Ventes des “armes numériques” : RSF dénonce le rétropédalage des États européens

Un document publié par Reporters sans frontières (RSF) révèle la volonté des États européens de freiner l’adoption d’un texte visant à mieux prendre en compte les droits humains dans l’exportation des biens dits à double usage. Ces technologies, vendues par des entreprises européennes à des régimes autoritaires, sont utilisées pour espionner les dissidents, et notamment les journalistes.

L’Union européenne va-t-elle vraiment fermer les yeux sur l’exportation des technologies de surveillance ? Alors que les pays de l’Union européenne s’accordent depuis 2016 - à la suite de nombreux scandales - sur la nécessité de mieux réglementer l’exportation de technologies dites à double usage dans des régimes autoritaires, un document du Conseil de l’Union européenne, obtenu par la section allemande de RSF (RSF Allemagne), révèle que plusieurs États sont prêts à sacrifier les droits humains sur l’autel de la rentabilité financière.


Dans un communiqué publié ce lundi, Reporters sans frontières (RSF), Access Now et Amnesty International dénoncent le double discours des États européens - Suède et Finlande en tête - qui affichent leur volonté de défendre les droits humains, tout en négociant en coulisses l’affaiblissement d’un texte destiné à mieux les prendre en compte.


“La volonté de certains pays de continuer de fournir des technologies de surveillance à des régimes autoritaires qui les utilisent pour violer les droits humains est choquante. La mort de Jamal Khashoggi a mis en lumière le niveau de pression et de surveillance contre les journalistes, déclare Elodie Vialle, responsable du Bureau Journalisme et Technologie de RSF. L’Europe doit mettre fin à la vente d’outils qui permettent d’espionner, de harceler et d’arrêter les journalistes. Ces technologies menacent la sécurité des journalistes et de leurs sources et donc les poussent à l’auto-censure.”


RSF avait déjà dénoncé, à la faveur d’un précédent “leak”, la volonté de neuf États d’affaiblir les conditions d’exportation des technologies à double usage. Parmi les points de crispation de ces États, la mise en place d’une clause qui permettrait de contrôler les technologies non encore répertoriées, mais qui pourraient menacer les droits humains. Les révélations de ce 29 octobre indiquent que la France et l’Allemagne semblent prêtes à accepter un compromis en suivant les États réfractaires, alors qu’un dernier vote est prévu devant le Conseil de l’Union européenne le 23 novembre prochain.


Ce document a été obtenu par la section allemande de RSF, et publié en exclusivité sur le site netzpolitik.org.


Consulter le communiqué dans sa version originale (en anglais).

Publié le
Mise à jour le 29.10.2018