► Quel est le projet défendu par Emmanuel Macron ?

Le président de la République a reçu, lundi 1er octobre, les présidents des métropoles de Lille, Nantes, Toulouse, Bordeaux et Nice, pour avancer sur le projet de fusion de ces agglomérations avec leur département. Emmanuel Macron souhaite « inciter à la suppression des départements dans les zones métropolitaines en faisant reprendre par les métropoles les compétences actuellement exercées par les départements », selon les mots de son programme de campagne.

L’objectif est de mieux coordonner les politiques publiques et de faire des économies d’échelle en évitant les doublons, sur le modèle de la Métropole de Lyon. Cette dernière, créée le 1er janvier 2015 et dotée d’un statut particulier, dispose des compétences de la communauté urbaine lyonnaise et du département qui ont tous deux disparu. Pour agir sur le reste du territoire, un nouveau département – le Nouveau Rhône – a aussi été créé.

« Ce qui a marché à Lyon ne marchera pas forcément à Lille, car les configurations territoriales sont différentes. Mais la réduction du millefeuille administratif aura forcément des gains économiques mais aussi démocratiques », note Romain Pasquier, directeur de recherche à Sciences-Po Rennes.

Le projet proposerait que le président de l’entité métropole-département soit élu au suffrage universel direct, en même temps que le maire, qui – en raison du non-cumul des mandats – ne pourrait pas assumer les deux fonctions. Si l’Élysée aimerait boucler ce dossier dans les prochains mois, elle a assuré que « le gouvernement n’engagera cette réforme qu’avec la volonté explicite des élus d’y aller ».

Un soutien indispensable, puisque cette réforme devra être actée par une loi. Mais un soutien d’autant plus délicat à obtenir que se profilent dans moins de deux ans les élections municipales. Les calculs politiques locaux pourraient retarder la réforme.

► Quelles sont les agglomérations concernées ?

L’Élysée a ciblé les cinq métropoles de plus de 500 000 habitants qui n’ont pas de projet de fusion en cours. À l’issue de la rencontre de lundi, Johanna Rolland, présidente de Nantes métropole, a néanmoins annoncé qu’elle ne souhaitait pas inscrire Nantes dans la réforme, qui, selon elle, « n’est pas adaptée à la situation nantaise ».

« Nous avons déjà récupéré la totalité des compétences du département sur le champ économique et de l’innovation. Je ne vois pas ce qui pourrait nous être attribué pour contribuer à l’attractivité de la métropole », souligne l’élue, qui revendique le choix de « la coopération plutôt que la concentration ».

Sur les 22 métropoles françaises, deux autres ont avancé sur une fusion avec leur département. C’est le cas du Grand Paris, créé le 1er janvier 2016, mais dont l’organisation institutionnelle patine et reste inconnue. Pour ce qui est de la fusion d’Aix-Marseille avec le département des Bouches-du-Rhône, lancée par le gouvernement, le préfet a jusqu’à la mi-novembre pour présenter ses propositions.

► Quelles sont les critiques ?

Informés du projet, les cinq présidents des conseils départementaux concernés ont adressé une lettre au président de la République le 10 septembre. Ils craignent que le transfert des compétences – et des recettes – accentue « les fractures territoriales » :avec d’un côté une agglomération dynamique, gérée par la nouvelle entité, et de l’autre les zones périurbaines et rurales gérées par le département. Ils disent redouter la disparition de la logique de solidarité entre les zones rurales et urbaines.

Un argument non-recevable pour Romain Pasquier, spécialiste des questions de gouvernance territoriale. « On peut imaginer une solidarité territoriale sans département. Il faut aussi penser la péréquation entre les intercommunalités. »

Si le politologue salue la volonté d’aller vers la fusion, il regrette que le gouvernement ne « s’occupe que des grandes métropoles ». « Il faut un plan d’ensemble. La solidarité territoriale dépend des transferts de l’État et de la fiscalité locale, il faut réfléchir à ces sujets. »