Bébés nés sans bras : «On m’a dit, c’est la faute à pas de chance. Vraiment ?»

Plusieurs familles, dont certaines ne s’étaient jamais exprimées, réclament de vraies réponses aux autorités, après la naissance d’enfants atteints de malformations.

    Nous avons recueilli le témoignage de trois parents d'enfants nés avec une malformation congénitale. Ils nous confient leur désarroi et, surtout, leur envie de comprendre.

    «Je veux savoir pourquoi»

    Axelle, maman de Louis, 6 ans

    Louis, joyeux garçon de 6 ans, est né sans main droite. C'est seulement au moment de l'accouchement que sa mère a découvert sa malformation. « A la naissance, ça a été très dur. Lors des échographies, on ne m'a rien dit. On m'a ensuite orientée vers les hôpitaux de Lyon. Là, une spécialiste a conclu que ce n'était pas génétique et c'est tout », raconte Axelle Laissy, 41 ans.

    Il y a quelques jours, la maman « est tombée de sa chaise » quand elle a compris que Louis n'était pas un cas unique, mais au moins le huitième. Sept autres enfants sont nés sans main ou sans bras entre 2009 et 2014 dans un rayon de 17 km autour de Druillat (Ain). Elle s'est manifestée auprès du Registre des malformations en Rhône-Alpes (Remera) après avoir lu le témoignage d'une mère dans la presse. « Je me suis dit : c'est exactement pareil et, en plus, elle vit autour des champs, comme moi à l'époque à Villard-les-Dombes, pas bien loin de Druillat. »

    « Ça ne peut pas être une coïncidence, je veux savoir pourquoi il y a eu tant de malformations », enrage-t-elle. En s'installant dans la Dombes, elle était pourtant heureuse de vivre en pleine campagne, particulièrement « pour les enfants ». Louis est l'avant-dernier de cinq frères et sœurs. « A l'époque, personne ne parlait de grossesses à problème », soupire-t-elle.

    Sa mère Huguette, grand-mère de Louis, est agricultrice, « Bien sûr, ces malformations, ce n'est pas naturel. Mais je ne peux pas croire que c'est la faute des pesticides, j'ai cultivé des céréales avec mon mari toute ma vie, mes filles n'ont pas eu de souci. »

    «Les médecins ont été incapables de me fournir une explication»

    Claire*, maman de Christophe*, 7 ans

    « Je suis tombée enceinte en décembre 2011, raconte Claire, 36 ans, qui habitait à l'époque en Haute-Savoie, à vingtaine de kilomètres de l'Ain. Une petite malformation a été détectée à l'échographie de mes 5 mois de grossesse, à l'hôpital de Bron (Rhône). Mais on m'a d'abord dit qu'il n'y aurait aucun problème. Malheureusement lorsque mon fils est né il n'avait pas d'avant-bras gauche. »

    « Les médecins ont été incapables de me fournir une explication. Ils m'ont dit : c'est la faute à pas de chance. Vraiment ? » Ni Claire ni le papa n'ont de problèmes de santé. Ils vivaient alors à la campagne, entourés de champs, notamment de maïs. Elle travaille comme secrétaire. Christophe grandit bien, va à l'école, est joyeux… mais le mystère demeure. « J'espère que son cas a bien été répertorié… En tout cas personne n'est venu me voir. Heureusement que le Remera a lancé l'alerte », témoigne cette secrétaire.

    «Est-ce que c'est à cause des pesticides ?»

    Isabelle*, maman de Julien*, 5 ans

    Isabelle, 34 ans, est déterminée à comprendre ce qui est arrivé à son fils Julien… Mais pour l'instant, cette habitante d'une bourgade du Loir-et-Cher n'a pas de réponses claires du corps médical. « Quand il est né, il avait juste un petit moignon au bout de son poignet gauche. Ils ont fait des examens, mais rien de très probant n'en est ressorti. Ils évoquent l'hypothèse d'un problème vasculaire… mais sans preuve. »

    Avec son mari, ils vivent entourés de champs. « Est-ce que c'est à cause des pesticides ? Il n'y a pas peut-être pas de preuve. Mais je veux être sûre que l'on mène une vraie enquête sur le sujet. Et pour l'instant, ce n'est pas le cas. On nous doit une réponse sérieuse. » Officiellement, aucun excès de cas de malformations n'a encore été découvert dans son département.

    *Les prénoms ont été changés.