Malgré les progrès, l’accès du Louvre aux handicapés reste un parcours du combattant

L’accessibilité des handicapés aux établissements culturels est un droit inscrit dans la loi depuis 2005. Dans la réalité, se balader en fauteuil demeure compliqué. Même au Louvre, qui pourtant fait de réels efforts.

Par Marie Frumholz

Publié le 19 septembre 2018 à 14h00

Mis à jour le 08 décembre 2020 à 01h16

Ça commence mal mais on va essayer de positiver ! » peste Pascale Jude. Au dépose-minute du musée du Louvre, l’énergique présidente de l’association Action Passeraile s’active pour faire descendre prestement de son Kangoo blanc Franceline et son fauteuil électrique. Tandis que la première s’éloigne en quête d’une place de parking rue de Rivoli, la seconde est rejointe par son accompagnatrice qui la guide jusqu’au passage piéton pour franchir le premier obstacle : le trottoir. Un autre bénévole, Jérôme, et son binôme du jour, Nicolas, également en chaise roulante, les rejoignent bientôt.

Même en passant devant tout le monde, il faut faire la queue devant l'ascenseur car l’un des deux est en panne. Et surprise ! Le 2e étage est fermé le lundi. Pas de peinture donc comme le souhaitait Nicolas et Francile, mais les Antiquités grecques et égyptiennes qu’ils atteignent enfin… au bout d’une heure. Avec cet accompagnement personnalisé — qui met en relation des bénévoles et des personnes handicapées —, Pascale Jude voulait « casser le ghetto » des sorties en groupes homogènes, finalement « stigmatisantes » pour tout le monde :  « Si les gens [entendez : les valides] voient débouler d’un coup cinq ou six fauteuils, leur réaction est souvent inélégante et malvenue. » Il faut en effet que les publics se mélangent beaucoup plus harmonieusement.

Cette exigence de normalisation du handicap, au musée comme partout ailleurs, Michel Lomonaco, chargé de programmation handicap au musée du Louvre, en a bien conscience. « Avant, venir en groupe était plus sécurisant pour ces publics dits “empêchés”, aujourd’hui les lieux culturels ont évolué et sont moins intimidants. »

Pour les équipes du Louvre, faire correspondre les contraintes de l’ancien palais avec l’obligation légale d’être accessible à tous types de publics est un défi au quotidien. Difficile en effet d’équiper les 14 km de galeries du Louvre de bandes podotactiles. « Il faudrait pour cela imposer un parcours de visite aux personnes malvoyantes, mais pourquoi les guider vers telle œuvre plutôt qu’une autre ? explique Cathy Losson, chef du service Démocratisation Culturelle et Action Territoriale. En revanche, un membre du personnel peut venir vous récupérer à la sortie du métro ou de votre taxi pour vous amener jusqu’au musée. Encore faut-il que les personnes concernées soient au courant de l’existence de ce service. Nous y travaillons… »

Les équipes y travaillent d’autant plus qu’ici tout le monde a compris que l’accessibilité aux publics dit « empêchés » participe aussi à l’attractivité du musée. « Lorsque nous concevons un outil de médiation à destination des malvoyants par exemple, nous savons déjà que celui-ci profitera à tous, des scolaires aux familles, en passant par les touristes étrangers » explique Cathy Losson. Au département des Arts de l’Islam par exemple, les reproductions d’œuvres d’art qu’il est possible de manipuler, sont en effet très sollicitées par tous les visiteurs. Ce qu’on appelle dans le jargon marketing du gagnant-gagnant !

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