Botswana, les fortunes de la vertu
Eldorado. On connaissait ses safaris haut de gamme. Grâce à ses prodigieuses mines de diamant, cet État austral entend bien valoriser son avenir.
De notre envoyé spécial Yves CornuSi vous tapez "Jwaneng" sur Google Earth, sur votre écran apparaîtra une vue aérienne de la ville en question, située dans le sud du Botswana. Et, à quelques kilomètres en direction du nord, un chancre d'une superficie exceptionnelle puisque à peu près équivalente à cette localité de près de 20 000 habitants.
Sur place, le spectacle est plus impressionnant encore. Une sorte de volcan dont la gueule ferait 2 bons kilomètres de diamètre et le cratère serait profond de près de 400 mètres. Mais celui-ci n'émet pas de fumerolles, seulement des quantités impressionnantes de poussière que les arroseuses ne parviennent pas à plaquer. Il ne crache pas non plus de lave, juste des diamants. Beaucoup. Une quinzaine de millions de carats par an, ce qui fait de Jwaneng la mine la plus productive au monde. Et il en existe trois autres comme ça dans le pays. Tout est hors norme ici, le site, les excavatrices qui arrachent la pierre à la paroi, les camions de 300 tonnes qui la convoient vers le centre de tri et jusqu'aux diamants eux-mêmes. La merveille de 101 carats qui s'est envolée à plus de 26 millions de dollars chez Christie's l'an dernier sortait de ce trou. En fait, seuls les babouins qui se prélassent au soleil de l'été austral semblent être à l'échelle 1.
Le diamant est au Botswana ce que le pétrole est aux pays du Golfe : un don du ciel, en l'occurrence de la terre, qui assure aujourd'hui une bonne moitié de ses recettes. Mais les dons n'étant que ce qu'on en fait, ce pays d'Afrique australe a dû apprendre à gérer l'abondance sans être victime de ce que les spécialistes appellent la malédiction des matières premières. Et il faut bien admettre qu'il a vite appris.
Quand, en 1966, l'ancien protectorat britannique accède à l'indépendance, il figure dans le peloton de queue des États africains. A peine plus de 400 000 habitants pour un pays presque aussi étendu que la France, mais aux deux tiers désertique, une économie basée sur l'élevage, des élites et des infrastructures inexistantes.