Les FEMEN : retour sur l'histoire du mouvement et son apport

Action des FEMEN le 24 juin 2012 au stade olympique de Kiev contre la prostitution pendant l'Euro de football. A dte : Oksana Shachko, cofondatrice du mouvement. ©AFP - Sergei SUPINSKY
Action des FEMEN le 24 juin 2012 au stade olympique de Kiev contre la prostitution pendant l'Euro de football. A dte : Oksana Shachko, cofondatrice du mouvement. ©AFP - Sergei SUPINSKY
Action des FEMEN le 24 juin 2012 au stade olympique de Kiev contre la prostitution pendant l'Euro de football. A dte : Oksana Shachko, cofondatrice du mouvement. ©AFP - Sergei SUPINSKY
Publicité

Les FEMEN sont un groupe féministe d'origine ukrainienne fondé à Kiev en 2008 par Anna Hutsol, Oksana Chatchko et Sacha Shevchenko. Le journaliste photo reporter Olivier Goujon vient d'écrire un livre à leur sujet. Il nous en parle.

Avec
  • Olivier Goujon Journaliste, photo reporter

Olivier Goujon est l'auteur de "FEMEN : histoire d’une trahison", aux éditions Max Milo. Celui qui fut le premier à réaliser des sujets sur ce mouvement féministe en Ukraine, en 2009, a voulu à propos de ce mouvement :

1) Dire sa genèse                                                           
2) Etablir son apport historique                                                          
3) Raconter l’histoire factuelle, la vraie, parce que cela n’avait jamais été fait.

Publicité

1/ La genèse du mouvement "renvoie au contexte historique en Ukraine à ce moment-là. Le contexte c’est l’histoire récente, la chute du mur de Berlin, l’abolition des droits de douane, l’invasion du pays par l’économie de marché, toute l’injustice qui en découle. En fait, c’est la douloureuse confrontation de l’Ukraine post-communiste avec les valeurs occidentales du libéralisme. L’un des premiers résultats de cela est une explosion de l’industrie du sexe. Evidemment, en face, les Ukrainiennes sont complètement démunies. Elles gagnent 100 à 300 euros par mois, elles n’ont aucune chance face à ces prédateurs. C’est ça le moteur de la révolte des FEMEN. Cela et évidemment le refus de la domination ancestrale du patriarcat qui lui, au moins pour ce qui concerne le patriarcat urbain, bourgeois, va trouver un intérêt au développement du tourisme sexuel."

Et "en Ukraine, c'est un mouvement horizontal et égalitaire. Un mouvement communiste, noble, qui renvoie à une communion de pensée, d'actions, à un partage des risques et des ressources. En France, cela devient un mouvement vertical, avec une figure de chef, idolâtrée, Inna Shevchenko. Plus ou moins hypocritement d'ailleurs, parce que tout autour d'elle il y a une cour et tout le monde est assez ambigu, avec un rapport à la fois de séduction et de crainte."

2/ Son apport historique "est à la fois tangible et impalpable, en tous cas pas vain. Il y a toujours cette idée spécieuse qu’elles n’auraient pas laissé leur nom à un projet de loi ou que sais-je. On dit toujours que finalement les FEMEN n’ont rien apporté ou qu’elles ont bougé de l’air. Je dis que c’est spécieux car si on avait posé cette question à Emmeline Pankhurst, par exemple, en 1917, eh bien on était dans la même situation. Pourtant, l’année d’après, les femmes avaient le droit de vote et c’était le couronnement de 80 ans de combat des suffragettes. Le féminisme est un humanisme et les conquêtes de l’humanisme se mesurent sur la durée. Leur impact sur les consciences est diffus, progressif et lent. On ne peut pas dire que les FEMEN ont construit cela comme on construit une maison des idées ou un palais de la femme ou que sais-je. Ce qui est certain, c’est que dans l’histoire du féminisme il y aura avant et après FEMEN. Ça c’est indéniable. Elles ont en réalité changé la face du féminisme. Aujourd’hui, même l’Ukraine, le pays, communique sur l’image de FEMEN. C’est un argument de vente dans la pub, dans l’art, dans le commerce. Si on prend par exemple comme mode d’action le surgissement, le topless, c’est révolutionnaire comme mode d’action. J’explique pourquoi dans le livre. Mais inconsciemment le patriarcat est déstabilisé par le surgissement des FEMEN. Cela ne tient pas seulement au fait qu’elles ont les seins nus, c’est aussi que le surgissement c’est masculin. Ce sont les hommes qui surgissent. Ce sont des chasseurs, des guerriers … c’est masculin le surgissement. Là ce sont des femmes surgissantes et ce n’est pas commun. C’est déstabilisant pour le patriarcat."

3/ Quant à l'histoire factuelle, du point de vue d'Olivier Goujon : "On me dit souvent avec malice ou avec mauvaise fois qu’au fond c’est une petite histoire, un conflit interne, une guéguerre de blondes. On ne me le dit pas souvent, mais il est arrivé qu’on m’oppose cet argument-là. D’abord, il faut m’expliquer ce qu’est une histoire importante aux vues de la hiérarchie de l’information en France aujourd’hui. Est-ce que ce sont les pandas de Brigitte Macron ou les transferts au PSG ?    

Moi, je parle de rétablir dans leur vérité, dans leur honneur, deux femmes maltraitées et trahies qui ont donné naissance à un mouvement devenu planétaire en quelques mois (Oksana Chatchko et Sacha Shevchenko). Ce n’est pas rien. Elles ont ouvert (avec Anna Hutsol) un horizon nouveau dans le combat du féminisme et donc on ne peut pas réduire cela à une guerre de personnes, à une querelle simplement pour le pouvoir à l’intérieur de FEMEN.       

Charles Péguy, je crois, disait « Qui ne gueule pas une vérité quand il la sait est du côté des menteurs ».  Voilà, j’ai voulu raconter la véritable histoire et ne pas être du côté des menteurs."

A voir, en complément :

Pour afficher ce contenu Youtube, vous devez accepter les cookies Publicité.

Ces cookies permettent à nos partenaires de vous proposer des publicités et des contenus personnalisés en fonction de votre navigation, de votre profil et de vos centres d'intérêt.

La Grande table (1ère partie)
27 min

L'équipe