Tous migraineux : bientôt un mauvais souvenir ?

La migraine touche 12 millions de Français. Et selon une étude que nous révélons, 86% de ceux qui en sont atteints changent carrément leurs plans à cause de la maladie. Un traitement très prometteur devrait être bientôt disponible.

 Les femmes sont les plus touchées par la migraine. Elles représentent 83 % des migraineux selon l’enquête MyMigraineVoice que nous dévoilons.
Les femmes sont les plus touchées par la migraine. Elles représentent 83 % des migraineux selon l’enquête MyMigraineVoice que nous dévoilons. LP/Delphine Goldstejn

    Comme des papillons dans les yeux. Mais pas des jolis, sagement posés. Eux, battent violemment des ailes, troublent sa vue. Plus tard, ils se métamorphosent en marteau-piqueur, qui pendant six - parfois sept heures - s'abat sur sa tempe, la laissant exsangue, épuisée. Angélique Delcourt-Bonnet, 42 ans, connaît par cœur le mécanisme.

    La migraine, cette Bordelaise vit avec depuis l'adolescence ! Hasard de l'histoire, son mari en souffre aussi. « On s'arrange pour faire nos crises en décalé, ironise-t-elle. Heureusement car on a deux filles de 11 et 7 ans. »

    Et pourtant, le couple est loin d'être une exception française. Cette tempête sous le crâne fait souffrir entre 17 et 20 % de la population. Le verbe est loin d'être galvaudé tant les crises peuvent être intenses et les répercussions sur la vie professionnelle, sociale, familiale, importantes.

    Selon l'étude mondiale MyMigraineVoice*, réalisée par Novartis, dont nous dévoilons les résultats français, 86 % des migraineux changent carrément leurs plans à cause de la maladie. Et près d'un sur deux estime leur douleur incomprise.

    « L'une des plus complexes maladies neurologiques »

    « Je ne sais pas pourquoi elle est sous-estimée, souffle le Dr Michel Lantéri-Minet, chef du département de la douleur au CHU de Nice. La migraine est l'une des plus complexes maladies neurologiques, à tort présentée comme une fausse pathologie féminine ! Elle est d'autant plus difficile à gérer qu'elle est très sensible aux changements d'état. Or, nous passons notre temps à vivre ces changements. »

    Angélique a bien essayé plusieurs traitements médicamenteux pour la prévenir ou pour atténuer les crises (une tous les deux mois, durant trois à quatre jours). En vain. Grâce à la danse à laquelle elle s'astreint et à huit séances d'hypnose récemment pratiquées, elle arrive, dit-elle, à « mieux la gérer ».

    Dans l'association dans laquelle elle travaille, tout le monde est bienveillant. « C'est une chance car la vie en entreprise peut-être difficile pour les malades. » Et elle a un coût. Dans le monde, les malades de la migraine posent en moyenne trois jours par mois d'arrêt maladie.

    Un traitement spécifique à la migraine sévère

    Mais voilà, la maladie décrite dès l'antiquité est-elle en train de s'inventer des lendemains meilleurs ? Les nouvelles voies de recherche, plus intenses, plus ciblées, donnent aux patients des motifs d'espoir.

    Fin août, le premier traitement biologique et spécifique à la migraine sévère (quatre jours par mois) a reçu une autorisation de mise sur le marché européen. Cette injection (Aimovig, de Novartis), dont l'action dure un mois, bloque - spécifiquement - le récepteur responsable de l'inflammation des cellules. Il sera disponible après la phase classique de négociation des prix en vue de son remboursement.

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    Dans le même temps, des armes thérapeutiques contre les crises migraineuses sont en cours de développement. Après des années d'errance, il y a enfin un entêtement à trouver des solutions.

    MÊME LES ENFANTS SONT TOUCHÉS

    La migraine touche 5 % des petits de 5 ans. (Illustration) /LP/Olivier Corsan prod
    La migraine touche 5 % des petits de 5 ans. (Illustration) /LP/Olivier Corsan prod LP/Delphine Goldstejn

    Le professeur Daniel Annequin, médecin de la douleur, a l'habitude que son interlocuteur prenne un air dubitatif. « Et pourtant, c'est vrai, la migraine est fréquente chez l'enfant, garçons comme filles ! Elle touche 5 % des petits de 5 ans, 10 % des 10 ans, 15 % des 15 ans », assure celui qui a reçu dans son bureau à l'hôpital Armand-Trousseau près de 4 000 enfants et ados migraineux.

    Récemment, un lien entre coliques du nourrisson et migraine a même été établi, les premières étant un pré-signe de la seconde. Problème, alerte le Pr Annequin, trop de parents ignorent que leur progéniture en est victime, mettant leurs maux de tête sur le compte des yeux, des sinus, ou… parfois… de la comédie.

    « Une consultation avec un interrogatoire poussé doit avoir lieu, car pour une partie d'entre eux la migraine débouche sur des vomissements, un renfermement, voire un absentéisme scolaire. Or, plus le diagnostic est précoce, plus cela s'améliore. » D'autant que la prise en charge diffère des adultes. « Les méthodes psychocorporelles, autohypnose, relaxation, sont supérieures, tranche le médecin, aux traitements médicamenteux de fond. »

    *Enquête MyMigraineVoice, de Novartis, menée auprès de 719 patients français entre septembre 2017 et février.