Comment l’armée se prépare aux batailles du futur

Jambe bionique, casque de réalité virtuelle… Le premier salon de l’innovation de la Défense ouvre, ce samedi, au public.

    Pour avoir une idée de ce à quoi va ressembler le soldat du futur, il faut se rendre à… la Cité de la Mode et du Design! C'est ici, dans l'Est parisien, que se tient le premier Salon de l'Innovation de la Défense, qui ouvre ses portes au public samedi.

    Dans les allées, on croise des militaires, industriels, scientifiques, venus présenter leurs propres projets -160 sont exposés. Le robot greffeur de peau permet, par exemple, de soigner un soldat brûlé, à proximité du champ de bataille, sans attendre trop longtemps. Le principe est simple : un bras robotisé prélève à un endroit sain un échantillon de peau, qui, une fois mélangé avec une encre spéciale, via une imprimante 3D, est greffé sur la partie blessée du corps. « On peut le faire en une seule fois et l'opération ne dure pas plus de quelques heures », assure Amélie Thépot, la présidente de la start-up LabSkin Creations, qui à conçu le projet avec les Hospices de Lyon.

    Une jambe bionique

    Pour les militaires plus gravement blessés, la société Proteor a imaginé une jambe bionique nouvelle génération, constituée d'un ensemble genou-cheville-pied contrôlé par un microprocesseur. Abel Aber, 32 ans et militaire de formation, a perdu sa jambe gauche dans un accident à l'âge de 17 ans. Depuis, ce grand gaillard utilise plusieurs prothèses dont celle-ci qui lui « apporte un nouveau confort de marche, même si ça reste évidemment contraignant ».

    L'outil, développé avec le soutien de la Direction générale de l'armement (DGA) et disponible d'ici 2021, a ses limites : impossible pour le moment de monter un escalier, par exemple. « Et pour faire du sport, on a besoin de prothèses plus spécifiques », glisse cet amateur de boxe thaï.

    La société Proteor a imaginé une jambe bionique nouvelle génération./LP/Philippe de Poulpiquet
    La société Proteor a imaginé une jambe bionique nouvelle génération./LP/Philippe de Poulpiquet Nicolas Berrod

    Un casque de réalité virtuelle

    Autre innovation qui attire l'attention : la cape d'invisibilité, dite Caméléon. Imaginé pour camoufler un véhicule terrestre, ce système optique fonctionne grâce à une caméra haute définition qui capte l'environnement, et le reproduit ensuite sur la surface du blindé. « Les soldats peuvent facilement changer de treillis mais on ne peut pas repeindre un véhicule selon l'endroit où il se trouve », justifie Sébastien Fagour, ingénieur chez Nexter Systems.

    La maquette d’un prototype issu du programme Caméléon pour camoufler les engins blindés en temps réel./LP / Philippe de Poulpiquet
    La maquette d’un prototype issu du programme Caméléon pour camoufler les engins blindés en temps réel./LP / Philippe de Poulpiquet Nicolas Berrod

    Les soldats pourront, eux, bientôt, coiffer un casque de réalité virtuelle. Dans leur champ de vision, ils verront l'emplacement précis de leurs ennemis et de leurs alliés. « Avant d'agir, il est important qu'un soldat connaisse parfaitement son environnement », pointe David Cherel, l'un des dirigeants de la société Scalian.

    Dans le civil, ce casque servira, dès l'an prochain à Laval, pour permettre à des ouvriers du BTP d'éviter de casser une canalisation. « Travailler avec l'armée française nous permet d'acquérir du prestige et d'ouvrir des portes vers l'étranger », veut croire David Cherel. Mais beaucoup de ces innovations sont encore à l'état d'expérimentation. Et les militaires, qui souffrent souvent d'équipements vieillissants, devront attendre pour s'en servir en situation de combat.

    Une agence pour l'innovation

    Pour moderniser les armées, l'Agence de l'innovation de défense, dotée d'un budget d'1,2 milliard d'euros, a vu le jour en septembre dernier. « Il y avait déjà de l'innovation dans l'armée mais il a fallu créer une structure pour permettre aux entreprises de venir nous voir plus facilement et de savoir à qui s'adresser », glisse son directeur, Emmanuel Chiva.

    « L'innovation n'est pas un gadget, c'est une nécessité. Le futur de notre défense réside dans notre capacité à nous dépasser à innover », complète la ministre des Armées, Florence Parly, qui inaugurait le salon, ce vendredi. Mais si l'armée compte bien se débarrasser de son étiquette de « Grande muette » en communiquant massivement sur ces nouveaux outils, un sujet semble encore tabou : le niveau de financement, par le ministère, des projets de recherche.

    «Salon de l'Innovation de la Défense», salon ouvert au public ce samedi, au 34 quai d'Austerlitz (Paris 13e), de 10 heures à 19 heures. Inscription préalable recommandée sur www.defense.gouv.fr