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Économie

Golden visas : un rapport dénonce le scandale des passeports européens à vendre

Deux ONG, Transparency International et Global Witness, ont publié un rapport sur les "golden visas" attribués, dans des conditions opaques, à des milliers de riches étrangers, souvent russes ou chinois.

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Malte

L'île de Malte est l'un des principaux "vendeurs" de passeports européens. 

(c) AFP

Haro sur les "golden visas". Le dossier sulfureux des passeports à vendre figure en tête de liste de l’agenda européen depuis l’assassinat, en octobre 2017, de la journaliste maltaise Daphne Caruana Galizia, qui enquêtait sur le sujet. En attendant un rapport de la Commission européenne, deux ONG, Transparency International et Global Witness, viennent de dresser un premier panorama d’ensemble du phénomène. Au cours de la dernière décennie, des dizaines de milliers de riches étrangers ont ainsi acquis la nationalité ou la résidence d’un pays européen, moyennant un "investissement" allant de 250.000 à 10 millions d’euros.

Le mécanisme est relativement simple: les candidats se voient décerner un "golden visa" en échange d’un investissement souvent "passif" dans des obligations d’Etat, des actions d’entreprises locales ou surtout dans de l’immobilier. Et ce sans être véritablement obligés de justifier leur présence physique sur place. Douze pays dont la France octroient des permis de résidence tandis que quatre Etats, Chypre, Malte, la Bulgarie et l’Autriche, vont jusqu’à vendre leur nationalité. Le "prix" du titre de séjour tourne en moyenne autour de 900.000 euros.

Le premier programme de ce type était apparu dans les années 1980, sur la petite île de Saint-Kitts-et-Niévès dans les Caraïbes, avant de se propager à l’Amérique du Nord, puis à l’Europe après la crise financière. En dix ans, le Vieux continent a ainsi accueilli 6.000 nouveaux citoyens et 100.000 résidents et membres de leur famille, pour des flux financiers cumulés de 25 milliards. La majorité des nouveaux "venus" sont des ressortissants chinois ou russes. Selon les ONG, ces programmes se caractérisent par une absence totale d’harmonisation au niveau européen et un déficit flagrant de transparence et de contrôle dans les procédures d’attribution. D’où les risques d’accueillir des individus corrompus, cherchant à blanchir leur argent ou à échapper à des poursuites dans leur pays.

Une journaliste assassinée à Malte

Transparency et Global Witness ont choisi de s’attarder sur certains pays très problématiques. Le premier, Chypre, engrange 914 millions d’euros par an (6% de son PIB!) grâce à ce programme. L’île a déjà décerné plus de 3.000 passeports, en particulier à des ressortissants de l’ex-bloc communiste comme le magnat russe de l’aluminium Oleg Deripaska, proche de Vladimir Poutine. Le Guardian a notamment révélé que deux oligarque ukrainiens, accusés d’avoir détourné 4,5 milliards d’euros de leur banque, n’ont eu aucun mal à obtenir leur "golden visa". Le rapport cite aussi le cas de Rami Makhlouf, un cousin de Bachar El Assad, sanctionné par les Américains pour corruption, qui a obtenu son passeport en 2010, avant de le voir révoqué en 2013. Chypre a fini par introduire des réformes visant à renforcer les contrôles en août 2018, mais les ONG doutent de leur efficacité.

Autre cas emblématique: Malte, qui compte parmi ses ressortissants Vadim Vasilyev, le vice-président russe du club de foot de l’AS Monaco. Trois de ses compatriotes ayant obtenu la citoyenneté maltaise en 2015, sont accusés d’avoir versé de l’argent au chef de cabinet de l’actuel Premier ministre Joseph Muscat. La journaliste Daphne Caruana Galizia travaillait notamment sur ce dossier lorsqu’elle a été tuée dans l’explosion de son véhicule, près de son domicile. Un meurtre qui a conduit un collectif de médias, dont fait partie Le Monde, à lancer le "Projet Daphne", visant à poursuivre ses enquêtes.

Des grands pays de l'Union sont également dans le collimateur des associations, comme le Portugal, qui a octroyé des titres de résidence à des cadres brésiliens impliqués dans le scandale de corruption lié à la compagnie pétrolière Petrobras. Le Royaume-Uni, qui récolte près de 500 millions par an, est aussi épinglé. Jusqu’en 2015, les candidats pouvaient obtenir leur "golden visa" avant même d’avoir ouvert un compte dans le pays. Résultat: les banques ne vérifiaient pas l’origine des fonds, croyant que le ministère de l’Intérieur avait déjà procédé aux contrôles, ce qui n'était pas le cas. Il a fallu attendre l’affaire Skripal, du nom de cet ex-espion russe passé au service du MI-6 britannique, empoisonné sur le sol anglais début 2018, pour que le gouvernement se décide à renforcer les contrôles.

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