Depuis plusieurs éditions des grands salons high-tech, Royole Corporation promène ses prototypes d’écrans flexibles, toujours très spectaculaires. Pour cet IFA 2018, la différence est que la marque de Shenzhen en Chine annonce le démarrage de la production en grande série dans une usine dédiée (capacité : 50 millions d’unités), avec un investissement total d'1,7 milliard de dollars. La technologie multi-brevetée de la marque permet de fabriquer des écrans entièrement flexibles et ultra-fins (jusqu’à 0,01 mm), réalisés en AMOLED (matrice active à diodes électroluminescentes organiques), ce qui permet la flexibilité physique de l’écran : ils peuvent être courbés, pliés et enroulés avec rayon de courbure minimum de 1 mm. Autre avantage de l’AMOLED, déjà beaucoup utilisé de manière classique dans certains smartphones, de forts contrastes, chaque pixel pouvant s’éteindre complètement pour offrir des noirs parfaits.
L'enjeu ? Passer l'effet "waouh"
Le premier écran produit est d’une taille standard de 7,8 pouces (comme une petite tablette), il offre une bonne définition de plus de 300 points par pouce, il est tactile et son poids est ultra léger. Le coût, selon les quantités produites, pourrait se rapprocher de celui des écrans classiques, selon le représentant de la marque que nous avons rencontré. Au premier abord, cet écran est très flatteur, autant par sa souplesse que par son affichage comparable aux écrans classiques. Mais c’est à se moment-là que vient la question cruciale : au-delà de la prouesse technologique, à quoi cela va-t-il bien pouvoir servir ? Sur le stand de Royole, un chapeau pouvant afficher messages ou drapeaux d’équipes de sport sert de démonstrateur. Il faudra des applications plus convaincantes que de simples gadgets onéreux pour justifier une telle technologie. Royole évoque des domaines comme l’électronique grand public, les transports intelligents, la maison intelligente, le sport et la mode (t-shirts ou blousons de ski par exemple), le bureau, l’éducation, la robotique… Mais sous couvert de secret industriel, les exemples concrets manquent. On pense volontiers aux projets de smartphones à écran pliable, vraie avancée avec un grand potentiel en terme d’ergonomie, plutôt qu’à l’intégration d’écrans dans le textile. Car on est en droit de se demander si, passé le premier effet de surprise ("effet waouh", ou « wow effect » comme disent les anglophones) la démultiplication des écrans dans des supports jusque là épargnés ne risque pas de lasser.
Par Nicolas Valeano