Depuis le début de la semaine, les pays membres des Nations Unies se penchent sur l’avenir de la planète. Ils épluchent les 400 pages du nouveau rapport du Giec, le Groupe intergouvernemental d’experts sur l’évolution du climat. Ce document qui doit être publié lundi 8 octobre, après avoir obtenu l’aval des États, détaille les conséquences d’un réchauffement de la température d’1,5°C par rapport à l’ère préindustrielle.

Commandé par les gouvernements en décembre 2015, lors de la COP 21 de Paris, le rapport spécial du Giec sur un réchauffement planétaire de 1,5°C passe en ce moment sous les fourches caudines des 193 États membres de l’ONU. Réunis en Corée du Sud, des scientifiques doivent, d’ici la fin de la semaine, se mettre d’accord sur l’alerte qu’ils veulent envoyer au monde entier.
"Cette décennie est celle de la croisée des chemins. Tout dépendra des choix collectifs et individuels pris à court terme, et non pas dans un futur lointain", analyse Valérie Masson-Delmotte, climatologue et coprésidente du groupe de travail numéro un du Giec (Étude des principes physiques du climat). "Nous ne disons pas qu’il est trop tard pour agir, mais qu’il faut accélérer un effort encore trop balbutiant pour espérer rester sous la barre de 1,5°C. Même si la température est stabilisée, le niveau de la mer continuera à monter inexorablement forçant des millions de personnes à se déplacer".

  •  1,5°C


Ce chiffre est au cœur du rapport. Celui-ci s’attache à définir les différentes trajectoires d’émissions de gaz à effet de serre compatibles avec l’objectif 1,5 °C, conformément aux engagements pris par les signataires de l’Accord de Paris en décembre 2015. Dans chaque scénario, les bénéfices/risques sont précisées en fonction des options retenues en termes d’impact sur l’éradication de la pauvreté et la réduction des inégalités.  
Selon les premières fuites, il apparaît que les risques se trouvent nettement réduits à +1,5°C, par rapport à +2°C. Cela concerne tous les domaines : nombre d’événements extrêmes, vagues de chaleur dans le monde, précipitations diluviennes, feux de forêts, invasions ou d’extinctions d’espèces, productivité des océans, rendement agricole global, fonte du permafrost…
Toutes les solutions sont envisagées, à l’exception de la manipulation du rayonnement solaires qui a généré le plus de commentaires de la part des experts consultés. Et la plupart des trajectoires compatibles avec une stabilisation à 1,5 °C des températures mentionnent les techniques "d’extraction de CO2 de l’atmosphère" comme inéluctables, précise Valérie Masson-Delmotte.

  • 5 000 publications citées


Le travail du Giec consiste en une évaluation des publications scientifiques portant sur le sujet, et diffusées avant le 15 mai dernier. Ainsi, ce sont 5 000 références qui sont citées dans le rapport avec un vocabulaire dit "calibré", qui précise le niveau de confiance en termes de probabilité qu’on peut attribué à chacune des études.
Le premier jet du document a reçu 13 000 commentaires de 489 experts, et le second jet, 25 590 commentaires de 570 experts. Des records ! Enfin, le résumé pour dirigeants, qui doit être approuvé cette semaine, a reçu 3 600 commentaires sur la version préliminaire émanant de 60 gouvernements. Tous ci seront publiés en annexe du rapport.

  • 86 auteurs


Si les sources sont foisonnantes, le nombre d’auteurs l’est tout autant. Sur 560 candidats, 86 scientifiques de 39 pays ont été sélectionnées pour participer à ce travail titanesque. 38 % sont des femmes et 51 % sont originaires de pays en développement, un ratio particulièrement exemplaire.
La France compte quatre auteurs. La palme revient aux États-Unis avec sept citoyens. Cette place interpelle alors que le Président américain, Donald Trump, n’hésite pas à afficher son climato-scepticisme. "Les États-Unis pourraient soutenir la science, comme ils l’ont fait dans le passé, ou se mettre à faire de l’obstruction", dit un auteur sous couvert d’anonymat. "Toutefois, souligne Valérie Masson-Delmotte, quand un pays n’est pas d’accord, son nom est inscrit en bas de page et il est rare qu’un gouvernement accepte d’être ainsi épinglé." 
La validation du rapport du Giec, qui se fait par consensus, promet de longues discussions. D’ores et déjà, l’hebdomadaire britannique The Observer soutient que plusieurs éléments caractérisant la gravité des impacts du changement climatique auraient disparu du document pour qu’il soit "accepté" par des pays tels que l’Arabie Saoudite, l’Australie ou les États-Unis.
Concepcion Alvarez, @conce1

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