Deux personnes ont été emportées dans les flots ce premier week-end de décembre 2019 dans le Var et trois sauveteurs ont péri dans un accident d'hélicoptère près de Marseille. Les épisodes méditerranéens de cette semaine s'ajoutent à une longue liste de catastrophes.
CATASTROPHES. Cannes-Mandelieu, le 3 octobre 2015 : 178 litres par m² en 24h, 20 victimes, 600 millions d’euros de dommages. Draguignan 15 juin 2010, 397 l/m², 25 victimes, 1,2 milliard de dommages. Département du Gard, 8-9 septembre 2002, 543 l/m², 24 victimes, 1,2 milliards de dégâts. Voilà, pour mémoire, les principaux "épisodes cévenols" que le pourtour méditerranéen a subi depuis le début du siècle. On croyait bien connaître la genèse de ces phénomènes météo annuels extraordinairement violents. Les chercheurs réunis au sein du programme international HyMex (Hydrogéolocal cycle in the Méditerranéan expériment) décrivent des enchaînements bien plus complexes. "Plutôt que d’épisodes cévenols, il faudrait désormais parler de phénomène méditerranéen", résume Véronique Ducrocq, chercheuse à Météo France et coordinatrice d’HyMex dont les premiers résultats ont fait l’objet d’une publication en 2018 dans Quarterly Journal of the Royal Meteorological Society.
Le schéma traditionnel, c’est celui de la formation de masses d’air chaudes et humides provenant de la Méditerranée sur les côtes. Ce flux marin se soulève à l’approche des reliefs pour atteindre une altitude où la condensation apparaît. Le cumulo-nimbus se forme, haut de plus de 10 km avec dans les hautes couches de l’atmosphère la formation de glace. L’accumulation d’eau est d’autant plus importante que le cumulo-nimbus reste stationnaire et se recharge avec de nouvelles arrivées d’air humide. Le phénomène était donc baptisé "cévenol" car les départements les plus fréquemment affectés sont le Gard et l’Ardèche où se trouvent le massif des Cévennes.
Des mécanismes de formation différents
Mais comment expliquer ces orages survenant sur le littoral varois ou héraultais, loin des premières pentes ? Les chercheurs d’HyMex détaillent deux autres scénarios. Le premier est celui du soulèvement par dôme d’air froid. Lorsque les couches du cumulo-nimbus les plus proches du sol ne sont pas saturées en humidité, les gouttes de pluie peuvent s’évaporer. Ce faisant, elles refroidissent l’atmosphère, créant une bulle d’air froid au-dessus du sol. C’est cette bulle froide qui va obliger la masse humide et chaude à grimper dans l’atmosphère et alimenter l’orage. Les pluies les plus intenses peuvent ainsi s’accumuler en plaine. C’est ce qui s’est passé dans le Gard en 2002.
L’autre mécanisme, c’est celui du soulèvement par convergence. "En Méditerranée, les vents évitent les reliefs, explique Véronique Ducrocq. On peut ainsi avoir des vents provenant de l’Adriatique via la plaine du Pô ou contournant la Corse qui se rencontrent et soulèvent les masses d’air venues du large". C’est ce qui s’est passé lors de la catastrophe du Var de 2010. Ces phénomènes de convergence se produisent souvent en mer, aussi Météo France vient de s’équiper d’un nouveau radar situé à Ajaccio en Corse qui doit permettre de suivre la formation des cellules orageuses.
L'art difficile de la prévision
ALERTE. Ce samedi 19 septembre 2020, à 14h, Météo France a fait passé en Vigilance Rouge le département du Gard, en Vigilance orange l'Hérault (34) et la Lozère(48). Une forte activité "pluvio-orageuse" s'abat sur le Languedoc.
Cannes-Mandelieu, le 3 octobre 2015 : 178 litres par m² en 24h, 20 victimes, 600 millions d’euros de dommages. Draguignan 15 juin 2010, 397 l/m², 25 victimes, 1,2 milliard de dommages. Département du Gard, 8-9 septembre 2002, 543 l/m², 24 victimes, 1,2 milliards de dégâts. Voilà, pour mémoire, des "épisodes cévenols" que le pourtour méditerranéen a subi depuis le début du siècle. On croyait bien connaître la genèse de ces phénomènes météo annuels extraordinairement violents. Les chercheurs réunis au sein du programme international HyMex (Hydrogéolocal cycle in the Méditerranéan expériment) décrivent des enchaînements bien plus complexes. "Plutôt que d’épisodes cévenols, il faudrait désormais parler de phénomène méditerranéen", résume Véronique Ducrocq, chercheuse à Météo France et coordinatrice d’HyMex dont les premiers résultats ont fait l’objet d’une publication en 2018 dans Quarterly Journal of the Royal Meteorological Society.
Le schéma traditionnel, c’est celui de la formation de masses d’air chaudes et humides provenant de la Méditerranée sur les côtes. Ce flux marin se soulève à l’approche des reliefs pour atteindre une altitude où la condensation apparaît. Le cumulo-nimbus se forme, haut de plus de 10 km avec dans les hautes couches de l’atmosphère la formation de glace. L’accumulation d’eau est d’autant plus importante que le cumulo-nimbus reste stationnaire et se recharge avec de nouvelles arrivées d’air humide. Le phénomène était donc baptisé "cévenol" car les départements les plus fréquemment affectés sont le Gard et l’Ardèche où se trouvent le massif des Cévennes.
Des mécanismes de formation différents
Mais comment expliquer ces orages survenant sur le littoral varois ou héraultais, loin des premières pentes ? Les chercheurs d’HyMex détaillent deux autres scénarios. Le premier est celui du soulèvement par dôme d’air froid. Lorsque les couches du cumulo-nimbus les plus proches du sol ne sont pas saturées en humidité, les gouttes de pluie peuvent s’évaporer. Ce faisant, elles refroidissent l’atmosphère, créant une bulle d’air froid au-dessus du sol. C’est cette bulle froide qui va obliger la masse humide et chaude à grimper dans l’atmosphère et alimenter l’orage. Les pluies les plus intenses peuvent ainsi s’accumuler en plaine. C’est ce qui s’est passé dans le Gard en 2002.
L’autre mécanisme, c’est celui du soulèvement par convergence. "En Méditerranée, les vents évitent les reliefs, explique Véronique Ducrocq. On peut ainsi avoir des vents provenant de l’Adriatique via la plaine du Pô ou contournant la Corse qui se rencontrent et soulèvent les masses d’air venues du large". C’est ce qui s’est passé lors de la catastrophe du Var de 2010. Ces phénomènes de convergence se produisent souvent en mer, aussi Météo France vient de s’équiper d’un nouveau radar situé à Ajaccio en Corse qui doit permettre de suivre la formation des cellules orageuses.
L'art difficile de la prévision
Ces différents modes de naissance ne facilitent pas la tâche des prévisionnistes. Ceux-ci faisaient déjà face à de nombreuses difficultés. Le pourtour méditerranéen est étroit et le phénomène est très localisé. Les échelles spatiales sont donc nombreuses. "L’échelle du phénomène météo global est d’une centaine de kilomètres pour une durée de dix heures, mais l’effet se concentre sur des cumulo-nimbus de quelques kilomètres pour une durée de vie de 30 minutes à 1 heure, lesquels sont nourris de turbulences leur donnant une forme de chou-fleur de quelques mètres et durant quelques secondes, enfin la microphysique des gouttes de pluie est de l’ordre du micromètre pour une durée d’un millième de seconde", énumère Véronique Ducrocq. Ainsi, s’il est possible de prévoir une situation orageuse quelques jours à l’avance, la localisation, l’heure et la durée du phénomène violent ne peut être données que quelques heures auparavant. De même, le fait que la température de la Méditerranée soit de 1 à 2 degrés supérieure à la normale n'implique pas nécessairement un automne à orages violents.
Pour affiner ses prévisions, Météo France exploite depuis quelques années le modèle Arome qui permet de donner une prévision fine sur des portions de territoires de 1,3 kilomètre de côté. En 2012, les 400 scientifiques du programme HyMex ont collecté des centaines d’observations sur les pluies intenses méditerranéennes. Ces données ont permis de multiplier jusqu’à 12 les scénarios d’un même épisode orageux, les prévisionnistes pouvant ensuite les faire converger pour choisir l’évolution la plus probable. Cette nouvelle méthode est aujourd’hui en test et les prévisionnistes se forment à ces nouvelles techniques. "Nous espérons ainsi donner des informations bien plus précises sur les territoires qui seront réellement impactés par les pluies intenses, bien en dessous de l’échelle du département et à des pas de temps plus courts", assure Alain Soulan, directeur général adjoint de Météo France. L'organisme vient d'ailleurs d'acquérir un supercalculateur qui va permettre dès 2020 d'affiner la prévision et de gagner une à deux heures précieuses pour organiser les secours.
Fournir des informations en temps réel
Car l’anticipation est cruciale pour réduire le nombre de victimes et diminuer les destructions de biens. L’application mobile de Météo France donne des informations en temps réel aux citoyens, précisant ainsi les risques encourus au-delà de la simple carte de vigilance météo aujourd’hui entrée dans les mœurs. Bien informés, les personnes impactées auront alors à prendre les mesures de protection qui s’imposent et qui ne semblent pas être cependant toujours suivies. Ainsi, en 2017, des personnes sont mortes à Cannes et à Mandelieu pour avoir tenté de retirer leur voiture de parkings souterrains. Le ministère du Développement durable publie une liste de huit recommandations qu’on ne saurait trop conseiller de suivre.
Infographie : Sarah Sermondadaz