Harcèlement sexuel : «  Comment j'ai mis fin à trois ans d'enfer  »

TÉMOIGNAGE. Victime d'agressions sexuelles commises par son entraîneur de basket pendant trois ans, Aurélie raconte comment elle a mis fin à ces sévices.

Propos recueillis par

Après avoir été abusée sexuellement pendant trois ans par son coach de basket, Aurélie est parvenue à faire condamner son agresseur huit ans après les faits. Il a écopé de 6 mois de prison avec sursis et 6 000 euros d’amende. Image d'illustration.

Après avoir été abusée sexuellement pendant trois ans par son coach de basket, Aurélie est parvenue à faire condamner son agresseur huit ans après les faits. Il a écopé de 6 mois de prison avec sursis et 6 000 euros d’amende. Image d'illustration.

© AFP

Temps de lecture : 3 min

Ce sont « ses trois années en enfer ». Aurélie Pankowiak, âgée de 29 ans, a été agressée sexuellement de 15 à 18 ans par son entraîneur de basket. « Il me fit avoir des rapports sexuels avec lui partout où il voulait et quand il voulait : dans le parc, la forêt, les vestiaires du gymnase, sa voiture, son appartement, explique-t-elle. Il m'avait transformée en esclave sexuelle. »

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Après avoir raconté ces trois années d'emprise, la jeune femme, qui tente de se reconstruire en suivant un doctorat dans le sport à Melbourne (Australie), explique au Point comment elle est parvenue à mettre un terme à ces sévices. C'est le début d'un long combat pour faire éclater la vérité. Il lui faudra attendre huit ans pour faire condamner son agresseur à 6 mois de prison avec sursis et 6 000 euros d'amende*.

Lire aussi « J'ai été abusée sexuellement par mon entraîneur de basket  »

«  J'avais en moi le désir de me tuer  »

« À l'école, mon état devenait de plus en plus critique. Je pleurais souvent, mes notes baissaient et j'avais besoin de parler. Mon niveau de solitude, de désespoir, de douleur et de haine de moi était poussé à l'extrême. J'avais en moi le désir de me tuer. Plusieurs fois, j'ai pensé à mettre fin à mes jours, y voyant l'unique façon d'être enfin libérée de son emprise.

Pour tenter d'en sortir, j'ai essayé de parler. Dans mon lycée, je m'étais confiée à deux femmes – une de mes enseignantes et l'assistante sociale – pour leur expliquer que quelque chose se passait entre moi et mon entraîneur de basket. Elles savaient que nous avions des rapports sexuels et que j'en souffrais. L'assistante sociale m'a recommandé d'aller au centre d'aide psychologique de la ville où était basé le lycée. Là, on ne m'a rien dit non plus. Je n'avais aucun souvenir de m'y être rendue. Ce n'est que dix ans plus tard, en relisant les documents de l'enquête de la police, que je l'ai appris. C'est très étrange, mais à cause du traumatisme que j'ai vécu, une partie de mes souvenirs liés à cette histoire ont disparu de mon esprit. »

«  J'avais l'opportunité de reprendre le contrôle  »

« Pendant les faits, j'étais extrêmement manipulée, je n'étais pas en capacité de me rendre compte à quel point j'étais abusée et à sa merci. C'était d'autant plus difficile qu'il n'avait aucun mal à duper les gens autour de moi. Il faisait partie des gens appréciés de tous et respectés dans le club par les autres bénévoles, les dirigeants, les joueuses, joueurs et leurs parents. Pour lui, c'était le masque parfait pour continuer à m'abuser.

Lors de ma première année après le lycée, alors que les sévices duraient depuis déjà trois ans, j'essayais désespérément de m'enfuir du trou noir sans fin dans lequel il m'avait emprisonnée. Je tentais de m'accrocher à mon nouveau quotidien et à mes études. Un jour, une amie m'envoya un message. Elle m'indiqua qu'il avait essayé d'embrasser de force une de mes ex-coéquipières dans son appartement. J'ai tout de suite compris que c'était la fin. J'étais terrifiée, mais j'ai réussi à lui envoyer un texto. Pour la première fois, j'avais l'opportunité de reprendre le contrôle, de mettre un terme à ces trois années d'horreur. Je voulais, malgré la peur, lui dire enfin que c'était fini, que le cauchemar devait cesser.

Je lui ai donné rendez-vous à la salle de basket, afin d'être sûr que nous ne soyons pas seuls. Il se tenait face à moi, dans le hall du gymnase. Je lui ai enfin dit que je savais ce qu'il avait essayé de faire à mon ex-coéquipière. Il refusait de l'admettre, rejetait tout en bloc. Et il commença à se mettre en colère. J'avais peur qu'il me frappe alors je suis partie du gymnase. C'était la dernière fois que je lui parlais avant notre première confrontation dans les bureaux de la police, un an et demi après. »

* Il a été condamné par un tribunal correctionnel à 6 mois de prison avec sursis et 6 000 euros de compensations pour « atteinte sexuelle sur un mineur de plus de 15 ans non émancipé par le mariage commise par une personne abusant de l'autorité de sa fonction »

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Commentaires (12)

  • C'est-dit

    Je suis toujours surpris de lire des commentaires dans lesquels vous comme d’autres mettez en cause les juges alors même que vous n’avez aucune connaissance juridique.
    Le juge apprécie un fait réalisé au regard des textes existants et il n’a pas vocation à utiliser une boule de cristal. Les textes existants ont été votés par les députés que nous avons élu.
    Il n’y a que dans les dictatures que les juges condamnent pour des faits qu’une personne est susceptible de commettre.

    Les juges ne sont là pour lever des vices de procédure afin de minorer la sanction, c’est le rôle des avocats et les juges ne peuvent passer outre.

  • ALT

    Six mois avec sursis, c'est évidemment peu, si les faits sont avérés.
    Le seul vrai problème dans ce genre d'affaires, c'est la preuve.
    Si on ne peut pas prouver la culpabilité de l'accusé, il est juste de le relaxer.
    Sinon, c'est la porte ouverte à toutes les accusations les plus farfelues. Par exemple, il y en a eu beaucoup après l'affaire Dutroux, hélas.
    Mais, pour la victime, convaincue de sa bonne foi, vingt ans fermes c'est trop peu. Même si ses souvenirs ont des chances d'être biaisés.
    Alors, pour montrer qu'on ne laisse pas courir les fautifs, on inflige une peine de principe, bien qu'il y ait un risque non négligeable de condamner un innocent.
    Bref, c'est toujours une demi-mesure qui ne satisfait personne.

  • AM2B

    Beaucoup de commentateurs s'étonnent de la mansuétude du jugement.
    Mais il n'a pas été reconnu coupable d'agression sexuelle, mais d'atteinte sexuelle sur mineur. Ce qui explique la légèreté des peines. Au moins, il sera fiché comme délinquant sexuel et j'espère que cela l'empêchera de récidiver.
    Pour moi, cette jeune fille était sous emprise et ne pouvait pas être consentente. On vient de voir avec l'affaire Tron. Les jurés ont reconnu qu'il y avait eu des relations sexuelles, malgré les dénégations des accusés, mais ont considéré qu'il n'y avait pas eu de contrainte. Pourtant peut-il y avoir un réel consentement quand deux de vos supérieurs hiérarchiques veulent que vous participiez à leurs jeux sexuels pervers ?
    Cette problématique du consentement va aussi être au cœur du procès Ramadan. Consentir à des relations sexuelles ne veut pas non plus dire que l'on est prête à accepter violences et humiliations.
    Il ne faut pas s'étonner que si peu de victimes aient le courage de porter plainte.