Michael Imperioli : « Lou Reed a apporté une sensibilité littéraire au rock »

L'acteur des Soprano (il jouait le neveu de Tony) sort son premier roman, qui met en scène Lou Reed en 1976 à New York. Rencontre.

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Michael Imperioli : « Lou Reed a apporté une sensibilité littéraire au rock »
Michael Imperioli : « Lou Reed a apporté une sensibilité littéraire au rock » © DR

Temps de lecture : 5 min

On se souvient surtout de lui comme Christopher Moltisanti, le neveu alcoolique et drogué du mafieux Tony dans la série Les Soprano (rôle qui lui a même valu un Emmy), mais, à 52 ans, Michael Imperioli, fils d'acteurs amateurs, New-Yorkais immigrés d'Italie, a bien d'autres talents. Acteur (pour Martin Scorsese, Spike Lee, Abel Ferrara), réalisateur, scénariste, guitariste dans un groupe de rock, directeur artistique de théâtre… Il sort aujourd'hui son premier roman, dans lequel il met en scène un adolescent un peu insipide qui se lie d'amitié avec son voisin du dessus : Lou Reed, charismatique chanteur du Velvet Underground et auteur du tube « Walk on The Wild Side ». À la manière d'un réalisateur de thriller, Imperioli rembobine, accélère, s'adresse au lecteur dans ce récit drôle et attachant qui a « bouleversé » Joyce Carol Oates et nous entraîne dans le Manhattan chaotique des années 1970, ses rues bruyantes, ses diners, ses bars, peuplés de dealers, musiciens, travestis et prostitués.

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Le Point Pop : Comment passe-t-on d'acteur dans Les Soprano à écrivain ?

Christopher Moltisanti : J'ai toujours été auteur pour la télévision et le cinéma en parallèle. J'ai écrit quelques épisodes des Soprano et j'ai travaillé avec Spike Lee sur son film Summer of Sam. J'ai aussi écrit et réalisé un film indépendant, The Hungry Ghosts, sorti en 2009. Depuis des années, j'essaie d'écrire un livre, mais toutes mes tentatives ont été infructueuses jusqu'à celle-ci.

Quelle place occupe la littérature dans votre vie ?

Je lis énormément de fiction contemporaine. J'adore Roberto Bolaño, An American Marriage de Tayari Jones, le dernier Salman Rushdie est un chef-d'œuvre, Marguerite Duras…

Pourquoi faire de Lou Reed un personnage de fiction ?

En 2013, j'ai commencé à écrire ce livre sur le passage à l'âge adulte d'un adolescent, en pensant à mon fils qui venait d'avoir 16 ans. Quelques mois après, Lou Reed est mort. Ça m'a choqué parce que je le connaissais, mais surtout en tant que fan. J'ai donc eu envie de faire se rencontrer ces deux personnages. Il est une figure paternelle pour ce garçon, mais aussi un mentor artistique, même si au début, on ne sait pas encore qu'il deviendra artiste. J'aime les histoires qui mettent en scène des personnages historiques dans un monde fictionnel.

L'adolescence est un thème qui vous fascine ?

L'Attrape-cœurs de J. D. Salinger m'a énormément marqué quand j'étais jeune et m'a clairement inspiré pour ce livre. Le passage à l'âge adulte est un moment très délicat, vulnérable, amusant, nouveau, excitant.

Vous êtes nostalgique de votre jeunesse ?

Je suis surtout nostalgique de ce que New York était à l'époque. C'était une ville plus intéressante. Le livre n'est vraiment pas basé sur ma vie mais, comme Matthew, j'ai déménagé à New York quand j'étais jeune, au début des années 1980, à 21 ans. Je voulais être acteur, j'ai vécu dans le Village en travaillant dans des restaurants et des théâtres. J'ai fréquenté la scène post-punk, c'était stimulant. Ce serait impossible aujourd'hui, les prix de l'immobilier sont trop élevés, les artistes qui n'ont pas été décimés par le sida sont partis. Les quartiers qui avaient une identité très forte l'ont perdue, la ville est devenue totalement homogène.

Wild Side ©  DR

La couverture de Wild Side, le premier livre de Michael Imperioli.

© DR
Vous avez rencontré Lou Reed en 1994 alors que vous jouiez le rôle d'Ondine, un de ses amis, dans le film I Shot Andy Warhol. Êtes-vous redevenu un adolescent face à lui ?

D'une certaine manière, oui ! Je l'admirais énormément. Ses paroles sont inégalées. Il a vraiment apporté une sensibilité littéraire au rock'n'roll, su créer une narration comme dans un roman. Il s'est remis en cause musicalement toute sa vie, et n'a cessé de créer, jusqu'à ses 70 ans. Les musiciens avec lesquels on a grandi restent très importants tout au long de notre vie. Heureusement, il ne m'a pas déçu. Il était vraiment généreux et gentil. C'est quelqu'un de très courageux. Il a déclaré être gay au tout début des années 1970, ce qui ne se disait pas du tout à l'époque parce que ce n'était pas socialement accepté. Il n'a jamais eu peur d'assumer ce qu'il était. Il s'est ensuite battu contre ses démons et a fini par faire la paix avec eux, ce qui est très impressionnant. J'ai fait énormément de recherches sur lui : je voulais être fidèle à sa personne, montrer aussi qu'il pouvait être tout d'un coup vicieux, mais aussi que c'est un artiste extraordinaire, très sensible, humain, complexe, pas juste une rock star. C'est pour ça que je tenais à ce que le narrateur ne sache pas vraiment qui était Lou : il le voit avant tout comme une personne. C'est ce qui explique aussi le succès des Soprano : au-delà de l'attrait pour les histoires de mafia, les personnages avaient plusieurs dimensions.

La manière dont vous écrivez est très cinématographique…

Quand j'écris, je dois vraiment voir la scène dans ma tête, comme au cinéma. Sinon, la démarche est très différente : pour les romans, on n'a que les mots, donc les phrases doivent avoir une structure et un flux qui rendent la lecture plaisante. Dans un scénario, on décrit une scène, mais les mots ont moins d'importance. Mais j'aimerais beaucoup adapter ce livre au cinéma. Je jouerai Lou Reed !

Wild Side, Autrement, 304 p., 20,90 €.

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