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Fondamental

Le CERN se désolidarise des propos sexistes d'un physicien italien

Lors d'un atelier du CERN consacré à la place des femmes dans les sciences, un physicien italien a tenu une présentation emprunte d'un sexisme malvenu. L'organisation internationale s'est désolidarisée de ces propos.

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Un scientifique italien Alessandro Strumia, invité au Cern, a assuré que la physique était une question d'hommes et accusé les femmes de vouloir prendre de plus en plus de postes grâce au débat sur la parité

Un scientifique italien Alessandro Strumia, invité au Cern, a assuré que la physique était une question d'hommes et accusé les femmes de vouloir prendre de plus en plus de postes grâce au débat sur la parité.

AFP/Archives - Fabrice COFFRINI

La scène semble surréaliste, et pourtant : elle s'est déroulée à Genève, sous l'égide de l'organisation européenne pour la recherche nucléaire (CERN). Alessandro Strumia, professeur de physique fondamentale à l'université de Pise (Italie), y a donné le 28 septembre 2018 une présentation pour le moins clivante pendant un atelier intitulé "Théorie des hautes énergies et genre". À grand renfort d'équations et de graphiques, le physicien aurait laissé entendre que les hommes font face à une discrimination grandissante en physique fondamentale... à cause des femmes. Alessandro Strumia aurait ainsi jugé que la place des femmes en physique n'était pas liée à leurs qualifications... mais qu'elle la devrait aux débats sur les questions de genre et de parité ! Le CERN s'est désolidarisé par voie de communiqué des propos du scientifique invité, jugés "particulièrement choquants".

La physique a été construite par des hommes... aussi parce qu'on en a longtemps éloigné les femmes 

L'AFP a pu lire le support de la présentation d'Alessandro Strumia, dans laquelle il laisse entendre, à coups d'équations et de multiples graphiques, que les hommes font face à une discrimination croissante dans le domaine de la physique. Il estime que le rôle croissant des femmes dans les emplois liés à la physique n'est pas lié à leurs qualifications mais à la multiplication des débats sur les questions de genre et de parité. Dans cette présentation, il écrit : "La physique a été inventée et construite par les hommes, on n'y entre pas par invitation". Il a aussi affirmé : "La physique n'est pas sexiste envers les femmes. Mais la vérité n'a pas d'importance, parce que ça fait partie d'une bataille politique venant de l'extérieur. On ne sait pas qui va gagner".

DOUBLE STANDARD. Plusieurs femmes scientifiques ayant participé à cet atelier ont ensuite partagé leur consternation sur les réseaux sociaux, après avoir entendu ces propos sexistes. L'une d'entre elles, Jennifer Rohn, biologiste au university college de Londres, a déconstruit point par point l'argumentaire du physicien sur Twitter : "cherry-picking" (terme anglophone désignant la sélection des seules informations permettant d'étayer un point de vue, à l'exclusion de toutes les autres), existence d'un double standard entre les hommes et les femmes... "Si Strumia dit que la communauté scientifique a bien accueilli le Nobel de Marie Curie [ndlr : ce qui est loin de la vérité : le prix Nobel a tout d'abord été attribué... à son époux, Pierre Curie !], alors où est son Nobel a lui ? Pourquoi attend-on toujours des femmes scientifiques qu'elles réalisent ce que la vaste majorité des hommes scientifiques n'atteignent jamais en toute une carrière ?"

Le CERN juge la présentation "particulièrement choquante"

Dans un communiqué, le CERN, qui est dirigé par la physicienne italienne Fabiola Gianotti, "juge particulièrement choquante la présentation donnée par (ce) scientifique invité". L'organisation précise ne pas avoir eu connaissance du contenu de la présentation avant l'atelier et indique avoir décidé de la retirer de son système d'archivage en ligne, "conformément à son Code de conduite, en vertu duquel les attaques et insultes personnelles ne sont pas tolérées". "La diversité fait partie du CERN et est aussi l'une des valeurs fondamentales sous-tendant notre Code de conduite. L'organisation est pleinement engagée dans la promotion de la diversité et de l'égalité, à tous les niveaux", fait-elle valoir.

Selon le CERN, ces 10 dernières années, le pourcentage de femmes travaillant au sein de l'organisation a très peu augmenté puisque ces dernières continuent à ne représenter que 20% environ de l'ensemble du personnel. L'organisation compte en tout cas deux femmes à des postes stratégique : outre Fabiola Gianoti, directrice générale, la physicienne Ursula Bassler a été nommée pour sa part présidente du laboratoire international de physique.

S.S. avec AFP

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