Domenico Lucano est désormais interdit de séjour dans sa commune de Riace. Crédit : Reuters
Domenico Lucano est désormais interdit de séjour dans sa commune de Riace. Crédit : Reuters

Le maire du village de Riace en Italie, village italien connu pour sa politique d'accueil des migrants, a vu mardi son assignation à résidence levée mais la justice l'a interdit de séjour dans sa commune. Domenico Lucano est accusé d'aide à l'immigration clandestine.

Nouveau coup dur pour le maire de Riace, petit village italien connu pour sa politique d’accueil des migrants. La justice italienne a interdit mardi 16 octobre Domenico Lucano de séjour dans sa commune mais a néanmoins levé son assignation à résidence.

L’édile était en résidence surveillée depuis le 2 octobre, date à laquelle il a été interpellé par la police pour aide à l’immigration clandestine. Il est soupçonné d’aide à l’immigration clandestine pour avoir favorisé des mariages blancs afin d’aider des femmes déboutées du droit d’asile à rester en Italie. Il est aussi accusé de s’être passé d’appel d’offres pour attribuer la gestion des déchets de son village à des coopératives liées aux migrants.

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Les avocats de Domenico Lucano réclamaient devant le tribunal de Reggio de Calabre (dans le sud de l’Italie) la levée de l’assignation à résidence de leur client, qui avait aussi été suspendu de sa fonction par le préfet.

Le juge en charge du dossier avait motivé sa décision en raison de la possible réitération du délit reproché au maire de 60 ans.

Ce dernier recouvre donc la liberté mais se retrouve dans le même temps interdit de séjourner sur le territoire de sa commune, considérée comme un modèle en matière d’intégration des migrants.

"Je ne veux plus avoir à faire avec ce gouvernement qui souvent ne respecte pas les droits de l’Homme"

Son village de 1 800 habitants faisait partie depuis des années du dispositif italien dit "Spar" (système de protection des demandeurs d’asile et des réfugiés) qui consiste en des centres gérés par les municipalités locales, via des subventions publiques.  

Le gouvernement populiste italien, formé par le parti d’extrême droite, La Ligue, et le Mouvement antisystème 5 étoiles, remet actuellement en question ce système d’accueil des migrants dans des petites structures, qui profite à bon nombre de communes.

"Même sans les aides publiques nous continuons seuls parce qu’au fil des années nous avons construit des aides à l’intégration qui font aujourd’hui la différence", a déclaré mardi Domenico Lucano, quelques heures avant de connaître la décision du tribunal.

"Nous devons sortir du ‘Spar’. Je ne veux plus avoir à faire avec ceux qui n’ont pas confiance et avec ce gouvernement qui souvent ne respecte pas les droits de l’Homme", a ajouté le maire.  

Quelques jours plus tôt, le ministère de l’Intérieur, dirigé par le chef de la ligue d’extrême droite, Matteo Salvini, a pris la décision de vider la ville de Riace des quelque 200 migrants encore insérés dans le "Spar".  

Une décision controversée qui a suscité l’indignation chez la population italienne mais aussi dans la sphère politique. "Honte. Ce n’est pas l’Italie", a notamment déclaré sur Twitter l’ancien Premier ministre, Enrico Letta. "Pour des raisons de décence, sur un territoire aussi beau et difficile que la Calabre, souvenez-vous que c’est la mafia qui devrait être poursuivie, et non un honnête homme comme Lucano", a pour sa part lancé l’Association nationale des partisans d’Italie (ANPI). L’ancienne présidente du Parlement italien, Laura Boldrini, a elle aussi fait part de sa colère. "Les priorités de Salvini en Calabre sont d’envoyer ailleurs les familles et les enfants et de démanteler un modèle d’intégration qui a fonctionné et qui est reconnu partout dans le monde", a-t-elle affirmé.

En 2016, Domenico Lucano avait été classé à la 40ème place parmi les 50 personnes les plus influentes du monde par le magazine américain Fortune.

 

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