Plus qu’un pépin de santé occasionnel. Le vrai mal du siècle dans le monde du travail contemporain. Aujourd'hui, la lombalgie (mal de dos, lumbago, tour de rein...) est l’une des premières souffrances professionnelles, avec les phénomènes de stress, de burnout et de dépression – affections d’ailleurs souvent liées. L’avènement du digital et des écrans tous azimuts, source de sédentarité accrue, y est pour beaucoup. Tout comme un mobilier ou un environnement de travail inadaptés.
L’Assurance-maladie, qui lance cette semaine une vaste campagne de sensibilisation auprès des employeurs et entreprises, tire la sonnette d’alarme : aujourd’hui, plus de quatre actifs sur cinq disent avoir déjà eu mal au dos pendant ou après le travail. Selon l’Institut national de recherche et sécurité (INRS) plus des deux tiers des salariés ont souffert, souffrent ou souffriront un jour de lombalgie. Plus inquiétant encore : alors que le nombre d’accidents du travail diminue au fil des ans, la part relative des lombalgies dans ces accidents ne cesse de progresser : de 13 % en 2005, cette part est passée à 19,1 % en 2015 et à 20 % en 2017. Pour le salarié, comme l’entreprise et la Sécurité Sociale, la facture est lourde : le mal de dos constitue aujourd’hui 20 % des accidents de travail, et 30 % des arrêts de travail de plus de six mois. Toujours selon l’Assurance-maladie, il a entraîné en 2017 la perte de 12,2 millions de journées de travail, soit l’équivalent de 57.000 emplois à temps plein. Pour les entreprises, le coût a dépassé l’an dernier le milliard d’euros, somme à laquelle se sont ajoutés les 661 millions d’euros pris en charge par la Sécurité Sociale.
Au bureau, comme à l’usine, la lombalgie guette
Devant un constat aussi criant, la campagne de l’Assurance Maladie appelle donc les entreprises à se mobiliser : « Employeurs, faites du bien à votre entreprise, agissez contre le mal de dos ». Si certains secteurs sont plus touchés – sans surprise, le commerce, les services d’aide à la personne, le BTP, la gestion des déchets, le transport et la logistique – aucune activité n’est réellement épargnée. Au bureau, comme à l’usine, la lombalgie guette. Mais pas question pour autant d’exclure le salarié malade, insiste l'Assurance maladie: « En cas de lombalgie commune, le maintien de l’activité physique et professionnelle, voire la reprise précoce du travail dans des conditions adaptées, est l’un des éléments clés pour prévenir le passage à la chronicité. »
Aux entreprises de se saisir du sujet
Le mal de dos ne fait pas forcément partie du métier ! Le meilleur remède ? Encore et toujours la prévention. Des conseils de bon sens des médecins et kinésithérapeutes, comme celui de bien s’asseoir en face de son ordinateur ou plan de travail, de faire des pauses pour s’étirer et bouger régulièrement, de plier les genoux avant de soulever quelque chose de lourd… Aux entreprises surtout de se saisir du sujet. Selon le baromètre BVA -Assurance maladie, quatre employeurs sur cinq déclarent avoir mis en place des plans d’actions : adaptations de l’environnement (53 %) et des postes de travail (57 %), actions d’information et de sensibilisation (53 %) … mais seulement un peu plus du tiers dit avoir réellement réorganisé sa chaîne du travail (polyvalence, horaires…).
« Les entreprises doivent pourtant s’emparer du sujet car un salarié qui souffre est un salarié plus stressé et forcément moins efficace, » martèle Emmanuel Coudeyre, du service de médecine physique et de réadaptation du CHU de Clermont Ferrand, expert et auteur de plusieurs ouvrages sur la lombalgie. Aménager des espaces de repos, revoir les postes pour limiter les distances de port de charge ou le poids des objets transportés, alterner les tâches et les positions assises et debout, promouvoir le sport durant les heures de travail… Des ténors de l'aménagement de bureaux, adeptes de la mobilité comme Steelcase, Artdesk ou encore Majorelle s'attaquent aussi au problème. Les entreprises n'ont plus d'excuse. Si le salarié en a plein le dos, des solutions existent!