Climat : les Pays-Bas épinglés par la justice pour leur manque d'ambition
Accusé d'en faire trop peu par les ONG, le gouvernement néerlandais vient de se voir sommé de réduire ses émissions de gaz à effet de serre d'au moins 25 % d'ici 2020 par la justice du pays.
Par Joël Cossardeaux
Le gouvernement néerlandais vient de prendre un nouveau coup de règle sur les doigts pour les insuffisances de sa politique climatique. La Cour d'appel de La Haye l'a débouté, ce mardi, de son action en appel contre un jugement de 2015 le condamnant à réduire de 25 % en 2020 les émissions de gaz à effet de serre (GES) du pays.
Un taux de réduction bien supérieur à l'objectif de baisse de 17 % fixé par le gouvernement libéral de Mark Rutte, en place depuis 2010, et contre lequel la fondation écologiste Urgenda avait lancé une vaste offensive juridique. La « class action » qu'elle avait engagée au nom de près de 900 Néerlandais, demandait à La Haye de prendre des mesures pour réduire les émissions de CO2 aux Pays-Bas de 40 % d'ici à 2020, par rapport aux niveaux de 1990.
Les ONG à la manoeuvre
La justice n'est pas allée aussi loin que cette ONG. Elle n'en considère pas moins, dans un communiqué, que « compte tenu des grands dangers qui risquent de se produire, des mesures plus ambitieuses doivent être prises à court terme pour réduire les émissions de gaz à effet de serre afin de protéger la vie et la vie familiale des citoyens néerlandais ».
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Ce jugement vient en écho de Climat : les experts du Giec appellent à des mesures sans précédent pour éviter le pire, le groupe d'experts mandatés par les Nations unies pour évaluer l'évolution du climat et ses impacts. Son dernier rapport ne voit pas d'autre choix que de réduire de 45 % environ en 2030 par rapport à 2010 les émissions mondiales de CO2 pour tenir le cap de +1,5 degré en 2100.
Les Pays-Bas ont du pain sur la planche. L'an dernier, les émissions de GES n'ont été inférieures que de 13 % au niveau de 1990. Un mauvais score mais qui n'est pas le pire en Europe comme l'a plaidé, en vain, le gouvernement de La Haye.
La décision de la justice hollandaise pourrait faire jurisprudence. C'est du moins ce qu'espèrent les ONG. « Ce jugement met en garde les gouvernements du monde entier. En Irlande, en Belgique, en Suisse, en Norvège et aux Etats-Unis, les citoyens ordinaires se tournent déjà vers les tribunaux pour protéger leurs droits humains face aux changements climatiques dévastateurs », estime Tessa Khan, du Climate Litigation Network.
D'autres jugements à venir
Le rapport du Giec, est pain béni pour les bataillons d'avocats qui travaillent sur les responsabilités des Etats, mais aussi des entreprises, dans le changement climatique. « Les juristes vont sans doute mettre à profit ses conclusions pour lancer de nouvelles poursuites », indique un expert des enjeux climatiques.
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D'autres plaintes du même type suivent leur cours, notamment celle déposée par 11 familles de différents pays de l'Union européenne, avec le soutien d'ONG, contre les institutions communautaires accusées de ne pas faire le nécessaire pour protéger les citoyens des dangers du réchauffement. Ces familles ont publié ce mardi une lettre ouverte aux leaders européens les exhortant à mettre en place des politiques climatiques plus efficaces.
Le gouvernement hollandais, pour sa part, a annoncé mardi étudier un éventuel recours en cassation, tout en promettant d' « exécuter la décision » de la Cour d'appel. Mais l'objectif de réduire de 25 % les émissions de CO2 d'ici 2020 par rapport à 1990, est « atteignable », a-t-il prévenu.
Joël Cossardeaux