Macron rêve d’une Europe «sensuelle»

Le chef de l’État est allé plaider pour une UE plus « caliente » et moins bureaucratique, auprès de ses alliés à Madrid et Lisbonne. Un peu de chaleur et de hauteur en pleine tourmente Benalla.

 Emmanuel Macron a été chaleureusement accueilli à Lisbonne, ce vendredi, par le Premier ministre du Portugal, Antonio Costa (à droite), et les gens venus à leur rencontre.
Emmanuel Macron a été chaleureusement accueilli à Lisbonne, ce vendredi, par le Premier ministre du Portugal, Antonio Costa (à droite), et les gens venus à leur rencontre. EPA/MAXPPP/Antonio Pedro Santos

    Un petit bol d'air ibérique. Loin du fracas de l'affaire Benalla qui agite encore l'hexagone, Emmanuel Macron s'est offert une parenthèse bienvenue de deux jours à Madrid et Lisbonne, aux côtés de deux de ses plus proches partenaires européens, le nouveau Premier ministre espagnol Pedro Sanchez et son homologue portugais Antonio Costa.

    Poignées de main, conférences de presse, dîner officiel avec le roi d'Espagne… pour ce premier déplacement à l'étranger depuis l'éclatement du scandale, tout a été fait pour montrer qu'Emmanuel Macron est au travail - « rien ne me troublera », a-t-il martelé jeudi soir - et que rien ne peut perturber son agenda. Manifestement, il n'a pas été déçu du voyage.

    « Laissons tomber les polémiques artificielles et intéressons-nous aux vrais problèmes des citoyens », lance, à ses côtés, son homologue espagnol à la presse jeudi soir. Lui aussi touché par une affaire de politique intérieure - un avion gouvernemental emprunté pour se rendre à un concert de rock -, Sanchez fait front commun avec le chef de l'État. Alliés sur la crise migratoire comme sur la réforme de la zone euro : la mise en scène du tandem de réformateurs en Europe aux prises avec leurs tempêtes respective ne manquait pas de sel…

    Macron à l'aise

    Tout aussi agréable pour Emmanuel Macron et sans aucun accroc fut sa première « consultation citoyenne » organisée dans la capitale portugaise. Dans le grand auditorium de la fondation Gulbenkian, Emmanuel Macron retrouve le dispositif qu'il affectionne. Un jeu de questions-réponses sur l'avenir de l'Europe qui se veut sans détour.

    Dans la salle aux deux tiers pleine, des étudiants, et surtout beaucoup d'expatriés Français à Lisbonne, l'interrogent poliment sur la gouvernance de l'Europe ou le couple franco-allemand. Un exercice sans risque pour le chef de l'État. Pas une question sur l'affaire Benalla ne lui sera posée.

    Emmanuel Macron ne boude pas son plaisir. Et se laisse même aller à caresser l'idée d'une « Europe sensuelle », faite d'échanges universitaires et d'expérience de vie commune dans les différents pays. « L'Europe doit redevenir un objet politique chaud lance-t-il, il nous faut une Europe sensible et pas seulement des règles. On a créé une Europe un peu bureaucratique, il faut bien le dire. »

    Un public déjà convaincu

    Face à ce public courtois et déjà convaincu, Macron approfondit son idée d'une Europe à trois cercles et à plusieurs vitesses (la France occupant le « cœur du réacteur »), et en profite pour poser les jalons de la future campagne des Européennes 2019.

    « Les mois qui sont devant nous sont essentiels prévient-il, ils préparent des élections décisives. Soit nous arrivons à refonder l'Europe, soit nous décidons son délitement. Ce grand clivage, c'est un débat entre les nationalistes, ceux qui sont pour la fracture européenne et les progressistes européens. »

    Jamais mis en difficulté, le président a pu dérouler ses fondamentaux du discours fondateur de la Sorbonne en septembre 2017. Pour sa première « consultation citoyenne » hors de France, son hôte portugais, proeuropéen et francophile, avait bien fait les choses.