Manger bio réduit de 25 % le risque de cancer. C'est ce qu'on a pu lire partout dans la presse après la diffusion d'une étude de l'INRA le 22 octobre. En réalité, ces résultats ne sont pas aussi tranchés. Le faible nombre de cas de cancers étudiés et la surreprésentation de femmes biaisent quelque peu les conclusions. Les chercheurs eux-mêmes reconnaissent que leurs résultats "demandent à être confirmés". 

Ce n’est pas un mensonge, mais un raccourci. Le 22 octobre, une étude publiée dans la revue Jama Internal Medecine a fait les gros titres de la presse française. En Une des radios nationales, les auditeurs ont pu entendre que "consommer bio réduit de 25 % les risques de cancer". De quoi se ruer vers les primeurs les plus proches. Mais cette affirmation est exagérée.
Une marge d’erreur 
Les chercheurs de l’étude intitulée "Association entre la fréquence de consommation de produits bio et le risque de cancer" se sont appuyés sur 68 946 personnes de la cohorte française NutriNet. De 2009 à 2016, ils ont suivi leurs habitudes alimentaires et les ont classés en quatre groupes allant des plus faibles mangeurs de produits bio aux plus assidus.
Pendant ces sept années, 1 340 participants ont développé un cancer. 2,1 % des malades étaient classés parmi les plus petits mangeurs de bio et 1,5 % dans celui des gros consommateurs. Une différence de 0,6 point qui équivaut à ce fameux taux de 25 % de risque en moins. On constate que cette différence est établie sur un faible nombre d’individus et non sur la cohorte générale des près de 70 000 participants. Ces résultats sont donc à relativiser.
Une population peu représentative
En outre, les chercheurs reconnaissent eux-mêmes que les individus étudiés ne sont pas représentatifs de la population générale. La cohorte, basée sur le volontariat, comprend 78 % de femmes, âgées en moyenne de 44 ans et qui ont une alimentation plutôt saine à l’origine. D’où le nombre important de cancers du sein observés chez les participants. Ils représentent 549 cas contre 180 pour les cancers de la prostate, le deuxième plus fréquent.
Aussi, "cette association (entre alimentation bio et cancer) est restreinte aux risques de cancer du sein postménopause et de lymphomes", pointe un éditorial publié par des chercheurs de Havard. "Le lien de cause à effet ne peut être établi sur la base de cette étude", souligne d’ailleurs l’INRA. Un fait que reconnaissent les chercheurs pour qui "les résultats de cette étude demandent à être confirmés".
L’utilité des pesticides mis en cause dans une autre étude 
Cette enquête, malgré plusieurs points à débattre, pose question. Au point que le ministre de l’Agriculture, Didier Guillaume, a salué l’étude sur Twitter.




Que ces résultats soient confirmés ou non par la suite, l’agriculture conventionnelle a déjà du plomb dans l’aile. En août, des chercheurs de l’INRA et de l’université de Rennes ont démontré que l’agriculture bio luttait plus efficacement contre les maladies que l’agriculture conventionnelle. Or, c’est justement pour lutter contre ces agents pathogènes que les agriculteurs utilisent des pesticides.
Marina Fabre @fabre_marina 

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