BFMTV
Police-Justice

Un détenu français sur trois souffre de troubles psychiatriques

Il y avait 611 déclarations d'irresponsabilité pénale en 1989 contre 140 en 2010.

Il y avait 611 déclarations d'irresponsabilité pénale en 1989 contre 140 en 2010. - Thomas Samson - AFP

Selon une enquête menée par Europe 1, les cas où la justice reconnaît l'irresponsabilité pénale en raison de troubles psychiatriques ont été divisés par quatre en 20 ans.

La cour d’appel de Lyon doit se prononcer ce jeudi sur le cas d’un homme, schizophrène, accusé d’avoir tué un retraité de quatre coups de couteau au thorax en 2016. Est-il pénalement responsable de ses actes? A cette question, la justice répond de plus en plus souvent "oui". Selon une étude publiée en 2016, le nombre d’irresponsabilités pénales déclarées a été divisé par plus de quatre en 20 ans, passant de 611 déclarations en 1989 à 140 en 2010, révèle Europe 1.

"15% de ces malades n'ont rien à faire en prison"

Pourtant, les professionnels de la justice ne sont pas moins confrontés à des malades psychiatriques. Aurélie Poirier, juge d'instruction, explique au média qu’il est complexe de déceler l’abolition totale de discernement face à des discours qui paraissent cohérents: "C'est compliqué pour une personne qui pense: 'J’ai pu lui parler, donc ça veut dire qu’il comprend ce qu’il se passe'. Oui, il y a une compréhension, mais pas au sens de responsabilité, de la conscience de ce qui se passe." A ce jour, un détenu français sur trois souffre d’une pathologie psychiatrique plus ou moins importante. De l'aveu même de l'administration pénitentiaire, 15% de ces malades n'ont rien à faire en prison.

Depuis les années 2000, la préoccupation sécuritaire a par ailleurs pris le pas sur le principe d’irresponsabilité. "Beaucoup de psychiatres considèrent que les institutions psychiatriques actuelles ne sont pas adaptées à ces personnes. Il y a une crainte de la profession d’être impliquée dans la récidive des patients", développe la sociologue Caroline Portais.

Mesures de soins

Face à cette problématique délicate, il faut également composer avec les victimes qui sont dans l’attente d’un procès pénal. "Elles ont du mal à admettre qu'on est face à une personne qui est totalement démente, qui n'est pas en état d'être entendue ni de concevoir ce qu'elle a commis comme acte", souligne Aurélie Poirier.

C'est pour cela que depuis 2008, la justice a la possibilité d’exposer publiquement les raisons de ce qu’on appelait autrefois un non-lieu, en vertu de l’article 122-1 du code pénal sur la responsabilité pénale. Devant la chambre de l'instruction, en présence des victimes, les magistrats n'ont pas pour but de décider d'une peine mais de justifier l'irresponsabilité pénale et d'imposer des mesures de soins, comme une hospitalisation.

Ambre Lepoivre