte très bien, et le pilote aussi », ajoute-t-il. M. Darrosé, à plus d'un mois de son arrivée à Terre-Neuve, pense déjà à sa prochaine tournée, qu'il « jouera à domicile », cette fois.

L'an prochain, il mènera sa campagne de sensibilisation auprès des élèves des collèges français, afin de leur parler des comportements induisant des risques d'AVC. « Parfois, quand c'est dit par les parents, on ne les écoute pas, mais quand ça vient d'une association, ça peut faire réfléchir certaines personnes », pense-t-il, espérant en convaincre certains de corriger leurs habitudes de vie.