De la taule à l'Elysée, elle a vécu une drôle de vie, Mimi... Mimi, c'est Michèle Marchand, 71 ans, grande papesse de la presse people à la tête de l'agence de paparazzis Bestimage, redoutée, détestée, adorée, aussi manipulatrice qu'attachante, aussi efficace qu'effrayante. Mimi, vaut mieux qu'elle vous apprécie ! Les trois auteurs, Jean-Michel Decugis, Pauline Guéna et Marc Leplongeon, racontent sa carrière longue comme le bras, proprio d'un restaurant, garagiste mécanicienne, tenancière de boîte lesbienne, vendeuse d'armes, dealeuse d'herbe, un peu journaliste, beaucoup patronne de presse - elle a souvent tout recommencé, sans jamais être très en règle.

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Ce livre, qui paraît aujourd'hui chez Grasset, elle n'en voulait pas, Mimi. Elle l'a dit. Elle a menacé, fermé les portes, elle a tout essayé. Elle n'avait aucune envie qu'on décortique sa vie, même si, la vérité, elle est plutôt fière de ce qu'elle en a fait. Ex-femme de voyou, nouvelle femme d'ex-flic, elle a connu Fresnes et Fleury-Mérogis pour des histoires de chèques, pour des affaires de coeur, pour les comptes pas très clairs de l'hebdomadaire Voici, propriété du groupe Prisma. Au fil des pages, on le comprend bien, le système de Mimi : "Elle ne compte ni son temps, ni ses efforts. Elle mobilise son réseau, tissé pendant quelques cinquante ans. (...) Mimi est le guide, efficace et dégourdi. (...) De là, le pas est vite franchi, qui consiste à se mettre tout simplement au service des plus forts, des plus riches, des plus puissants. (...) Mimi est là quand on a besoin d'elle. Et de services rendus en petits arrangements entre amis, elle trace sa route."

Quand Mimi rencontre Bibi

Elle a senti très vite le créneau du people, l'intérêt du public pour les petits secrets crapoteux des grands hommes. Ensuite, Mimi a fait comme elle a toujours agi - elle s'est rendue indispensable. A la tête de l'agence photo qu'elle a rachetée, elle est devenue l'intermédiaire incontournable du Tout Paris, forcément au courant, sachant prévenir plutôt que guérir, voyant venir ce qui ne doit pas sortir. C'est grâce à cette philosophie qu'elle rencontre les Macron, à un moment où ils sont soucieux de désamorcer les rumeurs qui circulent sur l'homosexualité supposée du ministre de l'Economie; ça colle tout de suite avec Brigitte, Bibi pour les intimes, qu'elle protège dans la jungle des médias...

La suite, c'est un mélange d'affection et d'intérêts partagés. Les auteurs de Mimi décortiquent le fonctionnement de la dame, la manière dont elle fabrique l'image qu'elle va vendre aux journaux, dont elle met en scène le couple Macron à tout bout de champ. D'autant qu'elle a beau détester la publicité, Mimi aime les honneurs, et la proximité du chef de l'Etat et de son épouse en est un d'importance. Aujourd'hui, l'Elysée s'est éloigné d'une femme devenue trop encombrante. Mais pendant plus d'un an, Mimi Marchand a assisté, une fois par semaine, aux réunions du cabinet de la Première dame.

Mimi se lit comme un roman, mi-Balzac mi-Maupassant, du monde interlope de la nuit à la lumière du Palais de la rue Saint Honoré. Mimi, c'est la bataille acharnée d'une femme pour exister, pour s'imposer, pour prendre le pouvoir et ne plus le partager. La veille de sa parution, Michèle Marchand, interrogée par L'Express, se défendant de l'avoir lu, affirmait pourtant : "Je ne connais pas cette femme. Mais j'adorerais la rencontrer pour faire un sujet photo !" Et c'est Mimi qui le dit.

Mimi, Jean-Michel Decugis, Pauline Guéna et Marc Leplongeon, Grasset, 205 pages, 19 euros

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