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Mers et océans

Réintroduction d'huîtres disparues depuis plus de 100 ans en Ecosse

Une distillerie de whisky écossaise s'est alliée à des scientifiques pour réintroduire dans un bras de mer des huîtres indigènes disparues depuis plus de 100 ans. Une initiative qui permettra de filtrer efficacement ses rejets à la mer.

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Dornoch Firth (Ecosse)

Ce bras de mer du nord-est de l'Écosse est l'objet d'une expérience de réintroduction d'huîtres européennes.

Dg-505

BIODIVERSITÉ. Le Dornoch Firth est un magnifique bras de mer de la côte est de l’Écosse (au nord du Loch Ness), qui abrite une biodiversité exceptionnelle et dont les larges plages de sable procurent un refuge idéal pour de nombreuses espèces d’oiseaux, les loutres et les phoques. Il y a encore 150 ans, il regorgeait également d’huîtres sauvages, largement exploitées par la pêche locale. Entre 1860 et 1870, les bateaux écossais ont ainsi extrait un demi-million d’huîtres par semaine, soit quelque 30 millions en un an ! “Puis un jour, il n’y eut plus une seule huître vivante et les eaux écossaises ont drastiquement changé”, remarque Bill Sanderson, du Centre pour la biodiversité marine et la biotechnologie à l’université Heriot-Watt d’Édimbourg (Royaume-Uni). Cette situation pourrait s’inverser dans les prochaines années sous l’impulsion du programme DEEP (Dornoch Environmental Enhancement Project) dirigé par les scientifiques de l’université d’Édimbourg, la société de conservation marine du Royaume-Uni et la distillerie Glenmorangie. L’objectif est en effet de réintroduire 4 millions d’huîtres plates (Ostrea edulis), dont la présence dans la région remonterait à 10 000 ans. Désormais, s’il “y a bien des huîtres dans l’estuaire, ce sont des espèces originaires du Pacifique et non pas indigènes”.

La distillerie Glenmorangie sur les rives du Dornoch Firth..

Le projet est né sous l’impulsion de la compagnie Glenmorangie, soucieuse d’associer sa marque “à l’image d’une terre protégée, propre”, affirme Peter Nelson, directeur des opérations de Glenmorangie, qui veut faire de l’estuaire du Dornoch “une sorte de laboratoire à ciel ouvert”. La distillerie de la marque de whisky est en effet installée depuis plus de 170 ans sur les rives du Dornoch Firth. Ces dernières années, elle s’est équipée d’un système de traitement des eaux usées par biodégradation via des bactéries anaérobiques – un système qui permet par ailleurs de produire de l’énergie et de réduire de 15 % la dépendance de la distillerie vis-à-vis des combustibles fossiles. Au total, 95 % des sous-produits de la distillation sont ainsi purifiés, fournissant un engrais riche en cuivre destiné aux champs d’orge qui s’étendent autour de la distillerie. Reste 5 % de déchets organiques, qui sont rejetés dans l’estuaire. C’est à cette étape que doivent intervenir les huîtres, microphages omnivores capables de les filtrer et de les digérer.

Bill Sanderson brandit deux huîtres européennes prélevées pour contrôle de leur état de santé. © DEEP

Restaurer 40 ha de récifs d'huîtres d'ici à cinq ans

En mars 2017, 300 huitres prélevées à Loch Ryan, la seule grande population d'huîtres sauvages du Royaume-Uni, ont été introduites dans deux sites expérimentaux, à des fins d’étude de leur croissance et de leur survie dans les eaux contemporaines. Résultat : 80 % d’entre elles avaient survécu dix-huit mois plus tard. L’introduction s’est donc poursuivie et “nous sommes actuellement à mi-parcours du projet, note Peter Nelson. Mais nous prenons garde à ne pas créer un monstre incontrôlé : nous travaillons pas à pas avec des scientifiques, de manière très prudente. Ensuite, les huîtres pourront essaimer .” L’objectif à cinq ans est de restaurer 40 ha de récifs d'huîtres, qui permettront de fixer 20 tonnes d’azotes dans les cinq premières années et 200 tonnes de carbone par an. Cette initiative étonnante devrait permettre de restaurer cet écosystème exceptionnel. Et l’expérience pourrait ensuite être tentée dans d’autres bras de mer ailleurs dans le monde.

© Université Heriot-Watt d’Édimbourg

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