«Même les poulets ne sont pas massacrés comme ça»

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Irak«Même les poulets ne sont pas massacrés comme ça»

Plusieurs femmes au mode de vie occidental ont connu une mort brutale ces dernières semaines. Les Irakiennes, terrifiées, sont nombreuses à se retirer de la vie publique.

Tara Farès a été assassinée fin septembre à Bagdad. Avant elle, trois femmes publiquement actives sont décédées dans des circonstances parfois troublantes.

Tara Farès a été assassinée fin septembre à Bagdad. Avant elle, trois femmes publiquement actives sont décédées dans des circonstances parfois troublantes.

L'assassinat à Bagdad de Tara Farès, influenceuse et mannequin de 22 ans, provoque une vague de panique chez les jeunes Irakiennes au mode de vie dit «occidental». Beaucoup d'entre elles, terrifiées à l'idée de connaître le même sort que leur compatriote, ont décidé de se retirer de la vie publique. Il faut dire qu'avant Tara, trois autres femmes ont trouvé la mort dans des circonstances parfois troublantes. Et la psychose va grandissant.

Le 17 août, la doctoresse Rafeef al-Yassiri, une chirurgienne plastique surnommée «la Barbie d'Irak» qui avait l'habitude de poster des photos d'elle sur les réseaux sociaux, est décédée mystérieusement.

Dans un premier temps, les autorités avaient annoncé que le médecin de 32 ans était décédée d'une overdose, rappelle le «Daily Mail». Mais depuis un mois, aucune nouvelle information n'a été communiquée à ce sujet, et des rumeurs font état d'un possible empoisonnement.

Une semaine plus tard, Rasha al-Hassan, propriétaire d'un salon de beauté au centre de Bagdad, a été retrouvée morte chez elle.

Officiellement, la jeune femme a succombé à une crise cardiaque. Enfin, le 25 septembre, soit deux jours avant l'assassinat de Tara Farès, Suad al-Ali a été abattue à Basra (sud).

Une vidéo circulant sur les réseaux sociaux montre un individu tirer sur cette défenseure des droits de l'homme alors qu'elle entrait dans sa voiture.

Aujourd'hui, Shimaa Qasim est terrifiée. Cette ancienne miss Irak de 23 ans dit avoir reçu des menaces de mort de personnes l'avertissant: «Tu es la prochaine.» Dans une vidéo publiée la semaine dernière sur Instagram, l'ex-reine de beauté a partagé sa peur. «Même les poulets ne sont pas massacrés comme ça», explique-t-elle, en larmes, à ses 2,7 millions de followers.

«Nous sommes célèbres, mais nous ne sommes pas des prostituées comme certains disent. Nous sommes des gens qui faisons passer la voix du peuple à la télé. Nous sommes des professionnelles des médias. Nous faisons passer des messages. Et puis quelqu'un arrive et dit: C'est une prostituée, tuez-la», témoigne Shimaa.

Les jeunes Irakiennes sont-elles condamnées à se murer dans le silence? «Toutes les femmes qui entrent dans la vie publique sont des cibles, Farès avait plus de 2 millions d'abonnés. Toutes les femmes qui ont été tuées étaient courageuses, ambitieuses et avec de fortes personnalités», explique à BuzzFeed Hanaa Edwar, défenseure des droits de la femme à Bagdad.

A l'image de Shimaa Qasim, beaucoup d'Irakiennes préfèrent se mettre en retrait plutôt que de finir assassinées. «Il y a tant de femmes d'affaires à Basra qui arrêtent de travailler; des jeunes femmes dans les médias se cachent; certaines désactivent ou changent leur compte sur les réseaux sociaux. D'autres ont déménagé et font profil bas», poursuit Mme Edwar.

Safaa Nasser, styliste irakienne, affirme qu'un réseau organisé est derrière ces actes prémédités. Elle aussi, a fait le choix de changer de vie par mesure de sécurité. «Mes filles et moi-même sortons moins, et nous restons éloignées du monde de la mode. Il y a des gens qui refusent que l'Irak se développe ou que les femmes soient visibles. Ils veulent nous ramener en arrière», témoigne-t-elle.

(joc)

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