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Les animaux d'élevage encore trop souvent victimes d'abus en Europe

Que ce soit dans l'élevage, pendant le transport ou l'abattage, des faiblesses persistent en matière de respect du bien-être animal en Europe, d'après un rapport de la Cour des comptes européenne.

Le secteur de l'élevage constitue 45 % de l'activité agricole de l'UE et génère un chiffre d'affaires de 168 milliards d'euros par an
Le secteur de l'élevage constitue 45 % de l'activité agricole de l'UE et génère un chiffre d'affaires de 168 milliards d'euros par an (SIPA)

Par Leïla Marchand

Publié le 18 nov. 2018 à 13:23

Quatre milliards et demi de poulets, de poules pondeuses et de dindes et 330 millions de bovins, de porcs et de chèvres sont élevés dans les fermes en Europe. Leur bien-être est censé être garanti par l'Union européenne, qui reconnaît les animaux comme des êtres sensibles. Dans les faits, ce statut n'est pas toujours respecté, selon un rapport publié cette semaine.

Un audit de la Cour des comptes européenne montre que les abus envers les animaux d'élevages restent répandus dans l'UE. « Les actions de l'UE destinées à améliorer le bien-être des animaux ont porté leurs fruits dans certains domaines, mais le respect des normes minimales présente encore certaines failles », conclut le rapport.

Les exploitations agricoles intensives sont particulièrement problématiques, le bien-être des animaux « n'allant pas toujours de pair avec les intérêts économiques des exploitants », note le rapport.

« Quand il y a 100.000 porcs, c'est très difficile à contrôler. Les petites exploitations sont des endroits plus faciles pour atteindre des normes élevées en matière de bien-être animal », explique Janusz Wojciechowski, membre de la Commission et responsable du rapport, interrogé par le Guardian.

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Modifications physiques douloureuses

Ainsi, les animaux élevés dans ces conditions intensives (forte densité, confinement…) ont tendance à adopter des « comportements anormaux », tels que « le piquage de plumes et le cannibalisme chez les poules pondeuses, l'agressivité et la caudophagie chez les porcs, et l'agressivité chez les veaux. »

Pour y remédier, les exploitants procèdent à des « modifications physiques douloureuses pour les animaux », en leur raccourcissant le bec (épointage), en leur coupant la queue (caudectomie), en les castrant ou en leur sectionnant partiellement les dents.

Caudectomie systématique, manque de ventilation…

Ces pratiques, autorisées par la législation de l'UE de façon exceptionnelle, sont en réalité systématiques dans la plupart des exploitations, en particulier la caudectomie des porcelets, pointe le rapport.

Les maladies affectant les vaches laitières (mastite, blessures, maladies reproductives…) ainsi que les problèmes de ventilation dans les poulaillers (où les volailles respirent un air chargé en ammoniac, issu de leurs fientes) sont également épinglés dans l'audit.

Problèmes durant le transport

De même, charger moins d'animaux à la fois et faire des pauses durant le trajet est « contraire aux intérêts économiques des transporteurs », explique la Cour, qui note des problèmes « de respect des règles » sur les transports longue distance et des transports d'animaux trop jeunes (une pratique interdite).

Pratiques inadéquates lors de l'abattage

Lors de l'abattage, la vitesse de la chaîne de production « constitue un facteur clé pour la productivité », mais elle se fait parfois aux dépens d'une bonne manipulation des animaux et à un étourdissement efficace, poursuit-elle.

Le rapport prend l'exemple d'un abattoir visité en France. Sur ce site, les veaux sont étourdis par un choc sur la région occipitale, pourtant réputé moins fiable qu'un choc sur la région frontale. Mais « l'avantage de cette autre méthode est qu'elle occasionne moins de lésions cérébrales et laisse moins d'éclats d'os, ce qui permet une meilleure commercialisation du cerveau de l'animal », peut-on lire dans le rapport.

Volailles électrocutées par bain d'eau

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La Cour s'inquiète également de l'étourdissement des volailles par bain d'eau (les volailles sont accrochées par les pattes, tête en bas, sur des crochets métalliques suspendus à un rail puis leur tête est immergée dans un bain d'eau électrifié), une pratique considérée comme inadéquate.

Enfin, certains abattoirs recourent de manière « excessive » à la dérogation qui les autorise à abattre des animaux sans étourdissement dans le cadre de rites religieux.

Des données incomplètes

Il ne s'agit pas là d'un panorama complet du degré de conformité des exploitations européennes avec la législation sur le bien-être des animaux. Pour une raison simple : les données disponibles au niveau de l'UE « ne sont pas suffisamment abondantes et fiables », écrit la Cour des comptes européenne en conclusion.

Dans cet audit, l'institution s'attachait à évaluer les mesures prises par la Commission européenne et les Etats membres pour améliorer le bien-être des animaux d'élevage après le lancement de la stratégie de l'UE pour la période 2012-2015. Or, comme elle a pu le constater, la stratégie 2012-2015 « n'a toujours pas été révisée et certaines de ses actions ont pris jusqu'à 5 ans de retard ».

Le rapport présenté au Parlement

De plus, la Commission se fonde sur les éléments fournis par les Etats membres pour effectuer le suivi de ses recommandations. Et elle ne se rend pas sur le terrain pour les vérifier. Parfois, la Commission a ainsi clôturé ses recommandations « alors que les Etats membres n'avaient pas véritablement remédié à tous les problèmes ».

Pour remédier aux défaillances identifiées, le rapport propose plusieurs actions : mieux utiliser les ressources financières de la PAC pour inciter les exploitants à adopter des normes plus ambitieuses, améliorer le système d'inspection et de sanction. La Commission européenne ayant accepté la quasi-totalité des recommandations, le rapport sera présenté prochainement au Parlement européen et à la commission de l'agriculture.

Leïla Marchand

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