Karl Munter a été condamné en France pour le massacre d'Ascq, près de Lille.

Karl Münter a été condamné par contumace en France en 1949 pour ce massacre.

Fabienne Hurst/ARD

Au total, 86 civils ont été assassinés. Ancien soldat SS impliqué dans le crime de guerre d'Ascq, près de Lille en avril 1944, Karl Münter justifie l'assassinat de ces civils. Dans une interview au magazine politique Panorama de la chaîne allemande ARD diffusé ce soir (1), il minimise également le nombre de morts de la Shoah. Âgé de 96 ans, Karl Münter, qui coule une retraite paisible Outre-Rhin, est même récemment apparu devant des néo-nazis allemands, un public acquis à sa cause.

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En 1944, Karl Münter, âgé à l'époque de 21 ans, était Unterscharführer dans la 12ème SS Panzerdivision, la division impliquée dans le massacre d'Ascq. En réponse à un acte de sabotage contre un train allemand, les SS avaient emmené les hommes du village pendant la nuit, les avaient conduits à la gare, puis fusillés.

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Dans l'interview à Panorama, Karl Münter assure qu'il n'a tiré sur aucun des habitants d'Ascq, mais était uniquement responsable de leur détention. Il considère pourtant que ces tirs étaient légitimes et les justifie par une prétendue tentative d'évasion : "Si j'arrête les hommes, alors j'en ai la responsabilité. Et s'ils s'enfuient, j'ai le droit de leur tirer dessus. Tant pis pour eux !"

Affaire classée

Les autorités allemandes ont enquêté sur l'implication de Karl Münter dans ce massacre. Il a été soupçonné de complicité de meurtre jusqu'en mars 2018, date à laquelle le procureur général de Celle, en Basse-Saxe, a classé l'affaire. En cause : l'ancien SS ne pouvait pas être accusé, car il avait déjà été condamné à la peine de mort par contumace en France en 1949 pour ce même crime.

Pourtant, Karl Münter n'a jamais été traduit en justice, et sa peine exécutée, puisque l'Allemagne ne l'a ni extradé ni condamné. L'homme n'a donc jamais passé une seule journée en prison. Qualifié à l'époque de crime de guerre en France, il a été frappé de prescription vingt ans plus tard.

Désormais, l'ancien SS est libre de raconter sa propre vérité. "S'ils avaient la conscience tranquille, pourquoi fuyaient-ils ?", s'interroge-t-il au sujet des habitants d'Ascq. Encore aujourd'hui, Karl Münter, qui avait volontairement rejoint la Waffen-SS, ne croit pas que les Allemands soient à l'origine de la Deuxième guerre mondiale. Surtout, il minimise les crimes nazis. Interrogé sur les millions de juifs assassinés, Karl Münter répond : "Il n'y avait pas tant de juifs chez nous à l'époque. Cela a déjà été réfuté. Je ne pense pas qu'il y ait eu six millions de juifs assassinés. Vous pouvez soustraire un zéro."

"Pour qu'une telle chose ne se répète jamais"

Pour l'extrême droite allemande, Karl Münter est un héros. Après l'enquête réalisée par Panorama, il est apparu début novembre chez Thorsten Heise, néo-nazi et vice-président du NPD, le parti allemand d'extrême droite. Lors d'une conférence avec des témoins de la guerre, Karl Münter a pris la parole devant une centaine de personnes pour raconter sa carrière à la Waffen-SS. Il a pu signer des dizaines de photos de lui, a-t-il déclaré à la chaîne allemande, se vantant de recevoir quotidiennement des demandes d'autographes.

Rolande Bonte est la fille d'un cheminot assassiné. Les SS ont fait sortir son père de chez lui dans la nuit du 1er avril 1944. Il n'est jamais revenu. A Panorama, elle déclare ne pas comprendre "comment on peut faire l'éloge de telles personnes". Aujourd'hui, elle n'a qu'un souhait : "Le SS est vieux, il ne changera plus. Mais vous devez vous assurer qu'il n'infecte personne d'autre avec ses idées. Pour qu'une telle chose ne se répète jamais."

(1) Le reportage de "Panorama" sur Karl M. sera diffusé ce jeudi soir à 21h45 sur "Das Erste" et sur https://live.daserste.de/

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