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Par Sophie Leclanché
Publié le 29 septembre 2018 à 11h00
Ne pas éduquer à la sexualité, dans le cadre scolaire, « c’est ni plus ni moins être hors la loi ». Sexologue et formateur en santé sexuelle à Clermont-Ferrand, Frédéric Galtier intervient depuis une quinzaine d’années dans les écoles primaires.
Il recadre d’emblée le débat qui a pu se faire jour autour de cet enseignement prévu dans les textes depuis 2001, relayé par différentes circulaires ministérielles appliquées au petit bonheur la chance (un quart des écoles, 4 % des collèges et 11 % des lycées selon une enquête de 2015), sur la base du bon vouloir, de l’implication des uns et des autres.
Tandis qu’à l’annonce d’une énième injonction réglementaire les esprits se sont échauffés sur l’air sempiternel de la sainte morale et le pré carré parental, le praticien, lui, revient aux fondamentaux comme le rôle socialisateur de l’école.
Non sans pointer « une société dans laquelle aujourd’hui la sexualité est omniprésente » et réduite, de par les messages transmis sur tous les supports, à « la performance, la beauté plastique, excluant ainsi toute notion de sentiment ».
Les parents souvent ont du mal à admettre que leur enfant est un être sexué.
« L’école est le lieu des interactions entre des filles et des garçons qui, dans un même espace, vont grandir ensemble, dans leur tête et dans leur corps ».
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Et dans ce lieu où vont se dérouler toutes sortes d’interactions entre les un(e)s et les autres, il y a les personnels, les enseignants, les infirmières scolaires, etc., qui non seulement « peuvent faire l’objet de confidences » de la part des élèves mais aussi « ne sont pas émotionnellement impliqués ».
Pour Frédéric Galtier « c’est le mot sexualité qui pose problème ». Il y a quinze ans, on ne nous embêtait pas avec ça. C’est depuis la Manif pour tous que cela a changé. Avec ce mouvement a émergé « la peur de changer des valeurs judéo-chrétiennes », il est apparu indispensable « de conserver le modèle rassurant du papa-maman ».
Les parents souvent ont « du mal à admettre que leur enfant est un être sexué », et qui plus est « dès le plus jeune âge ».
Mais « dans leur majorité, ils tiennent » à cet enseignement. Il ne faut pas croire que les parents parlent beaucoup plus de sexualité qu’avant avec leurs enfants. Parfois même « ils disent – même s’ils sont moins craintifs qu’il y a quinze ans – qu’ils ne savent pas faire. Mais après, lorsque l’école a commencé, ils prennent le relais ».
« La loi de 2001, très peu appliquée, prévoit une éducation à la sexualité à partir du CP. Il s’agit d’un travail autour du corps puis des émotions. On travaille sur les cinq sens pour permettre à l’enfant d’exprimer ce qu’il aime et ce qu’il n’aime pas. On travaille aussi sur l’anatomie et on apprend à nommer les choses pour que les enfants comprennent que « pénis » ou « vagin » ne sont pas des gros mots. Éduquer à la sexualité et à l’affectivité, c’est préparer les futurs adultes à une sexualité intelligente, respectueuse, propre à eux-mêmes. C’est les préparer à la citoyenneté, en évitant la moralisation et la culpabilisation ».
C’est l’interrogation fondamentale selon Frédéric Galtier, celle qui, immanquablement, débarque en premier dans les cours élémentaires : « Comment on fait les bébés ? ».
Et puis il y a aussi « qu’est-ce que c’est qu’être amoureux ». Parce que « certains le sont, amoureux, dès 5 ans ». Pour le spécialiste, en dehors de l’école, la littérature jeunesse peut donner un sérieux coup de pouce aux parents qui ne trouveraient pas les mots. Clin d’œil appuyé à Zep – et à son Zizi sexuel – qui en a, sans doute, tiré plus d’un d’embarras…
Pour les adolescents, le questionnement est plutôt centré sur le vécu, sur « la relation à l’autre », sur « comment dire ce que l’on ressent ».
Rares sont les interrogations sur les pratiques. Les plus jeunes doivent même être rassurés sur le fait qu’« on ne verra pas de photos ».
« Depuis 2 ou 3 ans », l’intervenant a néanmoins remarqué une connotation plus clairement sexuelle des questionnements. Avec même « des références pornographiques au niveau des Cours moyens ».
Sophie Leclanché
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