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La Roulante, Ma p'tite Mimi, La Madelon... Les grandes chansons de la Grande Guerre

Soldats français assistant à une représentation de music-hall à Dugny, près de Verdun. Rue des Archives/©Rue des Archives/PVDE

VIDÉOS - Lancées par des artistes vedettes de l'époque ou par des soldats sur le front, ces mélodies rythment les quatre années de conflit. Servant d'exutoire face à l'horreur et d'efficace moyen d'expression. 25.000 chansons seront censurées pour cause d'antimilitarisme.

«Le Poilu chante pour ne pas penser à son sort, ne pas penser aux champs de massacre et de douleurs», écrit le soldat Claude Parron dans son carnet de guerre de l'année 1915. Avant la Première Guerre mondiale, les chansons sont devenues le moyen d'expression le plus populaire, sortant des cabarets et des cafés-concerts. Pendant la guerre, des milliers de chansons continuent d'être créées. Parfois par des vedettes de la musique. Mais, bien souvent, ce sont les soldats eux-mêmes qui reprennent et adaptent des refrains en vogue.

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Les airs chantés par les Poilus constituent de véritables scènes de la vie des tranchées. Ils composent des odes plus ou moins grinçantes à tout ce qui rythme le quotidien. Ma P'tite Mimi est une conversation lascive d'un militaire avec sa mitraillette. Le Pinard, fondamental pour survivre, «fait du bien par où ce que ça passe». La Roulante, écrite par Lucien Boyer, un fameux guoguettier de Montmartre, déchaîne l'ironie des soldats en 1917. Il décrit avec mordant la cantine ambulante: «Les nouveaux riches dînent chez Paillard, les profiteurs y-z-ont un bar, mais le Poilu lui se sustente à la roulante.»

Un autre titre célèbre, Le Veilleur, est composé par René Clozier, soldat au 1er Régiment des Zouaves. «Je suis la sentinelle: d'autres dorment, moi je veille ; la tranchée est mon séjour, mon périscope à la main, et nuit et jour, et soir et matin. Et je veille, je veille toujours...»

Les mélodies servent à dire la réalité de la guerre mais aussi à s'en éloigner le plus possible. La Madelon qui met en scène une serveuse peu farouche, a enflammé bien des nuits des Poilus, après que Bach, un comique fameux, l'a chantée au front en 1916. Regrettant l'épouse patiente mais lointaine, les troupiers se consolent comme ils peuvent: «Ce n'est que Madelon mais pour nous c'est l'amour».

L'État-major comprend que cette musique légère, reprise en chœur par les soldats, peut donner de l'entrain aux troupes. Et devenir un outil de propagande. On chante la victoire de Valmy, on s'égosille sur La Marseillaise et Aristide Bruant, le plus grand chansonnier de l'époque, interprète Serrez vos rangs en soutien aux soldats. Claude Debussy, très malade, compose en 1915 une poignante chanson de Noël patriotique pour «les enfants qui n'ont plus de maison».

Des chants de bataille

La chanson est surtout un formidable outil de contestation. À tel point que les historiens estiment à 25.000 le nombre d'interdictions de la commission de censure pour antimilitarisme. Sur le meurtrier plateau de Craonne, en 1917, les soldats sont exténués et se rebellent contre les offensives sur le chemin des Dames. L'effroi devant les centaines de morts quotidiennes, leur inspire, sur la mélodie d'un tube d'avant-guerre, des paroles désespérées. «Adieu la vie, adieu l'amour, (...) C'est à Craonne, sur le plateau, Qu'on doit laisser sa peau, Car nous sommes tous condamnés, C'est nous les sacrifiés!» Le commandement militaire offre en vain une prime et la démobilisation à qui dénoncera l'auteur de ce brûlot contre l'hypocrisie des dirigeants et des «planqués». Jusqu'en 1974, elle était interdite.

À la fin de la guerre, un Français sur trois entre 18 et 27 ans est mort. S'ajoutent les gueules cassées, les veuves, les orphelins. La chanson se doit de jouer des airs de réconfort. Théodore Botrel, un héraut de la Bretagne au patriotisme exacerbé, chante Pour nos morts, sonnez clairons, à l'occasion du défilé du 14 juillet 1919. Il prononce l'oraison de ces «jeunes Dieux, tombés pour le salut du monde.»

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1 commentaire
  • Lilibus Lilib

    le

    C'est Raoul Le Peltier qui a écrit les paroles de La chanson de Craonne. On vient de le découvrir ! Il a également écrit l'un des plus beaux textes qui soit sur l'amour d'un homme à la rue pour son chien, avec Mon vieux Pataud, mis en musique bien plus tard et chanté par Berthe Sylva au début des années 30, alors que le texte date d'avant 14-18, et hélas, il n'a pas pris une ride plus de 100 ans après. Ce parolier était un génie et mériterait un article plus approfondi.

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