Après le Front national, voici venu l'heure du "Front local". Forte de la bonne performance des listes estampillées Rassemblement Bleu Marine (RBM) au premier tour des municipales, Marine Le Pen a fait mardi après-midi au siège du FN à Nanterre une analyse triomphale des résultats. 486 candidats d'ores et déjà élus dans des conseils municipaux, 108 dans des intercommunalités, 328 listes présentes au second tour dont 229 dans des communes de plus de 1.000 habitants, plus de 30% dans 31 villes... N'en jetez plus! Un triomphalisme qui n'est pas opposé à la prudence puisque Marine Le Pen se refuse toujours à évoquer un objectifs de communes à conquérir. Car, malgré l'indéniable performance, le compteur est pour l'instant bloqué à une ville [Hénin-Beaumont].
Pour attirer les voix au second tour, Marine Le Pen tente de rassurer. Contrairement à ce que les maires FN élus en 1995 à Vitrolles, Marignagne ou Toulon ont tenté de faire, les maires RBM, qualifiés de "républicains", "ne feront pas de leurs villes des laboratoires idélogiques". "Les habitants ne sont pas des cobayes", a insisté la présidente du FN qui a promis de "respecter la loi". "Nous la changerons quand nous serons au pouvoir", a-t-elle pris soin de préciser. En cause: le principe de priorité nationale qui reste le fer de lance du programme du FN mais sur lequel Bruno Mégret, qui avait tenté de l'appliquer à Vitrolles, s'était déjà cassé les dents. En 1998, une prime de naissance pour les familles dont l'un des parents au moins était français ou européen avait été jugé illégalle par le tribunal administratif de Marseille. "Nous avons tiré quelques leçons de 1995."
Le risque de décevoir les électeurs
Des propos qui se veulent rassurants et qui font écho à ceux de Louis Aliot, vice-président du FN, qui juge que l'application de la préférence nationale à l'échelle locale est une "perte de temps". Ou à ceux du secrétaire général du parti et nouveau maire d'Hénin-Beaumont Steeve Briois, qui assure qu'il n'exigera pas "de visa à l'entrée de la ville", ni qu'il souhaite "l'encercler de barbelés". Et Marine Le Pen d'aller jusqu'à promettre une gestion des villes conquises "en bon père de famille", rappelant qu'en période de crise, les investissements ne peuvent être aussi importants qu'en période faste.
Mais à force de vouloir s'embourgeoiser, le risque est de décevoir des électeurs qui attendent du FN une politique différente. Interpellée à ce sujet, Marine Le Pen est peu à l'aise. La question serait une "forme de mépris pour les électeurs" qui seraient incapables de faire la distinction entre enjeu national et enjeu local, assure-t-elle. Dans quels domaines l'action municipale serait finalement une déclinaison du programme national? "la lutte contre le communautarisme", "la défense du petit commerce face à la grande distribution", "la lutte contre l'insécurité et le règne des petits voyous" ainsi que la "laïcité".
Sur ce dernier point, la porte-parole du gouvernement Najat Vallaud-Belkacem a assuré dimanche que le programme du FN consisterait à "obliger tous les enfants dans les cantines à manger du jambon". Une "caricature", avait répondu Steeve Briois. Alors que, dans certaines écoles, un menu alternatif est proposé aux enfants lorsque du porc est servi, sans que cela ne crée de polémiques, Marine Le Pen se veut inflexible: "aucune revendication religieuse ne doit rentrer dans l'école".