La maltraitance des enfants laisserait des "cicatrices moléculaires" dans l'ADN des victimes

DNA molecule ©Getty
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Le journal aborde la question de la maltraitance des enfants, qui laisserait des "cicatrices moléculaires" dans l'ADN des victimes, des prédispositions génétiques à la trans-identité. Mais aussi les orques en danger d’extinction, ou encore la lettre perdue de Galilée.

C’est une étude qui fait grand bruit outre-Atlantique. Cette recherche s’est basée sur un petit échantillon : sur trente-deux hommes, dix-sept d’entre eux ont déclaré avoir été victimes de violence durant leur enfance et deux, d’abus sexuel. L'ADN des échantillons de leur sperme a été analysé et comparé. 

Les scientifiques ont examiné un processus chimique appelé méthylation et ils ont trouvé des différences notables qui sembleraient distinguer les victimes des non-victimes. Les marques de méthylation sur l'ADN : c’est cela qu’on appelle "cicatrices moléculaires". La méthylation agit comme un "variateur" sur les gènes.

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Andrea Roberts, spécialiste des troubles traumatiques à l’université d’Harvard, a dirigé cette étude. Elle développe ainsi : 

Comment cela est-il possible ? Eh bien c’est une excellente question ! Nous savons que les gens qui ont subi des traumatismes ont des risques de développer des problèmes mentaux et physiques par la suite, ce qui inclut maladies cardiovasculaires et maladies immunitaires. La question qui se pose alors est de savoir comment ce traumatisme peut passer sous la peau pour affecter la biologie même des individus. Un échantillon d’hommes était volontaire pour donner leur sperme, ce qui nous a permis d’examiner les marqueurs génétiques. En nous focalisant sur certains gènes, nous en avons trouvé un qui était lié à la fonction immunitaire et une poignée d’autres liés au fonctionnement cérébral. Et il se trouve que le marquage génétique était différent sur ces deux types de gènes. Il y a plusieurs façons de contrôler l’expression d’un gène, et nous pensons que ces différentes façons interagissent ensemble. La méthylation est une des possibilités, et c’est ce que nous avons observé. Il se peut aussi que des histones soient modifiées et il y a encore d’autres mécanismes biologiques régulatoires. Nous ne comprenons pas vraiment comment la méthylation de l’ADN peut passer dans l’ovule. Nous savons que cela arrive, mais la majorité des groupements méthyles ne restent pas. Nous avons étudié un mince échantillon de personnes,  c’est une petite étude, nous n’avons observé que trente-deux hommes, la prochaine étape sera de reproduire cela à une plus grande échelle.

En soulignant que c’est une cohorte limitée, les auteurs de cette étude prennent eux-mêmes des précautions. Elle est d’ailleurs considérée comme une étude pilote. Pour l'approfondir, il faudrait un plus grand échantillonnage. Il faut aussi prendre en compte les effets annexes tels que les modes de vie de ces individus qui auraient pu influencer ces marques épigénétiques. Rappelons en effet que dès le développement embryonnaire, l’épigénome est naturellement modifié au cours de nos vies. 

On écoute le contrepoint  de Claire Rougeulle, épigénéticienne et directrice de recherche au CNRS :

La particularité de l’étude, c’est de regarder ces cicatrices au niveau du sperme avec les conséquences qu’on peut imaginer que ce trauma et ces cicatrices ont peut-être transmis à la génération suivante. C'est une question brûlante dans l’épigénétisme, c’est là où il faut être extrêmement prudent. Cela est biologiquement intéressant, d’un point de vue sociétal, cela est passionnant : est-ce que notre mode de vie laisse des cicatrices sur notre ADN des années après l’exposition à divers constituants ? C’est quelque chose qui a été démontré dans certaines espèces, chez les plantes, les vers… Chez l’homme et le mammifère en général, c’est controversé car les marques génétiques qui s’installent dans notre ADN, en particulier dans les cellules sexuelles, sont amenées à être totalement nettoyées au moment de la fécondation, au moment de la préparation de la génération future. Se pose donc la question de ce qui peut être transmis, dans la mesure où il y a un grand nettoyage qui est fait pour éviter l’accumulation de ces cicatrices.  

Le CNRS  sanctionne deux de ses directeurs de recherche pour méconduites scientifiques

Jeudi, le CNRS a sanctionné deux de ses directeurs de recherche : Patrick Dunoyer et Olivier Voinnet, pour "méconduite scientifique". Cette expression renvoie à un manque d’intégrité scientifique, une fraude, un plagiat ou un trucage. Dans les dernières publications de Patrick Dunoyer et Olivier Voinnet, l’enquête a révélé des anomalies : des manipulations d’images. Olivier Voinnet avait déjà été sanctionné il y a deux ans.

Le trou dans le vaisseau Soyouz n'est pas un défaut de fabrication 

On en sait plus sur le trou de deux millimètres découvert en août dans la coque de Soyouz, le vaisseau actuellement amarré à la Station spatiale internationale. La commission d'enquête vient d’écarter la piste du défaut de fabrication. L'agence spatiale russe Roscosmos soupçonne les États-Unis d’un acte de sabotage, à coups de perceuse. La NASA a démenti mercredi. Le dossier reste ouvert et une sortie dans l'espace est prévue en novembre pour collecter plus d'informations. 

Il y aurait des prédispositions génétiques à la trans-identité

En Australie, des scientifiques du Hudson Institute de Melbourne viennent de publier leur étude, montrant qu'il y aurait des prédispositions génétiques à la Trans-identité. C’est la plus grande étude mondiale à ce sujet. Pour cette étude génomique, l’équipe australienne a mobilisé  380 femmes transgenres et a comparé leur ADN à celui de 344 hommes témoins, pour observer les variantes génétiques. Les résultats suggèrent que les raisons des conflits personnels sur l'identité de genre pourraient résider dans l'ADN de chacun. 

Il faut bien employer le conditionnel parce que cette étude n’est qu’un premier éclairage sur ce phénomène. Pour rappel, la dysphorie de genre concerne cinq hommes sur mille et trois femmes sur mille, donc ce n’est pas un phénomène exceptionnel.  

Ségolène Aymé, généticienne et directrice de recherche à l’INSERM, nous explique la particularité de cette étude et de ces résultats :

On savait aussi que la génétique jouait parce que on a étudié le phénomène de transgenre chez les jumeaux : quand les jumeaux sont monozygotes, c’est-à-dire le même génome au départ, quand il y en a un qui est transgenre il y a 30% de chances que l’autre le soit aussi. Ce n’est pas complètement déterminé par la génétique, mais ça l’est en partie. La grande puissance de cette étude est d’avoir investigué des gènes qu’on n’avait pas regardés par ailleurs : douze gènes qui sont forcement associés à ce qu’on appelle le système de signalisation des hormones sexuelles. Ils ont comparé les variantes dans les deux populations, et ils ont trouvé qu’il y a des variations statistiquement significatives à ses gènes. Certaines des variantes qu’ils ont trouvées sont aussi à l’origine d’une diminution de la minéralisation des os, un phénomène attribué au sexe féminin. Un gène étudié est lié au risque du cancer de la prostate et là donc le risque est diminué avec ce variant qu’ils ont. Donc tout ça fait sens ! Ça montre que tous ces petits éléments sont bien liés à l’identité féminine biologique. Ce qui est certain, c’est que ces petits effets cumulés, hypothétiquement, peuvent faire basculer un mécanisme.

Les orques sont en grand danger d’extinction

Les orques sont en grand danger d’extinction selon une étude assez alarmiste parue cette semaine dans la revue Science. La moitié des orques risque de disparaître d’ici trente à quarante ans. En cause : les  PCB (polychlorobiphényles), cette substance extrêmement polluante que l’on trouve dans le plastique, l’huile ou la peinture. Dans la plupart des pays, sa production est interdite depuis 2001. Reste que les PCB sont encore très présents dans nos océans via les déchets plastiques, et que les orques en absorbent massivement.

Les Prix Nobel scientifiques de 2018

C’était la folle semaine des Prix Nobel : un retour sur ses lauréats scientifiques de cette édition 2018.

Cette année, le Prix Nobel de médecine a été remis à l’américain James Allison et au japonais Tasuku Honjo pour leurs travaux sur l’immunité anticancéreuse. 

Le Nobel de physique a été remis à l’américain Arthur Ashkin, au français Gérard Mourou et à la canadienne Donna Strickland, son binôme. C’est leur recherche sur le laser qui a été récompensée. 

Le Nobel de Chimie a récompensé le britannique Gregory Winte, l’américaine Frances Arnold et son compatriote George Smith. Leurs travaux portent sur les enzymes et les anticorps. 

On peut saluer l’effort de féminisation cette année avec ces deux lauréates scientifiques, sachant que l’académie des Nobels était encore très critiquée l’an dernier pour l’absence totale de femmes dans sa sélection.

La Méthode scientifique
58 min

La lettre perdue de Galilée

On la croyait perdue à tout jamais : on vient de retrouver dans la bibliothèque de la Royal Society à Londres, la lettre historique de Galilée. Celle dans laquelle l’astronome dénonce la doctrine de l’Église, selon laquelle le soleil est en orbite autour de la Terre. C’est la lettre originale et y on voit que Galilée lui-même a raturé et retouché ses propos, en a atténué certains afin de ne pas froisser l’Inquisition. Il y dit que la recherche scientifique est incompatible avec la Bible. Ce texte de 1613 est considéré comme l’un des premiers manifestes laïcs sur la liberté de la science.

La 27e édition de la Fête de la science

La Fête de la science aura lieu du 6 au 14 octobre 2018, partout en France. La thématique de cette année : les fausses informations et les idées reçues. France Culture sera présent le 6 octobre au forum Les idées claires organisé à la Sorbonne à Paris à partir de 9h.

Comment distinguer un humain d'une IA ?

Pour cette rubrique d’ « Improbablogie », les chercheurs de l‘Institute of Technology du Massachusetts se sont interrogés sur la distinction entre un humain et un robot lors d’une conversation à l’aveugle.

C’est un peu un test de Turing version 2018 réalisé avec 2000 volontaires. La question posée était la suivante : si vous deviez prouver que vous n’êtes pas un robot et que vous n’aviez droit qu’à un mot pour convaincre de votre humanité, quel serait ce mot ? 47% des participants se sont tourné vers l'émotion, avec en première place le mot "amour".

Dans un second temps de l’étude, on a montré aux participants plusieurs mots en leur demandant quel était celui qui à coup sûr avait été prononcé par un humain et massivement ils ont choisi le mot "caca".

Cela a d’abord déconcerté les chercheurs avant de finalement faire sens : "caca" est un mot tabou, primaire et organique, qui est aussi le signe d'un certain sens de l'humour. L’étude cherchait surtout à mieux définir comment nous nous percevons en tant qu’espèce. 

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