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Il y a 360 millions d’années, les premières plantes dotées de troncs en bois ont développé un mécanisme de défense semblable à celui des arbres actuels.
Dans des cellules spécialisées, les stathocytes, de petits grains appelés statolithes s’accumulent vers le bas, conférant à la plante le sens de la verticalité. Un phénomène qui se précise, notament pour les petites inclinaisons.
Aussi bien les épis de blé dans un champ que les arbres dans la forêt poussent à la verticale ou presque. Comment les plantes discernent-elles cette direction qui leur confère une meilleure exposition à la lumière du soleil ? La réponse se trouve dans les statocytes. Situées dans les zones d’élongation des végétaux, ces cellules spécialisées sont responsables de la perception de la gravité par les plantes, essentielle pour la croissance vers « le haut » des tiges et « le bas » des racines. Ces statocytes contiennent eux mêmes des statolithes, des petits grains riches en amidon plus denses que le milieu cellulaire, qui s’accumulent dans la partie la plus basse de la cellule, créant l’asymétrie nécessaire à la perception de la verticalité. À peine l’orientation de la plante change-t-elle de quelques degrés que les statolithes se déplacent et influent sur la production d’hormones de croissance qui rectifient la direction de l’élongation.
Cependant, la compréhension du phénomène reste superficielle. Antoine Bérut et ses collègues, de l’université d’Aix-Marseille et de Clermont-Ferrand, ont précisé le modèle de comportement des statolithes.
La comparaison des statolithes avec des grains de sable qui s’écoulent et roulent les uns sur les autres dans des avalanches est efficiente pour décrire leur déplacement lorsque les cellules végétales sont inclinées selon de grands angles (90° par exemple), mais insuffisante pour les inclinaisons faibles. En effet, l’étude des écoulements granulaires montre qu’en deçà d’un certain angle d’inclinaison, compris entre 5 et 30° suivant les situations et les matériaux, il n’est pas observé d’avalanche, donc de déplacement des grains. La dynamique des statolithes est donc différente d’un écoulement granulaire pour être sensible à de petites inclinaisons.
Antoine Bérut et ses collègues proposent un modèle différent pour expliquer le comportement de ces petits grains: grâce à l’agitation qui les anime, ils s’écoulent comme un liquide dans le fond des statocytes, induisant une détection de l’inclinaison sans angle minimum. Les chercheurs ont tout d’abord filmé des statocytes in vivo afin d’en étudier la dynamique. Même avec une faible inclinaison, de l’ordre de 10 degrés d'angle, inférieur en principe à l’angle d’avalanche dans un tel milieu, les statolithes s’écoulent et s’empilent pour former une surface horizontale en quelques minutes. D'après les chercheurs, cet écoulement liquide et non granulaire est rendu possible par l’importante agitation des statolithes dans le milieu cellulaire.
Afin de vérifier cette hypothèse, ils ont reproduit un système de cellules artificielles contenant de l’eau et des particules de silice. Dans ce modèle, l’agitation des statolithes artificiels est assurée par le simple mouvement brownien, d’autant plus important que les particules sont petites. Celles de 4,4 micromètres, peu agitées, s’écoulent comme les milieux granulaires. Celles de 2 micromètres, plus agitées, miment fidèlement le comportement des statolithes naturels, reformant une surface horizontale en deux minutes, même avec de faibles angles d’inclinaison.
Reste néanmoins à expliquer les raisons de l’agitation, non brownienne, des statolithes in vivo. D’après les chercheurs, elles sont sans doute à chercher dans les interactions de ces grains avec le cytosquelette des cellules, constitué de filaments d’actine ou microtubules, mais des études, biologiques cette fois, sont nécessaires pour le confirmer.
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