Les apôtres de la haine poursuivent leurs croisades dans les mosquées du Royaume sans que les autorités compétentes n’interviennent pour mettre fin à leurs dérapages. Le dernier en date a été commis par le dénommé Mohamed Zouhal, qui, sans vergogne, a frappé d’apostasie toute personne qui userait du salut amazigh « azul ». Prêchant dans une mosquée de Casablanca, Zouhal a attaqué tous les Amazighs qui utiliseraient ce salut au prétexte qu’il est contraire à l’islam et qu’il n’y aurait qu’une seule formule de salut halal, en l’occurrence « Assalamou alaykoum ». « Celui qui troque Assalamou alaykoum contre une autre formule de quelque nature que ce soit, hait la religion, Dieu et son Prophète », selon une vidéo postée sur Youtube. Pis encore, il a accusé les Amazighs « d’entretenir des relations avec le sionisme et les croisés ».
La langue amazighe constitue, pourtant, selon l’article 5 de la Constitution, « une langue officielle de l’Etat, en tant que patrimoine commun de tous les Marocains sans exception ». Mais, apparemment, ce piètre prêcheur semble méconnaître cela puisqu’il semble sinon vivre sur une autre planète, du moins aimer prêcher dans le désert et éructer toutes les insanités qui lui passent par la tête.
Cette étrange déclaration a provoqué un tollé parmi les internautes qui ont dénoncé ses propos racistes et anti-amazighs.
Contacté par Libé, l’activiste Ahmed Ahermouche a qualifié les insanités de Mohamed Zouhal de « futilités », qu’il faut néanmoins prendre au sérieux, car elles « traduisent la démarche des islamistes marocains, y compris ceux qui sont affiliés au PJD, visant à islamiser non seulement les institutions du pays, mais aussi la société, les relations humaines et les modes de communication populaire ». Et d’insister : « Ils veulent détruire ce qui reste de l’identité nationale ». « Il y a en islam cinq piliers que sont la Chahada, les cinq prières quotidiennes, le jeûne, la zakat et le pèlerinage. Maintenant, les islamistes veulent ajouter un sixième pilier, à savoir la sacralité de la langue arabe », a ironisé Ahmed Ahermouche.
Au moment où les mouvements amazighs et les partis démocrates militent pour l’intégration de la langue amazighe dans l’enseignement, l’administration et la vie publique comme le stipule la Constitution de 2011, il y a des parties qui œuvrent inlassablement dans le sens contraire, a-t-il déploré.
Au lieu d’être un lieu de prière, d’adoration d’Allah et de défense d’un Islam tolérant et ouvert, lieux de culte se sont convertis en des lieux de diffusion de discours haineux, intégristes et racistes. Il y a quelques mois, le prétendu cheikh, Abdelhamid Abounaim avait, rappelle-t-on, apostasié le Premier secrétaire de l’USFP, Driss Lachguar, les femmes ittihadies, et les intellectuels marocains dont Abdellah Laroui, Ahmed Assid, et feu Mohamed Abed El Jabri. Il avait également attaqué les figures emblématiques de l’USFP qui ont lutté pour la démocratie et la liberté au Maroc dont le martyr Mehdi Ben Barka.
Tous ces méfaits ne sont pas fortuits au regard du fait qu’un chantier de réforme du champ religieux a été initié en 2004 dans l’objectif de préserver notre référentiel religieux basé sur la Sounna et le rite malékite et prônant un effort d’interprétation en conformité avec les finalités magnanimes de la charia, la souplesse, la modération et le juste milieu et loin de tout rigorisme, extrémisme ou excès.
Dix ans après le lancement de ce vaste chantier, nous assistons toujours à l’émergence de prêcheurs qui ne connaissent d’autre langage que celui de la haine et de l’excommunication, ni d’autre religion que celle de l’extrémisme le plus abject. Est-ce à dire que le ministère des Habous et des Affaires islamiques ferme sciemment ou inconsciemment les yeux sur cela ou qu’il a tout simplement échoué à mener à terme son projet de réforme ? Quelle que soit la réponse à cette double interrogation, ce qui est advenu est trop grave et risquerait, si l’on n’y prend pas garde, de porter atteinte à l’unité nationale et à la cohésion sociale.