Des climatologues ont montré pour la première fois que la saison des ouragans est plus intense si la surface de l'océan Atlantique est plus chaude. Cela pourrait confirmer une prévision des modèles climatiques pour le réchauffement de la planète. Nos explications.

LA NIÑA

L'an dernier, la saison des ouragans a été particulièrement intense : dix ouragans, dont six « intenses », de catégories 3 à 5, alors que normalement, il n'y a que six ouragans, dont deux ou trois intenses. Les climatologues ont d'abord pensé à l'influence du phénomène météorologique La Niña dans l'océan Pacifique, souvent associé à une telle intensité. Une nouvelle étude montre que ce n'est pas le cas. « Nous sommes les premiers à montrer que l'accroissement de la température de surface de l'océan Atlantique est directement lié à l'intensité de la saison des ouragans », explique Hiroyuki Mirakami, de l'Administration océanographique et atmosphérique des États-Unis (NOAA), l'auteur principal de l'étude publiée à la fin de septembre dans la revue Science. « Notre modèle montre que le phénomène se reproduira de plus en plus avec le réchauffement de la planète. »

L'ATMOSPHÈRE

Kerry Emmanuel, climatologue au Massachusetts Institute of Technology, est le « père » de la théorie voulant que les changements climatiques fassent augmenter l'intensité des ouragans - il a prévu le coup dès 1987 dans la revue Nature. Il est d'accord avec la conclusion générale de M. Mirakami quant à l'avenir, mais précise que la température de surface n'est pas la variable la plus importante dans l'équation. « Il faut aussi voir la différence entre la température de surface de l'Atlantique et celle de l'atmosphère, jusqu'à une altitude de 16 kilomètres », explique M. Emmanuel en entrevue depuis Paris. « Les variations naturelles de la température de surface de l'Atlantique sont beaucoup plus importantes que ce qu'on verra avec les changements climatiques. L'an dernier, l'air au-dessus de l'Atlantique était anormalement frais. Si on voit une augmentation de la température de l'air avec les changements climatiques, ça pourrait contrer celle des eaux de surface, au niveau de l'intensité des ouragans. Mais il est vrai que les modèles prévoient cela. »

LE RECORD DE 2005

En août, dans la revue Science Advances, le climatologue québécois Louis-Philippe Caron, du Centro nacional de supercomputación à Barcelone, a conclu que le nombre maximal d'ouragans de la saison 2005, 15, ne serait probablement pas dépassé avec les changements climatiques, parce qu'il s'agit d'un maximum absolu pour la région. N'est-ce pas en contradiction avec l'étude de M. Mirakami ? « Non, parce qu'il peut y avoir plus d'ouragans intenses sans qu'on augmente le nombre total d'ouragans, dit M. Caron. On pourrait très bien avoir sept ou huit ouragans intenses par saison, sans avoir un nombre maximum d'ouragans plus élevé. »

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EN CHIFFRES

28: Nombre de tempêtes tropicales en 2005

15: Nombre d'ouragans en 2005

7: Nombre d'ouragans de catégorie 3 à 5 en 2005

17: Nombre de tempêtes tropicales en 2017

10: Nombre d'ouragans en 2017

6

Nombre d'ouragans de catégorie 3 à 5 en 2017

Sources : Science, Science Advances