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Guerre commerciale Chine-Etats-Unis: conséquences en Afrique

Hugo Flotat-Talon
24 septembre 2018

Ce lundi 24 septembre marque l’entrée en vigueur de nouvelles taxes douanières entre les deux pays. La guerre commerciale qui s’aggrave encore un peu plus pourrait avoir des conséquences jusqu’en Afrique.

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Symbolbild Handelskrieg USA und China
Image : picture-alliance/chromorange/C. Ohde

Il y avait déjà eu des taxes de 25% sur 50 milliards de produits chinois cet été. Ce lundi 24 septembre, d’autres sanctions, plus lourdes encore, sont entrées en vigueur aux Etats-Unis pour contrer l’économie chinoise. De nouvelles taxes douanières sur 200 milliards de dollars de biens chinois. Ça veut dire que les produis coûteront plus cher à l'achat pour les consommateurs. La Chine devrait faire de même pour quelques 60 milliards de dollars de produits américains.

Alors ces sanctions semblent éloignées de l'Afrique et pourtant ce n'est pas sans conséquences. Cette "guerre commerciale" entre la Chine et les Etats-Unis comme on la nomme désormais, lancée en début d'année, à maintenant des conséquences sur l'économie chinoise. La croissance se tasse, les prévisions sont revues à la baisse. En fin de semaine dernière, l’agence de notation financière Fitch passait les prévisions de croissance chinoises à 6,1%, soit 0,2 point de pourcentage de mois que lors d’autres estimations au moins de juin.

Programmes chinois en Afrique revus à la baisse

Cela pourrait donc avoir des conséquences jusque dans les projets chinois en Afrique selon Emmanuel Dubois de Prisque, chercheur associé spécialiste de la Chine à l'Institut franco-belge Thomas More. "La Chine devra, peut-être, revoir à la baisse certains programmes d'aide si beaucoup d'argent doit être dépensée pour relancer l'économie chinoise en interne", explique-t-il. Une possibilité à ne pas écarter selon-lui, "d’autant qu'il y a déjà beaucoup de critiques en interne en Chine à l'encontre de ces programmes".

Des produits chinois plus nombreux en Afrique

Nairobi - China in Afrika
Image : DW/E. d. Vries

En plus, face à la fermeture des marchés américains et de la baisse de consommation continue en Occident, la Chine pourrait chercher encore plus qu'aujourd'hui à écouler ses produits en Afrique en faisant concurrence aux économies locales. Le continent a déjà multiplié ses relations avec le continent depuis plusieurs années. "On entend, par exemple, beaucoup parler des routes de la soie depuis 2013 car la Chine cherche à se reconcentrer sur de nouvelles stratégies", rappelle Emmanuel Véron, enseignant-chercheur à l'école navale de Brest en France et spécialiste de la Chine. Tout récemment, lors du sommet Chine-Afrique, il signait un article sur les liens du continent et de la Chine dans une revue universitaire.

"La Chine cherche à exporter ses surcapacités industrielles sur de nouveaux marchés, du fait des ralentissements de la consommation des classes moyennes dans les économies industrielles avancées", explique encore Emmanuel Véron. Pour l’Afrique cela se traduit déjà par des exportations de "produits de première nécessité, des biens de consommation du quotidien, à bas prix qui inondent le marché africain", détaille le chercheur. "Ce sont des produits qui permettent à certains de s’équiper mais qui peuvent aussi rendre dépendants les marchés africains."

Délocalisations chinoises heureuses en Afrique ?

Si les conséquences peuvent être négatives pour le continent, les deux spécialistes parlent aussi d’éventuelles répercussions positives. "Des entreprises chinoises, pour éviter ces droits de douane, pourraient peut-être choisir de délocaliser en Afrique", explique Emmanuel Dubois de Prisque. "Elles l'avaient déjà fait via des délocalisations en Asie du Sud-Est il y a quelques années quand il y avait des quotas sur le textile par exemple. On pourrait imaginer donc, que dans les zones économiques spéciales créées par la Chine en Afrique, les entreprises chinoises délocaliseraient pour éviter les sanctions américaines".

Äthiopien Industriegebiet in Hawassa
Une zone industrielle chinoise à Hawassa en Ethiopie.Image : Imago/Xinhua Afrika

Des délocalisations signes d'emplois en Afrique. Encore faudrait-il alors que, comme c'est parfois le cas sur d'immenses projets déjà, les entreprises chinoises ne fassent pas travailler seulement leurs travailleurs venus spécialement depuis la Chine. "Ce n’est pas tout le temps le cas, mais souvent dans les zones économiques spéciales", affirme Emmanuel Véron. Et le chercheur de s’interroger alors sur les répercussions réelles pour les économies locales. "On aussi un diaspora chinoise relativement nouvelle qui souvent parle les dialectes, qui est en contact avec les populations locales, la société civile africaine et aide au développement local, mais cela n'est pas si courant encore".

Portrait Hugo Flotat-Talon
Hugo Flotat-Talon Journaliste au programme francophone de la Deutsche WelleHugo_FT_