« Les maternités en France frisent l’insécurité »

Publié le par Nathalie Courret

Lors de la conférence de presse du Collège national des gynécologues obstétriciens français qui s’est tenue le 23 novembre à Paris, le Pr François Goffinet, chef de service de la maternité Port-Royal, et le Pr Israël Nisand, président du Collège, ont lancé un cri d’alarme sur la qualité des soins dispensés dans les maternités françaises.

Pas assez de sages-femmes, pas assez de médecins accoucheurs, pas assez d’anesthésistes réanimateurs, et donc de grandes difficultés à assurer des soins non programmés de qualité… Les spécialistes ont choisi, ce matin, d’en parler.

« Nous avons le sentiment trop fréquent de ne pas accompagner les femmes comme elles devraient l’être et de risquer de les mettre, elles et leurs bébés en danger », a regretté le Pr François Goffinet, gynécologue-obstétricien.

Et ce spécialiste de préciser : « Je suis responsable de la maternité Port-Royal et je sais que la qualité des soins n’est pas au rendez-vous. Nous avons beau être bien placés dans le classement des maternités que réalise Le Point, il nous faudrait deux sages-femmes et un anesthésiste de plus. N’en avoir qu’un seul lors des gardes ne me paraît pas raisonnable voire dangereux. » Quand on sait que cette maternité parisienne de niveau 3, réputée, accueille des grossesses et des accouchements à risque, de tels propos sont pour le moins inquiétants.

Un cri d’alarme sur la qualité des soins

Le Collège national des gynécologues et obstétriciens français (CNGOF) assume : il lance un cri d’alarme sur la qualité des soins prodigués dans les maternités françaises, qui selon lui frisent l’insécurité. Selon le CNGOF, la restructuration et le regroupement des maternités depuis les années 2000 a certes permis de faire des économies, mais « la réflexion n’a pas été portée sur la qualité et la sécurité des soins. De plus, le report de soignants des maternités fermées vers les grandes maternités créées ne s’est pas fait », explique le Pr Goffinet.

Face à ce constat, le Collège a décidé d’émettre des recommandations, réunies dans un livre blanc qui sera distribué prochainement à tous les gynécologues-obstétriciens de France. « La prise en charge d’un accouchement nécessite la présence d’une sage-femme pendant 12 heures. Pour une maternité qui réalise entre 3.000 et 4.500 accouchements, la jauge de personnel minimum requis pour l’ensemble de l’activité non programmée devrait ainsi pouvoir compter sur 5 à 7 sages-femmes, quand elle tourne en général avec une ou deux de moins aujourd’hui, relève le spécialiste. Une maternité de cette taille devrait également compter un gynécologue-obstétricien d’astreinte en plus de celui de garde pendant 24 heures, mais aussi un médecin anesthésiste-réanimateur supplémentaire. »

« Nous sommes la seule cible des femmes témoignant de maltraitances dans les maternités alors que nous manquons cruellement de moyens humains et que le ministère de la Santé et des Solidarités ne nous entend pas », a ajouté le Pr Israël Nisand, président du CNGOF .

Le nerf de la guerre ? L’argent. « Pour que les hôpitaux puissent tenir, il faut augmenter la recette d’un accouchement, c’est aussi simple que cela », répondent les deux spécialistes.