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Les personnages-clés à connaître pour comprendre l’affaire Benalla

De l’Elysée au ministère de l’intérieur en passant par les différents services de la police, Les Décodeurs passent en revue les différents protagonistes.

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Publié le 24 juillet 2018 à 18h26, modifié le 19 septembre 2018 à 08h59

Ce que l’on appelle désormais « l’affaire Benalla » ne se limite pas aux violences commises par un collaborateur d’Emmanuel Macron sur des manifestants le 1er mai. Depuis les premières révélations du Monde le 18 juillet, c’est en réalité le fonctionnement de pans entiers de l’Elysée et de la police qui sont mis en cause.

Comment un employé de l’Elysée a-t-il pu apparaître avec un brassard de police alors qu’il était censé se cantonner à un rôle de simple « observateur » ? Pourquoi a-t-il écopé d’une simple suspension de quinze jours lorsqu’il a été identifié sur des vidéos en train de brutaliser deux manifestants ? Dans quelles conditions a-t-il récupéré des images de vidéosurveillance de la scène auprès de fonctionnaires de la préfecture de police de Paris 18 juillet ?

Autant de questions qui traversent l’enquête judiciaire, mais aussi celle de la « police des polices » (IGPN) et les travaux des commissions d’enquête de l’Assemblée nationale et du Sénat.

Pour mieux comprendre les rouages de cette affaire, Les Décodeurs retracent les profils des différents acteurs du dossier. Parmi eux, cinq personnes, dont Alexandre Benalla, ont été mises en examen dimanche 22 juillet.

Au ministère de l'intérieur

Gérard Collomb

Ministre de l'intérieur

Numéro deux du gouvernement d'Edouard Philippe, il est responsable de la sécurité du territoire, et donc de la police.

Il a expliqué, au cours de son audition à l'Assemblée nationale, avoir été informé des violences d'Alexandre Benalla par l'Elysée, le 2 mai. Il a également affirmé qu'il ne connaissait pas personnellement M. Benalla et qu'il pensait que ce dernier « faisait partie des services de police ».

Il a saisi l'IGPN, la « police des polices », le 19 juillet, au lendemain des révélations du Monde. Selon lui, « de nouveaux éléments et de nouvelles images où M. Benalla est doté d'une radio et porte un brassard siglé police justifia[ie]nt la saisine de l'IGPN ».

Stéphane Fratacci

Directeur de cabinet de Gérard Collomb

Il est le bras droit de Gérard Collomb au ministère de l'intérieur. Selon l'audition de M. Collomb, il a été mis au courant de l'existence de la vidéo d'Alexandre Benalla le 2 mai par le chef du cabinet, Jean-Marie Girier, avant d'en informer le ministre de l'intérieur. Ce dernier a également affirmé que c'est M. Fratacci qui lui avait indiqué que l'Elysée allait sanctionner le chargé de mission. « J'ai considéré que les faits signalés étaient pris en compte au niveau adapté », a expliqué M. Collomb, renvoyant les critiques vers son directeur de cabinet et, surtout, l'Elysée.

C'est également à son directeur de cabinet que Gérard Collomb a demandé de saisir l'inspection générale de la police nationale (IGPN) le 19 juillet.

Stéphane Fratacci, qui ne s'est pas exprimé publiquement sur ce dossier pour l'heure, doit être auditionné jeudi 24 juillet à 21 heures par la commission d'enquête de l'Assemblée nationale.

Jean-Marie Girier

Chef de cabinet de Gérard Collomb

Ce proche collaborateur de Gérard Collomb au ministère de l'intérieur connaissait bien Alexandre Benalla. Il a même validé son embauche dans l'équipe de campagne d'Emmanuel Macron, en 2017.

Selon l'audition de M. Collomb, il est le premier membre du cabinet à être mis au courant de l'existence de la vidéo d'Alexandre Benalla, le 2 mai. Prévenu par Vincent Caure, chargé des réseaux sociaux à l'Elysée, il aurait ensuite transmis l'information au directeur de cabinet, Stéphane Fratacci.

A la préfecture de police de Paris

Michel Delpuech

Préfet de police de Paris

C'est sous son autorité que la préfecture de police de Paris assure le maintien de l'ordre lors des manifestations comme celles du 1er-Mai.

Auditionné à l'Assemblée nationale le 23 juillet, le haut fonctionnaire a assuré ne pas avoir été mis au courant de la venue d'Alexandre Benalla et de Vincent Crase sur le terrain le 1er mai. Selon lui, c'est son subordonné Laurent Simonin qui a accordé l'autorisation, sans le prévenir — bien qu'il concède par ailleurs qu'il n'y aurait eu aucune raison de la refuser à ses yeux.

Par ailleurs, M. Delpuech n'a pas pu expliquer comment M. Benalla avait pu être équipé d'un brassard de police et d'une radio le 1er Mai. Il a en revanche assumé « personnellement » la décision de délivrer un port d'armes à l'intéressé le 13 octobre 2017.

Alain Gibelin

Directeur de l’ordre public et de la circulation (DOPC) à la préfecture de police de Paris

Ce haut fonctionnaire est notamment chargé des opérations de maintien de l'ordre lors de grandes manifestations.

Auditionné par les députés lundi 23 juillet, il a affirmé que M. Benalla « ne bénéficiait d'aucune autorisation de la préfecture de police » pour se rendre à la manifestation place de la Contrescarpe. Selon lui, c'est Laurent Simonin, contrôleur général à la direction de l'ordre public et de la circulation, qui a accepté qu'Alexandre Benalla soit présent en tant qu'observateur, en dehors de la procédure habituelle.

Laurent Simonin

Contrôleur général à la direction de l’ordre public et de la circulation (DOPC) à la préfecture de police de Paris

Mis en examen

Ce chef d'Etat major adjoint est l'un des trois membres de la préfecture de police de Paris suspendus puis mis en examen dans l'affaire pour « détournement d'images issues d'une vidéoprotection » et « violation du secret professionnel ». Il a été mis en cause par sa hiérarchie à la préfecture de police lors des auditions à l'Assemblée nationale.

Il lui est d'abord reproché d'avoir autorisé la présence de M. Benalla comme observateur le 1er mai, sans en référer à sa hiérarchie et hors du cadre réglementaire. Soupçonné de lui avoir fourni son propre casque pour la manifestation, il est également poursuivi pour « complicité de port illégal d'insigne ». Enfin, c'est lui qui aurait contacté M. Benalla pour lui proposer de lui communiquer les images de vidéosurveillance extraites par le commissaire Maxence Creusat, le soir du 18 juillet, après la publication des premières révélations du Monde. Laurent Simonin ne s'est pas exprimé publiquement sur le sujet pour l'heure.

Maxence Creusat

Commissaire à la direction de l’ordre public et de la circulation (DOPC)

Présent sur la place de la Contrescarpe Mis en examen

Ce jeune commissaire était chargé du maintien de l'ordre place de la Contrescarpe, dans le 5e arrondissement de Paris, où Alexandre Benalla a violenté les deux manifestants le 1er mai. Au moment des violences commises, Maxence Creusat se tenait à quelques mètres du collaborateur de l'Elysée, mais il n'aurait rien vu, occupé avec les CRS qu'il commandait.

Selon l'audition d'Alain Gibelin, c'est lui qui s'est rendu auprès des services de vidéosurveillance de la préfecture, le soir du 18 juillet, pour vérifier la présence d'une vidéo des événements du 1er mai, qui a par la suite été transmise illégalement à Alexandre Benalla.

Il est venu se dénoncer le lendemain auprès d'Alain Gibelin, « le visage défait », en lui expliquant qu'il avait fait « une grosse connerie ».

Il a été suspendu dans la foulée, et mis en examen avec deux autres policiers pour « détournement d'images issues d'une vidéoprotection » et « violation du secret professionnel ».

Selon un message publié par son avocat, Thibault de Montbrial, sur Twitter, M. Creusat « n'entend esquiver aucune question, et notamment celle, essentielle pour comprendre ce dossier, de la proximité manifeste aux yeux du jeune commissaire qu'il est, entre la plus haute hiérarchie policière et M. Benalla ».

Jean-Yves Hunault

Commandant chargé de la liaison entre la préfecture de police et l’Elysée

Mis en examen

Il fait partie des trois fonctionnaires de la préfecture de police de Paris suspendus dès le jeudi 19 juillet, suspectés d'avoir transmis des extraits de vidéosurveillance à M. Benalla après la publication de l'enquête du Monde le 18 juillet. Tous trois ont été mis en examen dimanche 22 juillet pour « détournement d'images issues d'une vidéoprotection » et « violation du secret professionnel ».

M. Hunault ne s'est pas exprimé publiquement sur l'affaire pour l'heure.

Philippe Mizerski

Major à la direction de l’ordre public et de la circulation (DPOC)

Présent sur la place de la Contrescarpe

C'est lui qui devait encadrer Alexandre Benalla tout au long de son « observation » le 1er mai. Les vidéos montrent qu'il ne s'est jamais interposé quand MM. Benalla et Crase s'en sont pris physiquement à deux manifestants, place de la Contrescarpe.

Interpellé à plusieurs reprises sur ce point lors de son audition par les députés lundi 23 juillet, le ministre de l'intérieur, Gérard Collomb, a refusé de commenter le rôle de ce fonctionnaire le 1er mai : « Je n'avais jamais entendu parler de M. Mizerski », a assuré le ministre.

M. Mizerski ne s'est pas exprimé publiquement sur le sujet pour l'heure.

A l'Elysée

Emmanuel Macron

Président de la République

Le président était en déplacement en Australie au moment des faits. Son directeur de cabinet Patrick Strzoda a néanmoins expliqué au Monde l'en avoir informé, le 2 mai. Le chef de l'Etat lui aurait alors répondu : « Si les faits sont avérés, il faut prendre des sanctions » contre Alexandre Benalla, qui figure alors parmi son premier cercle de fidèles.

Mais il est aujourd'hui mis en cause par tous ceux qui estiment que les sanctions à l'encontre du conseiller n'ont pas été à la mesure des faits.

Emmanuel Macron est sorti de son silence le mardi 24 juillet, en affirmant être « le seul responsable » de l’affaire. Il a qualifié le comportement de M. Benalla de « déception » et de « trahison », tout en critiquant le travail de la presse, qui ne « cherche plus la vérité ».

Alexis Kohler

Secrétaire général de l'Elysée

Il s'agit du collaborateur le plus proche d'Emmanuel Macron à l'Elysée. C'est lui qui aurait informé le premier le président, alors en déplacement en Australie, de l'existence de la vidéo d'Alexandre Benalla. Lui aussi qui a validé sa mise à pied pour quinze jours. Lui encore qui a été chargé par Emmanuel Macron, le 22 juillet, de proposer une réorganisation du cabinet « pour éviter qu'un tel dysfonctionnement se reproduise ».

Il doit s'exprimer publiquement pour la première fois le jeudi 26 juillet, lors de son audition devant le Sénat.

Patrick Strzoda

Directeur de cabinet d'Emmanuel Macron

Ses fonctions lui donnent autorité sur Alexandre Benalla. C'est ainsi lui qui lui accorde, le 29 avril, l'autorisation de participer « en tant qu'observateur » à une intervention le 1er mai auprès de la préfecture de police.

Interrogé par Le Monde au début de l'affaire, il a déclaré avoir été informé dès le 2 mai de l'existence des images des violences impliquant son subordonné place de la Contrescarpe à Paris. Il affirme avoir rapidement prévenu Emmanuel Macron et convoqué M. Benalla.

Il est également l'auteur du courrier daté du 3 mai annonçant au conseiller sa sanction : une mise à pied du 4 au 19 mai, avec suspension de salaire et un changement d'affectation.

M. Strzoda a été auditionné par les députés mardi 24 juillet pour détailler sa version des faits. Il a expliqué ne pas avoir saisi la justice parce qu’il n’avait « pas assez d’éléments » pour le faire. Il a ajouté avoir pris la décision de mettre à pied M. Benalla pendant deux semaines « seul, en [s]on âme et conscience ».

François-Xavier Lauch

Chef de cabinet d'Emmanuel Macron

Il était le supérieur hiérarchique direct d'Alexandre Benalla à l'Elysée.

Il ne s'est pas exprimé sur l'affaire pour l'heure.

Laurent Hottiaux

Conseiller « intérieur et justice » d'Emmanuel Macron

Il est le conseiller intérieur et sécurité du président de la République à l'Elysée. Son nom n'avait pas été évoqué dans cette affaire avant l'audition de Michel Delpuech, le préfet de Paris, à l'Assemblée nationale, lundi 23 juillet. Devant les députés, le préfet a affirmé que c'est par un appel de M. Hottiaux le 2 mai, vers 10 h 15, qu'il a pris connaissance de « l'existence de l'affaire Benalla ».

Laurent Hottiaux ne s'est pas exprimé publiquement sur la question pour l'heure.

Vincent Caure

Conseiller « réseaux sociaux » d'Emmanuel Macron

Ce collaborateur d'Emmanuel Macron aurait été le premier à repérer la vidéo d'Alexandre Benalla sur les réseaux sociaux, le 2 mai. C'est lui qui en a informé Gérard Collomb, par le biais de son directeur de cabinet, Jean-Marie Girier.

Il ne s'est pas exprimé publiquement sur l'affaire.

Alexandre Benalla

Adjoint au chef de cabinet du président de la République, chargé de la sécurité

Présent sur la place de la Contrescarpe Mis en examen

Ce collaborateur d'Emmanuel Macron était responsable de la sécurité du président au moment des faits. Invité à observer à l'intervention des forces de l'ordre lors des manifestations du 1er mai à Paris, il a été filmé place de la Contrescarpe, en train de violenter une jeune femme et de molester un homme, déjà à terre, entouré par des CRS. Il est soupçonné d'avoir largement outrepassé son rôle d'observateur en portant un casque et un brassard de police, ainsi qu'une radio.

Ces actions ont d'abord valu à Alexandre Benalla une mise à pied de quinze jours et une rétrogradation. Mais à la suite de la révélation de son identité par Le Monde, le 18 juillet, il a été placé en garde à vue et mis en examen pour « violences en réunion » et « immixtion dans l'exercice d'une fonction publique ». L'Elysée a également annoncé son licenciement.

M. Benalla a fait savoir par ses avocats qu'il avait voulu « prêter main-forte » aux policiers pour maîtriser « deux individus particulièrement virulents » et pallier « l'apparent dépassement des capacités opérationnelles des policiers sur place ». Il assure que son « action vigoureuse mais menée sans violence n'a causé aucune blessure ».

A la République en marche (LRM)

Christophe Castaner

Délégué général de la République en marche

En tant que patron du parti présidentiel, il est le supérieur hiérarchique de Vincent Crase. Après la révélation de l'affaire, il a déclaré : « Je me suis entretenu avec lui, il ne comprend pas son geste. Il a présenté ses excuses mais ça ne suffit pas. » M. Castaner a expliqué ne pas avoir les éléments pour le licencier : « Ma condamnation morale ne suffit pas », a-t-il admis, ajoutant qu'en cas de condamnation judiciaire, la donne pourrait changer.

Vincent Crase

Salarié de la République en marche

Présent sur la place de la Contrescarpe Mis en examen

Ce gendarme réserviste s'occupe de la sécurité au sein du parti présidentiel La République en marche (LRM). Son patron Christophe Castaner le décrit comme un « agent d'accueil ». Il a également été mobilisé « très ponctuellement » par le commandement militaire de l'Elysée pour des missions de sécurité.

Il est un proche d'Alexandre Benalla : il a d'abord été son supérieur lors d'une formation, avant de devenir son collaborateur durant la campagne présidentielle. Ils ont même créé ensemble une éphémère Fédération française de la sécurité privée.

Le 1er mai, sur la place de la Contrescarpe, il était au côté de M. Benalla, en tant qu'observateur. Il a toutefois participé lui aussi à l'intervention musclée contre les manifestants, et portait une arme à sa ceinture, alors que la préfecture de police ne lui en avait pas donné l'autorisation.

L'Elysée a annoncé avoir mis fin à toute collaboration avec lui, mais il reste salarié de LRM. Il a été mis en examen pour « violences en réunion par personne chargée d'une mission de service public », « immixtion dans l'exercice d'une fonction publique » et « port prohibé » d'une arme à feu. Il ne s'est pas exprimé publiquement sur l'affaire.

Images : Jean-Claude Coutasse/French Politics et Laurence Geai pour Le Monde · AP · AFP · Reuters · BFMTV · Twitter · M6 · Bestimage · Taranis · Claude Truong-Ngoc.

Erratum : une version antérieure de cet article contenait une photo associée par erreur à Laurent Simonin. Elle a été supprimée.

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