Ministère de l’Intérieur. Une passation sans émotion entre Édouard Philippe et Gérard Collomb
C’est fait. Gérard Collomb n’est plus ministre de l’Intérieur. Il a laissé sa place ce mercredi matin au Premier ministre Édouard Philippe, qui assure l’intérim. La passation s’est déroulée sous le signe de l’improvisation, place Beauvau, dans une atmosphère glaciale.
Plus de quinze minutes à attendre. La passation était prévue à 9 h 15 ce mercredi 3 octobre, mais elle a en réalité commencé à 9 h 35. La faute au Premier ministre Édouard Philippe, arrivé en retard, laissant un Gérard Collomb seul pendant presque vingt minutes sur le perron du ministère de l’Intérieur place Beauvau.
Lors d’une passation de pouvoir sans chaleur et placée sous le signe de l’improvisation, Édouard Philippe, au visage impassible, a salué « la culture, le caractère direct de l’expression » du ministre. Sans desserrer les dents, le Premier ministre, qui a dû annuler son déplacement prévu en Afrique du Sud, a également fait part de la « détermination » de l’exécutif « d’assurer le plus haut niveau de sécurité aux Français ».
Poignée de main polaire
Avant une poignée assez polaire avec son successeur provisoire, Gérard Collomb a dit quitter « avec regret » un ministère « apaisé », tout en dressant un tableau sombre de la situation sécuritaire dans le pays.
« Lorsque je suis arrivé, les choses n’étaient pas forcément faciles et on avait connu quelque temps avant une révolte de la police. Aujourd’hui je quitte un ministère apaisé et qui a su impulser un certain nombre de réformes mais il en reste bien d’autres à réaliser », a souligné le ministre démissionnaire.
Il a notamment insisté sur la situation « très dégradée » des quartiers difficiles. « Le terme de reconquête républicaine prend dans ces quartiers tout son sens. […] Il faut assurer la sécurité dans ces quartiers mais il faut fondamentalement les changer. Quand les quartiers se paupérisent, se ghettoïsent, il ne peut y avoir que des difficultés », a-t-il mis en garde.
Il a aussi rappelé son attachement aux personnes qui travaillent pour la sécurité des Français comme en témoigne ce tweet diffusé par le ministère de l’Intérieur.
Le désormais ex-premier flic de France a également félicité les forces de l’ordre pour l’arrestation dans la nuit du braqueur récidiviste Redoine Faïd. S’attirant les sarcasmes de Marine Le Pen sur le « beau doublé » de Gérard Collomb qui « endosse l’arrestation de l’évadé le plus célèbre et réussit sa propre évasion du gouvernement ».
Le Premier ministre a pour sa part salué sobrement « la très grande culture » de Gérard Collomb et le « caractère direct de l’expression ». « Nous vivons une époque difficile avec des menaces, à l’extérieur de notre territoire et parfois sur notre territoire […]. Il nous appartient à nous tous d’être à la hauteur de la tâche pour donner aux Français ce qu’ils attendent : la confiance, la sécurité, l’espoir et l’envie de faire vivre notre pays », a-t-il dit.
L’intégralité de la passation de pouvoir est visible dans une vidéo postée sur le compte Facebook du ministère de l’Intérieur.
Un Conseil des ministres sans n° 2
Cette passation met fin au feuilleton de la démission de Gérard Collomb remise deux fois en quarante-huit heures. Après la démission de François Bayrou en juin 2017 et celle de Nicolas Hulot en septembre, Emmanuel Macron perd ainsi son troisième ministre d’État depuis son arrivée à l’Élysée.
Le Conseil des ministres, ce mercredi 3 octobre, se déroulera donc sans Gérard Collomb autour de la table, actant définitivement la rupture entre Emmanuel Macron et ce soutien de la première heure, longtemps considéré comme un « fidèle parmi les fidèles ».
La nomination provisoire d’Édouard Philippe à l’Intérieur souligne la difficulté pour l’exécutif de trouver un remplaçant à Gérard Collomb à ce poste stratégique. « Pour remplacer le numéro 2 du gouvernement, il faut une stature avec si possible un ancrage territorial », indique une source gouvernementale.