Accéder au contenu principal
RD CONGO

Trous béants à Kinshasa : la capitale congolaise menacée par l’érosion

Les images à gauche et au milieu sont des captures d'écran de vidéos tournées par Michael Luzolo, la photo de droite a été prise par Felix Kabena, à Kinshasa, entre août et septembre 2018.
Les images à gauche et au milieu sont des captures d'écran de vidéos tournées par Michael Luzolo, la photo de droite a été prise par Felix Kabena, à Kinshasa, entre août et septembre 2018.
Publicité

Un habitant de Kinshasa, la capitale de la République démocratique du Congo, a alerté notre rédaction au sujet d'un problème ancien, mais toujours d'actualité, affectant différents quartiers de la ville : l'existence de trous causés par l'érosion, provoquant l'effondrement des maisons. En cause : les constructions anarchiques ou encore la nature sableuse du sol. Il appelle les autorités à réagir pour lutter efficacement contre ce phénomène.

Michael Luzolo habite la Cité verte, dans la commune de Selembao, située dans le district de la Funa, dans le sud de Kinshasa. Depuis la mi-août, il a tourné des vidéos montrant des trous importants dans deux endroits de la ville : dans le quartier Mathosho, dans la commune de Mont-Ngalufa, dans le district du Mont-Amba, ainsi que dans le quartier Binza Delvaux, dans la commune de Ngaliema, dans le district de la Lukunga.

"Les habitants se débrouillent donc eux-mêmes pour tenter de protéger leurs maisons"

Le trou dans le quartier Mathosho est récent. Il y a plusieurs années, les habitants avaient creusé un bassin à cet endroit, de trois mètres de profondeur environ, pour que les eaux de pluie restent là. Sauf que ce bassin s’est effondré cette année, sûrement sous le poids de l’eau. Des maisons se sont alors effondrées. Du coup, le trou est beaucoup plus profond désormais.

Vidéo tournée par Michael Luzolo dans le quartier Mathosho.

Des sacs de sable pour lutter contre l'érosion. Vidéo tournée par Michael Luzolo dans le quartier Mathosho.

Vidéo tournée par Michael Luzolo dans le quartier Mathosho.

Récemment, des camions appartenant à une entreprise chinoise sont venus déverser de la terre sur le côté du trou, où il y a une chaussée, près du camp militaire Badiadingi. Ils ont sûrement été mandatés par les autorités. Mais ces travaux n’ont guère avancé…

Les habitants se débrouillent donc eux-mêmes pour tenter de protéger leurs maisons, en mettant des sacs de sable sur les rebords du trou, pour éviter que la terre ne s’écroule davantage. Mais la situation risque de s’aggraver avec la saison des pluies [qui démarre en septembre, NDLR].

"Il y a même une route qui a été engloutie en raison de l'érosion"

La situation est encore pire dans certains quartiers, comme à Binza Delvaux, où l’érosion a commencé dans les années 1990. Dès qu’il pleut, de nouvelles maisons s’effondrent… Il y a même une route qui a été engloutie. Là encore, les habitants tentent de combattre le phénomène par leurs propres moyens, car les autorités ne font rien.

Vidéo tournée par Michael Luzolo dans le quartier Binza Delvaux, où une route a été engloutie.

Vidéo tournée par Michael Luzolo dans le quartier Binza Delvaux.

L’érosion est essentiellement due au fait que beaucoup de logements ont été construits de façon anarchique. Par exemple, des terrains ont été vendus dans des zones où il ne fallait pas construire. Sans compter que l’eau est mal canalisée. Comme plusieurs quartiers de la ville sont menacés par ce phénomène, j’aimerais que les autorités prennent des mesures pour y faire face.

Kinshasa connaît une croissance urbaine très importante depuis plusieurs décennies, qui s’est produite sans réel contrôle de la part des autorités. Par conséquent, de nombreux logements ont été construits dans des zones à risques – avec l’aval ou non des autorités – ou dépourvues de canalisations solides (sans oublier celles qui sont mal entretenues). De plus, les constructions ont contribué à la dégradation des sols, pourtant déjà instables, du fait de leur nature sablonneuse.

Ce sont ces différents facteurs qui sont à l’origine de l’apparition de trous, lesquels entraînent de nombreux dégâts matériels, sans compter les pertes en vies humaines (lors des glissements de terrain). Selon différentes estimations, il y aurait plus de 400 têtes d’érosion à Kinshasa.

Felix Kabena, l’un de nos Observateurs à Kinshasa, ajoute :

Certains habitants avancent parfois aussi des raisons mystiques. Par exemple, dans mon quartier, deux familles se disputaient l'héritage d'une parcelle. Après le jugement rendu en faveur de l’une, l'autre lui aurait jeté un sort, selon les rumeurs. Et le lendemain, la maison fut engloutie par l’érosion…

Photo prise par Felix Kabena début septembre, à la limite du quartier Mathosho.

"Nous indemnisons les habitants uniquement s'ils disposaient de permis de construire"

Contacté par notre rédaction, Jean-Marie Likindji, le directeur du cabinet adjoint du ministre de l’Urbanisme et Habitat, a indiqué :

Pour tenter d'endiguer ce problème, nous travaillons avec l’Office des voiries et drainages, lequel dépend du ministère des Infrastructures, Travaux publics et Reconstruction, et avec des entreprises chinoises, pour construire des canalisations.

Dans les prochains jours, nous allons également commencer à démolir des maisons, dans la commune de Gombe [au nord de Kinshasa, NDLR], qui sont construites sur le lit de la rivière. Les habitants ont déjà été prévenus.

D’une manière générale, si nous détruisons des maisons ou si des maisons s’effondrent en raison de l’érosion, nous indemnisons les gens s’ils disposaient d’un permis de construire. Les autres ne sont pas indemnisés.

Je crois qu’il y a eu une dizaine de morts en raison de l’érosion l’an dernier.

Cet article a été écrit par Chloé Lauvergnier (@clauvergnier).

 

Partager :
Page non trouvée

Le contenu auquel vous tentez d'accéder n'existe pas ou n'est plus disponible.