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Corentin de Chatelperron, le navigateur à la pêche aux inventions low-tech

Planète
Corentin de Chatelperron à bord de Nomade des mers. © Sanjit Das / Panos Réa / GEO.

A bord de son labo flottant, Corentin de Chatelperron, un ingénieur fana du système D, sillonne les mers pour dénicher des inventions écologiques. Avec l’espoir d’en faire profiter la Terre entière.

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Nous l'avions rencontré en 2018 pour GEO Aventure. Après six années autour du monde, 25 pays et plus de 50 innovations étudiées, il sera de retour le 25 juin prochain à 16H à Concarneau, son port d'attache. Date qui marquera aussi le lancement de neuf jours de festivités et l'ouverture du festival Low-tech Lab qui se tiendra jusqu'au 3 juillet. Objectif : sensibiliser, expérimenter, découvrir et partager les découvertes du Nomade des Mers ainsi que celles des projets du Low-tech Lab depuis sa création en 2013. Nous republions ici le portrait de ce capitaine écolo.

Monter à bord de Nomade des mers, c’est comme pénétrer dans l’antre d’un savant fou. Bombonnes pleines de liquide verdâtre, bassines grouillantes d’insectes, machines étranges, entrelacs de fils électriques… Le tout au milieu d’une végétation surgie de tubes en PVC et du caquètement des poules. Un marin à cheval sur l’ordre et la propreté perdrait sans doute la boussole face à un tel capharnaüm ! Mais si l’on en croit Corentin de Chatelperron, le capitaine de ce drôle de rafiot, rien dans ce désordre apparent n’est laissé au hasard, et chaque objet a sa place et son utilité.

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EN IMAGES
Les inventions simples et écolos de Corentin de Chatelperron

Parti de Concarneau (Finistère), le 23 février 2016 à bord de son catamaran, ce Breton de 34 ans a entrepris un tour du monde de trois ans à la recherche de bricoleurs de génie. L’objet de sa quête : apprendre à mieux faire avec moins. A l’heure où les laboratoires se concentrent sur le high-tech, cet ingénieur diplômé de l’Institut catholique d’arts et métiers de Nantes a décidé de promouvoir les low-tech, des technologies réalisées à partir de matériaux de récupération, accessibles à tous et avec un faible impact sur l’environnement.

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Des inventions simples susceptibles d'intéresser des milliers de gens

Corentin n’en est pas à son coup d’essai. En 2009, alors qu’il travaillait sur un chantier naval au Bangladesh, il découvre la fibre de jute, un matériau ultra-solide obtenu à partir de l’écorce de la plante du même nom. Bluffé par le potentiel de cette ressource locale qui peut remplacer la fibre de verre, il développe plusieurs prototypes de navires mélangeant la toile végétale à des matériaux de récupération. Son modèle le plus abouti, Gold of Bengal, un sampan (embarcation asiatique traditionnelle à fond plat) 100 % en jute, voit le jour en 2013. Pour tester la validité de sa création, il embarque seul pour un périple de six mois dans les eaux du golfe du Bengale.

C’est de cette aventure que date sa rencontre avec les low-tech : "Je voulais être autonome et j’ai commencé à me renseigner sur Internet. Je me suis rendu compte qu’il existait des inventions simples susceptibles d’intéresser des millions de gens, mais que rien n’était fait pour les promouvoir."

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Une arche de Noé de la débrouille

Naît alors le projet Nomade de mers : un catamaran de 14 mètres de long qui se veut à la fois le laboratoire et l’ambassadeur de ces innovations. Parti avec trois poules, un réchaud à bois, des haricots secs et un élevage de vers de farine pour l’apport en protéines, cette arche de Noé de la débrouille s’est enrichie au fil des escales de technologies glanées auprès d’inventeurs locaux : une éolienne venue du Sénégal, un potager hydroponique inspiré des fermes hors-sol du Cap-Vert, une culture de spiruline (algue microscopique riche en fer et en protéines) embarquée à Madagascar en janvier… Petit à petit, l’habitacle du bateau se transforme en écosystème miniature : les déchets organiques nourrissent les plantes, qui alimentent l’équipage – au minimum l’ingénieur et un skipper –, mais aussi les poules et les vers.

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Le Nomade des Mers, navire de Corentin de Chatelperron pour son projet Low-tech Lab.   © Pierre Frechou

Un monde presque parfait, "mais qui a commencé à sérieusement se dérégler après l’escale malgache", se souvient Corentin. Un rat s’est aventuré dans le bateau pour grignoter les jeunes pousses, la spiruline ne prenait pas, vers et poules refusaient de pondre. "Notre microcosme prenait l’eau de toutes parts." Pour couronner le tout, en février, une tempête brise le mât de Nomade des mers et force l’équipage à s’échouer aux Seychelles.

Stupéfaction des autorités sanitaires à la vue des volatiles, des insectes… et des crottes de rat ! Le bateau est désinfecté, les plantes arrachées, et les gallinacées sacrifiées. A bord, c’est la consternation. Mais Corentin replante aussitôt amarante, blettes, patates douces… Et fabrique un refuge pour que les trois nouvelles poules sauvées d’un élevage industriel se sentent à l’aise : "En cas de mauvais temps, on peut le refermer comme le nid du Marsupilami."

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Des toilettes sèches et une recette de cuisine indienne

Paré, l’équipage reprend la mer et sa collecte d’inventions : un système plus perfectionné pour le four solaire, un déshydrateur de fruits et légumes, un réchaud plus économique… Derrière chacune de ces trouvailles, ce sont des échanges et des rencontres qui, parfois, se prolongent. Il n’est ainsi pas rare que des bricoleurs rencontrés en chemin se joignent à l’aventure.

C’est le cas de Johnny Allen, embarqué sur le catamaran entre l’Inde et le Sri Lanka. "Johnny vit à Auroville, une cité expérimentale créée en 1968 dans le sud de l’Inde par des hippies qui voulaient inventer un monde meilleur, explique Corentin. Ça fait quarante-cinq ans qu’il est là-bas. Niveau low-tech, il est très fort !" Johnny laissera de son passage sur Nomade des mers des toilettes sèches et la recette des idlis, des galettes hypernutritives à base de céréales et de lentilles concassées avec un broyeur à pédales. C’est grâce à ce genre d’inventions que l’équipage approche progressivement du Graal : l’autosuffisance totale.

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Objectif : le Low-tech Lab

"Le plus gros challenge, c’est l’autonomie en eau, surtout quand on traverse des régions où il ne pleut pas. Notre dessalinisateur ne fonctionne que s’il y a du soleil. Il produit de trop faibles quantités pour répondre à notre consommation et à l’arrosage des plantes. On a dégoté en Inde un système qui permettrait de recycler les eaux usées avec du papyrus. On va se pencher sérieusement là-dessus." Tester au fur et à mesure la pertinence et la valeur d’usage des low-tech récoltés, voilà un des objectifs majeurs de l’expédition. Or il n’est pas toujours évident de procéder aux essais tout en naviguant. "Entre les vagues, les coups de vent, les avaries, on est plus préoccupés par le bateau que par notre labo."

Corentin de Chatelperron : nomade des mers en quête d’inventions

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Ça, c'est l’étape finale : le Low-tech Lab, une plate-forme collaborative et digitale, du type Wikipédia, où toutes ces technologies de la débrouille seront documentées sous forme de tutoriels. Sur son site, on trouve déjà des tutos pour se lancer dans la culture de la spiruline, fabriquer son éolienne domestique ou son propre four solaire.

Venir en aide à des millions de personnes

L’ambition de Corentin va encore plus loin. "Nous souhaitons aussi créer des réseaux d’entraide à travers le monde, trouver des ambassadeurs locaux pour accompagner les entrepreneurs et les associations." Loin d’être de simples bricolages, nombre de ces innovations pourraient, Corentin en est convaincu, améliorer le sort de millions de personnes. Ainsi, la spiruline, avec ses qualités nutritionnelles hors du commun, constituerait une réponse efficace à la malnutrition. C’est d’ailleurs dans cet esprit que sa culture a été développée par une entrepreneuse malgache pour remédier aux carences dont souffrent les enfants de l’île.

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"Nous avons rencontré des ONG qui s’intéressent au low-tech pour répondre aux besoins immédiats des populations victimes de catastrophes naturelles", ajoute Corentin. Une idée que cet inépuisable ingénieur aimerait développer. Le capitaine ne cache pas son impatience : "Il nous reste plein de choses à expérimenter, dans le recyclage, la permaculture, la construction et aussi une éolienne qui condense l’humidité de l’air pour produire de l’eau en plein désert !" De quoi continuer à alimenter Nomade des mers et sa caverne d’Ali Baba aux innombrables inventions.

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