Belgique

Violences conjugales: 70% des plaintes sont classées sans suite

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Par Marie-Paule Jeunehomme

Aujourd’hui, les victimes de violences psychologiques et/ou physiques peinent toujours à briser le silence, à tirer la sonnette d’alarme. Dans les cas de violence conjugale, le couple s’enfonce dans le secret, l’isolement. Les victimes ont bien du mal à mettre des mots sur ce qu’elles subissent et à se considérer comme victime. Mais une fois pourtant que ce pas là est franchi, qu’elles portent plainte, tout n’est pas plus simple pour autant. Trop souvent encore ces femmes quand elles s’adressent à la police ne sont pas entendues, pas prises au sérieux.


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Et puis, aujourd’hui en Belgique 70% des plaintes sont toujours classées sans suite. Fançoise a déposé plainte après les violences de son conjoint, elle sera classée sans suite : " Mon compagnon pratique le sport, il sait très bien s’y prendre pour ne pas laisser de traces. C’est un problème au niveau du dépôt d’une plainte. Tant qu’il n’y a pas de certificat médical avec coups et blessures et des traces visibles, vous n’êtes pas considérée, c’est terrible, c’est une double meurtrissure ".

Ecoutez le témoignage de Françoise

Une justice trop lente

Des efforts ont pourtant été réalisés. Des policiers ont été formés, des magistrats aussi.  Et des progrès ont bien été enregistrés. Mais cela reste insuffisant. Et depuis les attentats de Paris, de Bruxelles, la priorité est à la lutte contre le terrorisme. " Du coup les violences faites aux femmes ne sont plus une priorité ", affirme Yamina Zaazaa, co-directrice du Centre de prévention des violences conjugales et familiales.

Et puis il y a la lenteur de la justice, enchaîne Myriam de Vinck, sa collègue co-directrice. " Avant qu’il n’y ait une audience au pénal, cela prend du temps, des années même. Sans parler du tribunal civil.  Ce qui est très important pour les femmes victimes et les enfants. C’est au civil que se décide qui a la garde des enfants, qui garde le logement.  A Bruxelles tout cela prend un temps considérable. Or la question des enfants est un facteur  qui peut déclencher de nouveaux risques de violence".   

Travailler en réseau

L’accompagnement des victimes de violence conjugales, leur protection restent un sujet de préoccupation pour toutes les associations qui travaillent sur le terrain. Et il reste un travail important à faire. " Certains hommes devraient être arrêtés beaucoup plus tôt , on sait que dans certains cas de féminicide les hommes ont consulté des services généraux auparavant, et donc comment s’alerter les uns les autres d’avantage, comment travailler d’avantage en réseau, c’est pour moi l’enjeu des années qui viennent " explique Anne Jacob, psychologue et directrice de Praxis, une association qui accompagne les auteurs de violences, mais qui mène aussi un travail de formation des professionnels, policiers et magistrats par exemple.

Revoir les pratiques, et renforcer celles qui fonctionnent

Comme par exemple l’accompagnement des auteurs chez Praxis, les résultats sont là, explique Anne Jacob. " Une étude sur les récidives en Belgique a montré que quand on est dans une démarche d’accompagnement en groupe, comme ici chez nous, c'est-à-dire dans une mesure alternative à l’emprisonnement, les taux de récidives sont moins importants.  20% de récidives dans les 2 ans, cela reste énorme, mais les mesures plus coercitives comme l’emprisonnement ont des taux de récidives encore plus importants, plus du double que ceux que l’on a chez nous ".

 

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