Saint-Maur : elle est presque aveugle, Pôle emploi lui propose un poste de conducteur de train

Sophie Gleize, demandeuse d’emploi qui souffre de déficience visuelle à plus de 80 %, a reçu cette offre «complètement débile».

 Sophie Gleize, handicapée visuelle à plus de 80 %, s’est vue proposer un poste de conducteur de train par Pôle emploi.
Sophie Gleize, handicapée visuelle à plus de 80 %, s’est vue proposer un poste de conducteur de train par Pôle emploi. LP/Laure Parny

    Elle n'a même pas pu lire seule cette proposition d'emploi. Sophie Gleize, demandeuse d'emploi de Saint-Maur, vient de recevoir une offre de travail vantant les nombreux postes de conducteurs de train à pourvoir à la SNCF. Un vrai choc pour cette femme de 55 ans qui souffre de déficience visuelle à plus de 80 %.

    « Tout arrive sur la boîte mail de mon fils, puisque je ne peux pas lire les courriers », raconte celle qui a progressivement perdu la vue à la quarantaine. La faute à une maladie génétique rare : la rétinite pigmentaire. « J'étais surprise et déçue quand il m'a lu cette proposition complètement débile, Ça montre à quel point quand on est handicapée et qu'on veut travailler, rien n'est adapté à notre spécificité. Tout ça est ridicule plus que grave. »

    Une autre proposition… d'agent de sécurité

    Avec cette annonce, la seconde seulement en deux ans selon elle, Sophie Gleize n'en était cependant pas à son coup d'essai. « Comme je suis éducatrice canine, Pôle emploi m'a proposé un poste d'agent de sécurité avec un chien. Comment voulez-vous que je fasse en n'y voyant rien ? »

    Sophie Gleize, qui a exercé comme coach sportif et esthéticienne avant que la maladie ne vienne perturber toute sa vie, refuse de rester chez elle à ne rien faire. « Quand vous avez plus de 50 ans que vous êtes une femme et en plus handicapée, on vous dit de vous contenter des 900 € mensuels d'allocation adulte handicapé, mais ce n'est pas une vie ça. Je ne veux pas être à la charge de la société. »

    Depuis qu'elle est inscrite à Pôle emploi, elle se bat pour chaque étape. En deux ans, plusieurs de ses requêtes n'ont toujours pas abouti : être reconnue travailleur handicapé, obtenir et se former à un logiciel qui grossit les caractères pour retrouver de l'autonomie sur ordinateur…

    « Le handicap, c'est un combat permanent »

    « Quand j'ai obtenu mon chien guide, ça m'a donné envie de devenir éducatrice canine, raconte-t-elle. Même cette formation, je me la suis payée seule ! » Cette mère de deux garçons de 17 et 25 ans attend encore aujourd'hui un accord pour intégrer en janvier une formation d'éthologie canine à l'école vétérinaire de Maisons-Alfort. Elle dispense déjà des conseils via le bouche-à-oreille grâce à une rémunération en chèque emploi service.

    « J'ai déjà mon combat contre la maladie à mener, j'aimerais que pour les démarches on m'aide vraiment, plutôt que toujours me demander d'envoyer des mails que je ne peux pas rédiger. Même entrer à Pôle emploi quand j'ai rendez-vous je ne peux pas le faire seule, il faut taper un code ! Le handicap, c'est un combat permanent. »

    PÔLE EMPLOI RECONNAÎT « UNE ERREUR »

    Sophie Gleize a fait l'objet « d'un envoi groupé, qui tient compte d'une partie des critères de recherches des demandeurs d'emploi mais pas de tous ». Pôle emploi Ile-de-France reconnaît le côté « ubuesque » de cette proposition, reconnaît « l'erreur », mais précise qu'il ne s'agit pas d'une proposition personnalisée. Et qu'« il n'y a évidemment aucune conséquence au fait de ne pas répondre à ce mail ».

    L'agent chargé du suivi de Sophie Gleize l'a rencontré à plusieurs reprises « et la conseille pour toutes ses démarches », assure Pôle emploi. « Nous envoyons régulièrement des mails avec des opportunités d'emploi de façon un peu large, pour promouvoir les secteurs qui recrutent. On nous reprocherait de ne pas le faire », ajoute Pôle emploi, qui rappelle que son « objectif est d'aider les demandeurs d'emploi, surtout pas de les mettre face à leurs difficultés ».